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Actualités - OPINION

La stratégie régionale US passée au crible à Beyrouth

Passant au crible la nouvelle stratégie régionale des États-Unis, un ancien diplomate libanais assure qu’elle a été mise au point dès 1995, lors du quatrième congrès annuel des décideurs consacré aux relations américaines avec le Moyen-Orient. Devant cette conférence majeure, le commandant en chef de la région centrale (Centcom, dirigé aujourd’hui par le Libanais d’origine John Abizeïd), le général Ben Ford Pea, a développé le programme suivant : – Les USA, comme ils l’ont fait pour libérer le Koweït, doivent toujours contrer rapidement, et radicalement, l’Irak de Saddam. – Leurs objectifs principaux restent la protection des puits de pétrole, des lignes maritimes, des ressortissants américains et des pays amis. – À cette fin, ils doivent montrer leur force, en se déployant immédiatement dans toute zone de conflit ou de combat. Ils doivent faire acte de présence d’une manière permanente pour imposer leur domination aux ennemis aussi bien qu’aux amis. Avec ces derniers, il leur faut toujours organiser des manœuvres militaires conjointes. Ils doivent également leur fournir des armes américaines variées, au titre de l’assistance sécuritaire. Enfin, ils doivent être toujours prêts à se battre, étant donné que l’Irak et l’Iran représentent une menace continuelle pour la région. Un autre général du Centcom, John Jumber (armée de l’air), a pour sa part évoqué l’aide matérielle militaire aux pays du Golfe arabe. En insistant sur le maintien d’un taux élevé de crédibilité en matière de renseignement et d’intervention sur le terrain. Il a, également, mis l’accent à la fois sur la nécessité de manœuvres militaires conjointes et sur la livraison d’un armement moderne aux alliés arabes. Le pétrole De son côté, l’ancien sous-secrétaire d’État pour le Moyen-Orient, James A. Plocke, a traité du volet économique, le pétrole et le gaz en tête. Il a relevé que les prix avaient baissé, signalant la montée en puissance dans ce domaine des pays non affiliés à l’Opec. États dont la production, qui était de 41,8 millions de b/j (barils/jour), surpassait déjà de loin, en 1990, celle de l’Opec qui affichait une performance de 29 millions de b/j. Avec une perspective de 45,7 millions de b/j à l’horizon 2010. Plock indiquait que la production irakienne de l’époque était de 0,6 million de b/j, avec une capacité à atteindre les 2,1 millions de b/j. Quant à l’Iran, sa situation économique était délicate, la dette publique s’élevant à l’époque à 30 milliards de dollars. Une partie de ses recettes pétrolières servait donc à couvrir le service de la dette (paiement des intérêts). L’Arabie saoudite, pour sa part, avait engagé une réforme salutaire, mais ses dépenses restaient proportionnellement élevées et elle songeait alors à relever ses tarifs pétroliers, ce qui aurait fait flamber les marchés. Une politologue, le Dr Phoebe Hebeman, intervenant ensuite, avait prévu que Saddam pourrait durer jusqu’au siècle nouveau, malgré la grogne intérieure et la perte de contrôle du nord de l’Irak. Ajoutant qu’il continuerait à donner des migraines à l’Administration US. Elle indiquait qu’il existait une double alternative : le maintien du régime des sanctions ad libitum ; le dialogue, prôné par les Français ; enfin le renversement de Saddam, proposé par les Israéliens. Elle soulignait que ce dernier choix serait source de problèmes, car les USA auraient du mal à trouver un substitut au régime de Saddam, étant peu au courant des complexités irakiennes. Retour à l’actualité. L’ancien ambassadeur libanais prend acte de la récente déclaration des pays riverains insistant, après la réunion de leurs ministres des AE au Koweït, sur la souveraineté et sur l’unité de l’Irak. Mais, à son avis, ce pays est voué au fédéralisme. Car Colin Powell ne fait pas mystère que c’est l’option que son gouvernement favorise. Paul Bremer, le gouverneur en titre, se contente de son côté de promettre que ce fédéralisme ne sera pas de nature ethnique ou confessionnelle. Entendre qu’il sera purement géographique. Un membre du Conseil irakien, Mouwaffak Rabihi, plaide pour sa part pour un fédéralisme qui soit un facteur de cimentation plutôt que d’éloignement pour les composantes de l’Irak. Il s’agirait à son sens d’un partage non pas en base d’arabisme et de kurdisme, ni de chiisme et de sunnisme, mais en base de spécificités culturelles et régionales. Autrement dit, un système de centralisation administrative et non de dispersion politique. Même point de vue que développe le Kurde Jalal Talabani, également membre du Conseil, qui cite l’exemple de l’Allemagne, du Canada, du Pakistan, de l’Australie et de la Suisse. Mais, selon l’ancien diplomate cité, les clivages sont par trop prononcés en Irak pour que ce pays ne risque pas la dislocation, s’il n’élabore pas rapidement une Constitution confortant son unité. Émile KHOURY
Passant au crible la nouvelle stratégie régionale des États-Unis, un ancien diplomate libanais assure qu’elle a été mise au point dès 1995, lors du quatrième congrès annuel des décideurs consacré aux relations américaines avec le Moyen-Orient. Devant cette conférence majeure, le commandant en chef de la région centrale (Centcom, dirigé aujourd’hui par le Libanais...