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Scandales - Accusé de détournement de fonds publics L’ancien ministre Ali Abdallah depuis hier au dépôt(photos)

C’était prévisible. Mais l’événement provoque quand même un petit choc. Car s’il n’est pas rare que les termes de ministre et de scandale soient associés, il est moins fréquent qu’ils débouchent sur une interpellation suivie d’une contrainte par corps. C’est-à-dire, dans le langage courant, d’une arrestation.
Dénoncé, par Élias Skaff, documents à l’appui, Ali Abdallah, qui représentait le mouvement Amal au sein du précédent gouvernement, en avait été radié. En même temps, du reste que ses collègues de l’Énergie et des Coopératives, Mohammed Abdel-Hamid Beydoun et Mahmoud Abou Hamdane. La troïka magnifique, comme les ont baptisés ironiquement leurs anciens camarades berryistes.
Abdallah, accusé de fantaisies enrichissantes dans la manipulation de millions de dollars provenant du programme de coopération agricole avec les États-Unis, a été entendu hier durant deux heures par le premier juge d’instruction de Beyrouth, Hatem Madi.
L’ancien ministre s’est rendu au Palais de justice accompagné de son avocat, Me Séoud Roufaïl, et escorté de ses partisans. Il a nié la plupart des charges avancées contre lui. Au sortir de l’audience, Abdallah a lancé aux journalistes massés dans la salle des pas perdus que l’atmosphère avait été bonne, que le magistrat instructeur l’avait traité courtoisement. Ajoutant qu’il avait toute confiance en l’intégrité de la justice. La réciproque, peut-on relever, reste évidemment à vérifier. Abdallah n’avait pas encore terminé sa phrase, qu’on lui signifiait que le juge venait d’émettre à son encontre un mandat d’arrêt. L’ancien ministre a eu un mouvement d’humeur. Il s’est cependant ressaisi, pour dire : « Ce n’est pas grave, ça va... » Ses partisans, pour leur part, n’ont pas manifesté bruyamment. Se contentant de ronchonner que « le Tout-Puissant sait tout... Les formes sont humiliantes... »
Pourtant, Abdallah n’a pas été menotté. Il a été de suite conduit par des gardes au dépôt du Palais de justice, sa résidence provisoire. Car l’ancien ministre de l’Agriculture ne sera pas, jusqu’à nouvel ordre, hébergé à Roumieh. La raison invoquée ? L’enquête bat son plein, on a besoin de l’entendre à tout moment et le déplacement ferait perdre du temps. Réagissant à l’annonce de l’arrestation, le procureur général Adnane Addoum a dit : « La justice se porte bien. La magistrature suit sa vocation et assume son devoir. »

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Pour sa part, l’avocat du prévenu, Séoud Roufaïl, a soutenu que l’arrestation est une injustice commise à l’encontre de son client. Se disant absolument convaincu de l’innocence de ce dernier, le juriste a indiqué que Abdallah avait répondu calmement à des interrogations qui avaient porté sur la totalité des éléments du dossier.
À ce propos, il se confirme que Abdallah s’est vu poser des questions sur le projet libano-américain d’importation de vaches. Et sur les imputations selon lesquelles il aurait fait capoter le programme, en entravant les réunions du comité ad hoc. Abdallah a répondu en présentant l’argumentation suivante : le plan en question a été élaboré sous le ministère du regretté Chawki Fakhoury, puis poursuivi sous celui de Sleimane Frangié. Toutes les traites (sans jeu de mots, s’agissant de vaches) n’avaient pas alors été réglées. Lorsque lui-même avait été désigné ministre de l’Agriculture, il y avait une équipe qui s’occupait de cette question de traites. À laquelle lui-même n’a pas touché (c’est encore le mot).
Il a affirmé ensuite qu’il avait relancé son collègue des Finances, Fouad Siniora, pour voir si on ne pouvait pas s’entendre avec un établissement banquier pour assurer le recouvrement des créances. Finalement, a-t-il dit, il a été convenu de ne pas traquer des bénéficiaires, des acheteurs de bétail, de ne pas les presser ou pressurer, pour prévenir toute grogne dirigée contre l’État. Car on ne devait pas oublier que, par définition même, de tels programmes sont prévus pour aider les gens, non pas pour leur causer des tracas.
Interrogé ensuite sur un recel d’abus de biens sociaux, entendre sur ses prodigalités aux frais de la princesse en dîners et en coûteuses communications téléphoniques, Abdallah a nié toute dépense somptuaire. Précisant qu’étant ministre, il ne planchait pas sur la gestion des crédits, que les choses lui arrivaient pour ainsi dire terminées et qu’il se contentait de signer. Il a affirmé au juge Madi que le déficit du budget agricole remontait aux gouvernements précédant celui auquel il avait appartenu. Ajoutant que les créances s’entassaient, s’accumulaient dans les tiroirs sans que personne (de ses prédécesseurs sans doute) n’y prêtât attention.
C’était prévisible. Mais l’événement provoque quand même un petit choc. Car s’il n’est pas rare que les termes de ministre et de scandale soient associés, il est moins fréquent qu’ils débouchent sur une interpellation suivie d’une contrainte par corps. C’est-à-dire, dans le langage courant, d’une arrestation.Dénoncé, par Élias Skaff, documents à l’appui,...