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Actualités - CHRONOLOGIE

Santé - Lancement d’une campagne de sensibilisation sur la cinquième cause de mortalité dans le monde La BPCO, une maladie ignorée, commune et mortelle

La broncho-pneumopathie chronique obstructive (BPCO) est un nom barbare pour une maladie qui se banalise, et dont les symptômes ne sont pas assez spectaculaires pour alarmer les personnes atteintes, à 90 % des fumeurs. Cette maladie négligée, qui a tendance à progresser mondialement (alors que d’autres maladies chroniques régressent), fait depuis hier l’objet d’une campagne de sensibilisation et de prévention, entreprise par l’Association libanaise de pneumologie et le Comité national de BPCO, en collaboration avec le ministère de la Santé et l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Il ne faut pas prendre la BPCO à la légère : dans le monde, elle touche en moyenne de 4 à 9 % de la population adulte et, malgré le manque de chiffres au Liban, les spécialistes estiment qu’elle existe dans la même proportion chez nous. Quelque 600 millions de personnes en sont atteintes, et cette sournoise maladie est devenue en quelques années la cinquième cause de mortalité dans le monde. Si les dégâts qu’elle cause ne sont pas tout à fait réversibles, le taux de mortalité régresse en cas de meilleure prise en charge, estiment les spécialistes. Selon les estimations de l’OMS, il est néanmoins probable qu’en 2020, une personne décédera de BPCO dans le monde toutes les huit secondes. Cette maladie atteint surtout les hommes et les femmes (davantage les premiers que les secondes) de plus de 40 ans. Le plus souvent, il s’agit d’une conséquence du tabagisme, le reste des cas résultant d’infections antérieures ayant endommagé les poumons, d’asthme vieilli, de pollution ou, plus rarement, d’anomalies génétiques. Les symptômes de la BPCO ne sont pas très différents de ceux de l’asthme, comme l’explique le Dr Judy Bahous, président du Comité national de BPCO. Toux, difficulté respiratoire au moindre effort, inflammations chroniques, sifflement, fatigue... les symptômes, bien tolérés au début, s’aggravent jusqu’à devenir handicapants, menant souvent à l’hospitalisation et parfois au décès. Contrairement à l’asthme, la BPCO, notamment à un stade avancé, est une maladie irréversible. Le mal est causé par une distension importante du tissu pulmonaire qui entraîne un ballonnement des bronchioles et des alvéoles, allant jusqu’à exercer une pression sur les poumons et entraver la respiration. Il s’ensuit une sécrétion importante de mucus qui provoque une toux constante, ce qui empêche les poumons de se remplir complètement d’air et de se vider. Il existe des médicaments permettant de soulager un patient atteint de BPCO, mais le traitement revient cher. Le Dr Bahous l’estime à quelque 200 dollars par mois, sans compter les risques d’hospitalisation. Les difficultés respiratoires sont détectées grâce à un appareil appelé spiromètre : la campagne prévoit d’en faire circuler un dans les régions, gratuitement, ce qui permettra une meilleure évaluation de la fréquence des cas de BPCO au Liban. Par ailleurs, les fumeurs sont la catégorie la plus touchée, mais beaucoup moins les fumeurs passifs, selon le médecin. La pollution en milieu industriel ou urbain peut également être tenue pour responsable de la multiplication des cas. Près de 3 millions de décès par an Une campagne pour lever le voile sur cette maladie aussi mystérieuse que récurrente a donc été lancée hier lors d’une conférence de presse donnée à l’hôtel Metropolitan Palace par les représentants de toutes les institutions concernées : Albert Tchoukhadar, représentant le ministre de la Santé Sleimane Frangié, Habib Latiri, directeur du bureau de l’OMS au Liban, Mahmoud Choucair, président de l’Ordre des médecins, Georges Khayat, président de l’Association libanaise de pneumologie, le Dr Bahous, président du Comité national de BPCO, le Dr Mohammed Boudissa, directeur général de la société pharmaceutique Boehringer Ingelheim qui finance la campagne, et Ibrahim Eid, de Publicis Graphics, qui a conçu la campagne médiatique. Bientôt, des posters et des brochures sur lesquels figure un visage de femme ayant des difficultés à respirer, enfermé dans un sac en nylon, seront présents partout. Un spot publicitaire où un homme d’un certain âge peine à monter un escalier, avec un fort bruit de respiration, passera à la télévision. Le slogan : « Vous pouvez être atteint sans le savoir. » Mais la campagne n’est pas que publicitaire : comme l’a précisé le Dr Bahous, elle consistera également en la mise en place d’un programme de formation continue destiné au corps médical, par le biais de conférences dans les régions organisées conjointement avec des ONG locales. Un spiromètre ambulant sera mis à la disposition des populations des différentes régions pour des tests gratuits. Des sessions de formation seront données à l’intention de la société civile dans les régions, par l’intermédiaire de conférences et d’activités diverses. Dans la même logique, des rencontres-débats sur les effets néfastes du tabagisme seront organisées dans les clubs et les universités. Enfin, une journée nationale de la BPCO devra être fixée dès l’année prochaine. Le tout sera conforté par des entrevues dans les médias. L’objectif de la campagne : réduire les décès, le coût d’hospitalisation et l’apparition de nouveaux cas. Citant les chiffres de l’OMS, le Dr Khayat a estimé que la BPCO serait responsable de 2,74 millions de décès par an. Il ajoute qu’elle est devenue plus commune que beaucoup de maladies chroniques comme l’asthme, l’ulcère, le cancer de poumons où les déficiences cardiaques. De 1965 à 1998, la proportion de BPCO a augmenté de... 163 %. Le Dr Khayat a insisté sur le fait que cette maladie est devenue une cause importante de handicap physique, empêchant les malades de poursuivre leur vie active et rendant extrêmement difficiles leurs moindres gestes quotidiens. M. Tchoukhadar a mis en évidence le coût financier exorbitant de cette maladie : 24 milliards de dollars, selon l’OMS, et des dépenses directement en relation avec les traitements de l’ordre de 14,7 milliards de dollars, ainsi que des conséquences indirectes qui se chiffrent à 9,2 milliards. Enfin, le Dr Choucair a mis l’accent sur la nécessité de prévention contre les différents facteurs d’émergence de la maladie, notamment le tabagisme et la pollution. Il a fait remarquer que la prévention médicale, environnementale et sociale était de loin moins coûteuse que le traitement après la déclaration de la maladie. Suzanne BAAKLINI Une raison supplémentaire pour combattre le tabagisme, selon l’OMS Un fait est sûr, la broncho-pneumopathie chronique obstructive (BPCO) atteint en priorité les fumeurs. Comme s’il fallait une raison supplémentaire pour dénoncer les ravages du tabagisme ! Bien que celui-ci n’ait été absent d’aucune intervention lors du lancement de la campagne de sensibilisation à la maladie, il figurait au centre du mot de Habib Latiri, directeur du bureau de l’OMS à Beyrouth. M. Latiri a rappelé que le tabagisme était la cause principale de l’apparition de la maladie, considérant que « des mesures de lutte contre ce fléau doivent être prises à une échelle mondiale ». Il a rappelé l’adoption de la convention cadre sur le contrôle du tabagisme et invité les gouvernements à la ratifier et à « augmenter les taxes sur la cigarette, créer des espaces non-fumeurs, interdire les publicités de tabac, inscrire clairement les méfaits du tabac sur les paquets ». Interrogé sur ce point par une personne présente, Albert Tchoukhadar, qui représentait le ministre de la Santé, a rappelé que « le ministre a tenté de faire adopter une loi en ce sens à plusieurs reprises, sans succès ». Il a ajouté que « la situation est extrêmement compliquée, vu les intérêts économiques en jeu ».
La broncho-pneumopathie chronique obstructive (BPCO) est un nom barbare pour une maladie qui se banalise, et dont les symptômes ne sont pas assez spectaculaires pour alarmer les personnes atteintes, à 90 % des fumeurs. Cette maladie négligée, qui a tendance à progresser mondialement (alors que d’autres maladies chroniques régressent), fait depuis hier l’objet d’une campagne...