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Actualités - OPINION

Sur le port du foulard islamique

par Carlos EDDÉ « Amid » du BN L’affaire du port du foulard islamique dans les écoles françaises est au cœur d’un débat d’idées qui dure depuis au moins un quart de siècle. La décision du président Jacques Chirac de faire adopter une loi interdisant le port du voile a relancé ce débat, qui interpelle chacun, puisqu’il pose plusieurs questions fondamentales concernant l’obéissance à la loi – même si elle est jugée par certains comme liberticide –, les frontières entre la liberté individuelle et le respect de la loi, voire les limites d’expression du religieux au sein de l’espace laïc. Un débat éminemment politique donc, sur lequel, d’une manière ou d’une autre, chacun est amené à se prononcer, directement ou indirectement, sur le plan théorique ou au plan pratique. À un ami français qui lui reprochait tout récemment dans une lettre de ne pas avoir condamné la manifestation organisée par le Hezbollah devant l’ambassade de France pour protester contre la décision de Jacques Chirac, le Amid du Bloc national Carlos Eddé a tenu à répondre. Nous reproduisons ci-après sa réponse, qu’il a voulu publier sous la forme d’une lettre ouverte. « Cher ami, Je comprends ta réaction car mes convictions personnelles relèguent la religion à une place très secondaire dans la politique et les affaires de l’État. Pour moi la croyance est une question très personnelle de foi et de conscience qu’il est inutile d’afficher de façon ostentatoire. Mais ces mêmes convictions politiques et personnelles m’enseignent aussi que tout le monde n’est pas obligé de partager mes opinions et points de vue et que les personnes ont le droit de manifester pour exprimer leur désaccord, à condition que ce soit sans violence et dans le respect de l’ordre et de la liberté des autres, respect qui constitue à mes yeux la frontière et le corollaire indispensables de ce droit à la libre expression. Et puis qui va établir dans quelles circonstances et pour quelles causes on peut manifester ? Quels autorité ou pouvoir peuvent-ils s’arroger de telles prérogatives sans risque de les voir un jour verser dans la subjectivité et l’abus ? Puis-je défendre le droit des jeunes libanais à manifester pour la souveraineté du Liban et contre la présence et l’ingérence syriennes dans nos affaires et censurer ces collégiennes mineures de protester dans l’ordre pour une cause qui ne me plaît pas ? Si elles sont mineures, ai-je le droit d’imposer à leurs parents ma propre façon d’élever mes enfants, alors que je n’admets pas l’ingérence de tiers dans l’éducation que ma femme et moi avons choisie pour les nôtres ? En admettant cela, ne serions-nous pas en train de mettre en échec l’une des principales valeurs républicaines qui consiste à protéger ce droit du citoyen à manifester publiquement ses opinions dans le respect de conditions objectives fixées d’avance et émanant de cette volonté populaire que représente la loi ? Valeur que la France a d’ailleurs grandement contribué à rendre universelle ? J’ai choisi, par exemple, d’enseigner à mes enfants à être honnêtes et respectueux des lois et d’autrui par conviction, alors que d’autres parents enseignent à leurs fils ces mêmes valeurs dans la peur du Jugement dernier. Dois-je les censurer ? Censure ? Voici un mot qui ne me plaît pas et contre lequel j’ai toujours protesté, aussi bien au Brésil qu’au Liban. Je ne comprends pas pourquoi le port du voile chez les musulmanes choque plus que la kippa, les favoris, les barbes et les habits des juifs orthodoxes. Pourquoi aucune de ces mesures n’a été prise alors contre ces signes extérieurs de l’appartenance religieuse, pratiqués depuis des décennies ? De même tu pourrais facilement trouver des gens qui refusent et soient choqués par la nudité sur les plages publiques en Europe, doit-on aussi les empêcher d’exprimer leur désapprobation ? La démocratie est un système imparfait qui impose à la minorité la volonté de la majorité. Mais jusqu’à preuve du contraire, c’est encore le meilleur système politique qui offre la possibilité de débattre de sujets polémiques, de trancher, et même de revoir certaines décisions tout en proposant des garanties minimales contre l’arbitraire. La France a le droit de faire passer les lois qu’elle veut selon ses traditions démocratiques et laïques. Plus que la décision, je respecte le système politique et les traditions démocratiques de ton pays. Mais à chaque vote de loi tu trouveras dans ta société des individus ou des groupes qui désapprouvent et qui manifestent leur désaccord. Je garde pour moi ce que je pense sur cette décision ou sur le port de signes extérieurs de religion, ou sur la nudité en public. Mais je ne peux que défendre le droit de manifester de façon pacifique, même si je n’approuve pas la cause. Je te remercie de m’avoir écrit car la lettre m’a poussé à organiser cette réflexion et à prendre la défense d’un principe qui m’est cher. »
par Carlos EDDÉ
« Amid » du BN


L’affaire du port du foulard islamique dans les écoles françaises est au cœur d’un débat d’idées qui dure depuis au moins un quart de siècle. La décision du président Jacques Chirac de faire adopter une loi interdisant le port du voile a relancé ce débat, qui interpelle chacun, puisqu’il pose plusieurs questions fondamentales...