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Le bilan d’ensemble du pouvoir cabosse la dernière ligne droite du régime


Dans ses entretiens avec l’Ordre des journalistes, dirigé par Melhem Karam, le président Lahoud insiste : son seul souhait, c’est que l’année à venir soit productive. Mais, dans les dix petits mois qui lui restent, quelles réalisations le régime peut-il encore accomplir ? Avec le gouvernement du président Hariri, ou avec une autre équipe, comment espérer des prouesses mémorables ? Qui marqueraient les esprits autant que les points portés jusque-là à l’actif du régime. À savoir la stabilité sécuritaire, bouclier de l’économie ; dans ce même domaine, la protection du pays contre les diverses sortes de retombées du 11 septembre ; la libération de la majeure partie du territoire occupé par l’État hébreu ; la mise en exploitation des eaux du Wazzani malgré les menaces israéliennes.
Pour les derniers épisodes, c’est une évidence négative qui s’impose : les querelles avec le Sérail ont entravé ce redressement économique et financier, amorcé lors de Paris II, et qui est vital pour la population. Le pays traverse dès lors une zone des plus sombres. Les Libanais sont accablés, inquiets pour l’avenir et pour les générations montantes, obligées de s’expatrier. L’État de droit et des institutions reste lettre morte. Tout comme les points-clés du discours-programme d’investiture. Le changement promis ne s’est pas opéré. La justice n’a pas été immunisée contre les immixtions. L’Administration n’a pas été soumise à un contrôle adéquat, notamment comptable. Les dépenses n’ont pas été comprimées, aucune politique d’austérité n’étant vraiment appliquée.
Cependant, le chef de l’État n’a cessé de donner régulièrement des signaux positifs. C’est-à-dire de réaffirmer sa détermination à mettre en chantier les engagements du discours d’investiture pour l’émergence d’un État de droit et des institutions. Il continue à se mobiliser. Car il sait qu’un régime assume en définitive, en regard de l’histoire, ce qui s’est accompli sous son mandat, le bon comme le mauvais. Peu importe que les gouvernements successifs soient performants ou non. Car, pour l’opinion, c’est toujours le président de la République qui répond des résultats enregistrés. Ce pli, la présidence en paie le prix. Dans la mesure où le système ne lui confère plus les pouvoirs qui lui permettaient, jadis, de contrôler totalement l’Exécutif. Donc de larguer au besoin un gouvernement improductif ou déplaisant à ses yeux. Depuis Taëf, le pouvoir exécutif est détenu par le Conseil des ministres, collectivement responsable. Nul ne peut s’en laver les mains, parmi les dirigeants ou les ministres, sauf à démissionner ou à faire enregistrer ses réserves dans le procès-verbal de séance. Au sein de ce collège, le président de la République, qui dirige les débats, est tenu pour comptable autant que les membres du cabinet. Alors même qu’il est le seul à se trouver privé du droit de vote. Le seul aussi à être obligé de respecter des délais pour signer les décrets. Son seul moyen éventuel de désengagement consiste à demander au Conseil de revoir sa copie : au cas où la majorité persiste et signe, le chef de l’État ne peut pas être considéré comme coresponsable des décisions adoptées. Dans l’ensemble, comme dans le fond, il est objectivement injuste d’attribuer à la présidence de la République les faits ou méfaits de l’Exécutif. Mais c’est ainsi, car il existe des habitudes mentales dont l’opinion ne peut se défaire qu’au bout de longues décennies.
Le régime pourra-t-il, en dix mois, parachever son programme de départ dont la concrétisation est restée embryonnaire ? S’il n’y parvient pas, serait-il en droit de se défausser, historiquement parlant, sur les gouvernements dirigés par Hariri, parce qu’il était en conflit avec ce dernier ? En pratique, comme le pense un ministre de poids, le régime n’a qu’une seule voie à emprunter. À savoir, s’appuyer sur la Constitution comme sur les institutions pour tenter de faire passer les projets ou les plans, comme la réforme, qui lui tiennent à cœur. En misant sur cet avantage certain : Hariri ne contrôle plus la majorité au sein du Conseil des ministres. Ce responsable ajoute que, paradoxalement, le maintien du présent cabinet offre à la présidence de la République un autre avantage. Celui d’imputer au gouvernement la responsabilité d’un éventuel échec. Ce qui ne pourrait plus être le cas si l’on devait éjecter Hariri pour le remplacer par une personnalité convenant à Baabda.

Émile KHOURY
Dans ses entretiens avec l’Ordre des journalistes, dirigé par Melhem Karam, le président Lahoud insiste : son seul souhait, c’est que l’année à venir soit productive. Mais, dans les dix petits mois qui lui restent, quelles réalisations le régime peut-il encore accomplir ? Avec le gouvernement du président Hariri, ou avec une autre équipe, comment espérer des prouesses...