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Actualités - CHRONOLOGIE

Controverse larvée sur l’intérêt US porté à la présidentielle libanaise

Est-il vrai que les États-Unis ne se préoccupent plus, comme dans le passé, de la présidentielle libanaise, et que peu leur chaut qui sera élu ? Les avis sur ce point sont partagés. Un ancien ministre des Affaires étrangères estime que les USA sont devenus indifférents pour la bonne raison qu’à leurs yeux, l’État libanais n’a cessé de perdre de son autonomie au profit de la Syrie. Qui intervient à tout propos aussi bien dans les affaires intérieures quotidiennes libanaises que sur des questions comme la défense, la sécurité ou la politique étrangère. Dès lors, le pouvoir libanais n’est pas en mesure, entre autres exemples, de négocier avec Israël sans l’aval de la Syrie ni, a fortiori, de signer un traité de paix à part. Il n’est pas capable de déployer son armée sur la ligne bleue faute d’un feu vert syrien. Ni, partant, de mettre un terme au rôle frontalier de la Résistance, du Hezbollah plus précisément. La communauté de sort avec la Syrie imprime sa marque sur toute décision cruciale. Dans le même cadre, le choix d’un président de la République se façonne à Damas et non à Beyrouth. Il en va de même pour la composition des gouvernements. Cette situation anormale dure depuis plus de vingt ans. Et dans ces conditions, on ne voit pas pourquoi les Américains s’intéresseraient à une autorité libanaise dépendante. Préférant s’adresser à Dieu plutôt qu’à ses saints, comme dit l’adage, les Américains pensent que sur la question libanaise, il faudrait traiter avec la Syrie. Toujours selon l’ancien ministre, Washington s’occupait jadis de la présidentielle libanaise parce que, à travers toutes les vicissitudes, l’État libanais gardait encore un certain rôle, une certaine présence autonome. D’autant que le système donnait alors au chef de l’État lui-même des prérogatives extrêmement étendues. Il incarnait le pouvoir exécutif, et les ministres n’étaient là que pour l’assister dans sa tâche. Il avait un pouvoir de décision qui n’était phagocyté par aucune tutelle. Les USA pouvaient alors choisir, et la puissance régionale concernée donnait son approbation. Ce fut le cas pour Fouad Chéhab, choisi par les Américains et approuvé par Abdel Nasser. Plus tard, aussi, pour Élias Sarkis, accepté par le président Hafez el-Assad. En 1988, il y avait eu accord syro-américain sur Mikhaïl Daher. Mais ce premier choix extérieur commun avait été récusé, à l’ombre de l’anarchie de la guerre, par une majorité maronite. Taëf a complètement modifié la donne. Désormais, le pouvoir exécutif est du ressort du Conseil des ministres, même au niveau du commandement effectif des forces armées, dont le président reste de nom le commandant suprême, selon l’article 49 de la Constitution. Dans ce contexte, les États étrangers sont tenus de traiter non plus avec le président de la République, mais avec le Conseil des ministres libanais. Bien entendu, la composition de ce collège, qui obéit à des critères d’équilibre confessionnel, politique ou régional, fait que la majorité y est toujours sensible à l’influence extérieure. Dès lors, ce serait une perte de temps pour les États-Unis de ne pas aller discuter directement avec le tuteur régional pour s’entendre éventuellement avec lui au sujet de l’élection présidentielle libanaise. Sur le point de savoir si, cette fois encore, la Syrie va choisir sous condition d’approbation US, l’ancien ministre répond que cela dépendra de l’état des relations entre ces deux puissances au moment fatidique. Au cas où il y aurait rapprochement et entente sur les exigences américaines adressées à la Syrie, Washington préférerait naturellement s’accorder avec Damas sur la présidentielle libanaise plutôt que de s’adresser à une partie locale placée visiblement sous tutelle. Il en irait ainsi tant qu’il n’y aurait pas eu un changement régional, comme la paix, modifiant les rapports de forces. Mais une autre personnalité écoutée, en l’occurrence un ministre influent, avance un point de vue différent. À l’en croire, les États-Unis sont en réalité plus préoccupés que jamais par la présidentielle libanaise. Car, en vertu de leur propre programme de remodelage de la région, ils sont concernés par tout ce qui s’y passe au niveau des systèmes politiques. De plus, souligne cette source gouvernementale, les Américains ont déjà fait comprendre qu’il n’est pas question pour eux d’accepter que la présidentielle libanaise soit une carte de négociations aux mains de la Syrie. Autrement dit, ils n’admettent pas de céder une partie de leurs exigences vis-à-vis de la Syrie moyennant un accord sur la présidence libanaise. Ce ministre ajoute qu’indépendamment de l’état de ses rapports avec Washington, Damas tient compte cette fois d’un critère fondamental : l’acceptation d’un nouveau président par la majorité du peuple libanais. Et, partant, par les USA eux-mêmes. Car autrement, la Syrie aurait du tracas à se faire sur divers plans politiques, sécuritaires ou économiques. Quant au droit de sélection, les États-Unis le concédaient volontiers par le passé à la Syrie parce qu’ils étaient en bons termes avec elle, d’une part. Et d’autre part, parce qu’ils n’étaient pas encore axés, comme aujourd’hui, sur le dossier des systèmes politiques dans la région. Des deux avis qui se confrontent sur la scène locale, ressort finalement une même interrogation : est-ce que les USA vont s’occuper de la présidentielle libanaise parce que leurs relations avec la Syrie sont tendues et s’en désintéresser si cela s’arrange sur ce plan ? Émile KHOURY
Est-il vrai que les États-Unis ne se préoccupent plus, comme dans le passé, de la présidentielle libanaise, et que peu leur chaut qui sera élu ? Les avis sur ce point sont partagés. Un ancien ministre des Affaires étrangères estime que les USA sont devenus indifférents pour la bonne raison qu’à leurs yeux, l’État libanais n’a cessé de perdre de son autonomie au profit...