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Crash de Cotonou - Le ministre des Transports a promis de poursuivre le dossier des indemnités Mikati : La responsabilité de la tragédie n’est pas libanaise(photo)

La conférence de presse, annoncée dès dimanche soir, du ministre des Travaux publics, M. Négib Mikati, était très attendue et les journalistes sont d’ailleurs venus nombreux pour y assister. C’est qu’au-delà du drame des familles, qui n’est pas près de se terminer, c’est l’enquête qui occupe désormais le devant de la scène et intéresse les citoyens désireux que toute la lumière soit faite sur la tragédie. Documents à l’appui, le ministre a ainsi retracé toute l’histoire de l’avion maudit, précisant que s’il y a une responsabilité dans cette affaire, et il y en a sûrement une, elle n’est pas libanaise, mais relève de l’État qui a enregistré l’avion.
Un crash de cette ampleur ne peut être le fait de la simple fatalité. Tout le Liban en est convaincu et veut connaître la vérité, une vérité que le ministre des Travaux publics a commencé hier à dévoiler. Sans vouloir devancer les résultats de l’enquête, M. Mikati a repris l’histoire dès le début.
En vertu d’un accord avec la Guinée (comme il y en a avec un grand nombre d’États), ce pays a le droit de demander au Liban d’accepter l’atterrissage des avions de sa propre compagnie nationale, et vice versa. La Guinée a donc choisi, dans une lettre officielle adressée au Liban, la compagnie UTA comme compagnie nationale. Le directeur de l’aviation civile guinéenne a adressé une note officielle en ce sens aux autorités libanaises le 7 avril 2003. Le Liban a répondu en demandant les documents qui autorisent l’UTA à faire de l’exploitation aérienne et ceux qui présentent les qualifications de l’avion qui devrait être utilisé.
Le 8 juillet, cinq experts de l’aviation civile libanaise examinent l’avion de l’UTA envoyé au Liban. Ils découvrent certaines failles dans ses équipements, notamment dans ses feux d’urgence et dans son dispositif anti-incendie périmé. Le Liban demande alors à l’UTA de ne pas transporter de passagers et de se contenter du transport de marchandises.

Un échange suivi et plein
de rebondissements
Le 14 juin, le directeur adjoint de l’aviation civile guinéenne a envoyé une note aux autorités libanaises, dans laquelle il les informait que l’UTA avait l’intention de ne plus utiliser dans sa liaison avec le Liban l’avion déjà examiné, mais un autre appareil, toujours un Boeing 727, enregistré au Swaziland.
Le 21 juillet, cet avion a effectué sa première liaison avec le Liban. Les experts ont fait leur travail et des failles sont apparues. Les autorités libanaises ont alors précisé aux autorités de Guinée (pays d’exploitation) et à celles du Swaziland (pays d’enregistrement de l’avion) qu’elles n’accepteraient pas l’atterrissage de l’avion tant que celui-ci ne serait pas conforme aux normes internationales de sécurité. Et s’il devait venir au Liban, il y resterait au sol, le temps de procéder aux réparations nécessaires.
Le 12 août, le directeur de l’aviation civile guinéenne a répondu aux autorités libanaises, en leur annonçant que les lacunes ont été réparées et que le directeur du département de la sécurité aérienne devrait se rendre très bientôt au Liban à bord de l’avion pour mettre au point les détails de la liaison Conakry-Beyrouth.
Le 15 août, le directeur général de l’UTA, le Libanais Darwiche el-Khazen, demande une autorisation d’atterrissage à Beyrouth pour l’avion de la compagnie, qui aura à son bord le directeur de la sécurité aérienne en Guinée.
Le 25 août, l’avion est arrivé à Beyrouth et son examen a permis de constater qu’il était désormais conforme aux normes de sécurité internationales.
Le 4 septembre, l’UTA a demandé l’autorisation d’établir une liaison régulière entre Conakry-Cotonou et Beyrouth. Le Liban a accepté tout en demandant un examen régulier de l’avion.
Le 7 septembre, l’avion a atterri à Beyrouth et il en est reparti le 10, après avoir subi l’examen d’usage.
Le 14 septembre, l’aviation civile libanaise a autorisé l’avion de l’UTA à effectuer une liaison hebdomadaire avec Beyrouth du 18 septembre au 25 octobre.
Le 20 septembre, l’avion a été examiné une nouvelle fois par les experts libanais et a poursuivi ses liaisons.

Une liaison de Conakry
à Dubaï
Le 2 octobre, l’UTA a demandé aux autorités libanaises l’autorisation de poursuivre la liaison jusqu’à Dubaï. Le Liban a refusé de se prononcer en attendant de connaître la position de l’émirat.
Le 24 octobre, l’UTA a informé le Liban que l’avion qui effectue la liaison entre Conakry, Cotonou et Beyrouth a été enregistré en Guinée.
Le 11 novembre, le Liban a donné son accord pour que le vol se poursuive jusqu’à Dubaï, après l’approbation des autorités de l’émirat. Du 6 novembre au 28 mars 2004, l’avion pourra opérer la liaison hebdomadaire entre Conakry, Cotonou, Beyrouth et Dubaï.
Le directeur de l’aviation civile guinéenne est ensuite arrivé à Beyrouth en novembre pour officialiser le fait que l’avion de l’UTA relevait de la compagnie nationale de son pays et que la liaison qu’il effectue s’inscrit dans le cadre de l’accord entre le Liban et la Guinée.
Le Liban ne pouvait toutefois enregistrer l’avion sur ses registres, puisqu’il l’était déjà dans un autre pays et que ses propriétaires n’étaient pas libanais. L’UTA est donc une compagnie étrangère, qui loue son avion à une autre compagnie étrangère.
En relatant tous ces détails, le ministre des Transports a voulu montrer que le Liban n’était aucunement responsable de la compagnie et qu’il avait accompli son devoir en matière de vérification du respect des normes de sécurité internationale.

Une commission technique spéciale pour suivre le dossier
Il reste à déterminer les causes réelles de l’accident puisque, selon les affirmations du ministre, l’avion subissait un examen régulier de la part des experts libanais.
À ce sujet, M. Mikati a annoncé la formation d’une commission technique, regroupant le directeur de l’aviation civile, M. Hamdi Chok (président), et MM. Tony Hélou, responsable de la sécurité aérienne, Ziad Baba, directeur des opérations aériennes, Hatem Zebiane, directeur du département du contrôle des avions, et le représentant du Liban au sein de l’Organisation internationale de l’aviation civile, M. Sleimane Eid.
Cette commission sera chargée de rassembler les documents, de mener ses propres investigations avec toutes les parties concernées, de préparer un rapport sur le sujet et de proposer un mécanisme pour actionner la responsabilité internationale du crash. Elle doit aussi demander aux autorités du Bénin, de Guinée et de France de laisser le Liban participer à l’enquête et de demander au Conseil des ministres de charger une instance spéciale de préparer les dossiers juridiques des indemnités dues aux familles des disparus. M. Mikati a d’ailleurs souligné le fait que M. Hatem Zebiane s’est rendu hier soir à Cotonou pour commencer à participer aux investigations.
En réponse à une question, le ministre a précisé que les autorités libanaises poursuivront jusqu’au bout le dossier des droits aux indemnités. Il a ajouté que le Liban n’aurait pas accepté de toute façon l’enregistrement d’un avion ayant 40 ans d’âge, alors qu’il essaie de rénover sa propre flotte aérienne. Mais conformément à la convention de Chicago, dont il est signataire, il ne peut refuser le certificat d’aptitude à voler délivré par un autre pays, ayant lui-même adhéré à la convention.
Le ministre a aussi nié avoir subi la moindre pression politique pour enregistrer l’avion à Beyrouth, mais il n’a pas évoqué le rôle du directeur de l’UTA, M. Darwiche el-Khazen.
Il a enfin évoqué la possibilité de surcharge de poids dans l’avion, surcharge qui aurait causé le crash, mais il n’a pas voulu être affirmatif attendant l’issue de l’enquête menée par le Bénin, la Guinée, la France... et le Liban.
La conférence de presse, annoncée dès dimanche soir, du ministre des Travaux publics, M. Négib Mikati, était très attendue et les journalistes sont d’ailleurs venus nombreux pour y assister. C’est qu’au-delà du drame des familles, qui n’est pas près de se terminer, c’est l’enquête qui occupe désormais le devant de la scène et intéresse les citoyens désireux que...