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RENCONTRE - De la percussion en musique arabe Quintette pour rythmes(PHOTO)

Le rythme, la sensualité, la mesure, la démesure, ce qui ponctue une partition ou une improvisation en musique arabe et lui donne son mouvement, sa pulsion et sa respiration ce sont eux! Eux ce sont les percussionnistes, les musiciens qui manient «tablé», «daf», «mazhr», «nakrazan», «tar», «katem». Désignations différentes pour des instruments appartenant à une même famille nombreuse, jubilatoire et jouissive, un peu fêtarde aussi.

Cinq «instrumentistes» qui font beaucoup de bruit et guère pour rien, indispensables au sein de l’Orchestre national oriental arabe et qui font les délices des mélomanes qui tirent une bouffée de narguilé ou écoutent sagement des mélopées qui se déchaînent en volutes saccadées ou font rêver sous leurs doigts experts et précis comme un métronome sans faille. Sonorités sourdes, drues, discrètes, effacées ou résolument marquantes, la musique arabe leur doit toute son orientalité ondoyante, et parfois sa torrentialité. Cinq musiciens, tous presque de sages pères de famille et qui ont en commun une même passion et appartenant à une même discipline, celles des percussionnistes chevronnés. Rencontre avec ces messieurs, quintette pour rythme oriental, qui ont leur langage musical et qu’on gagnerait à mieux connaître.
Élie Fakih, empoignant sa «tablé», faite autrefois d’argile et d’une peau de poisson mais aujourd’hui confectionnée de fonte et de plastique, parle avec plaisir du rythme et de ses exigences. Non pas de musique en famille mais séduction personnelle pour un instrument qu’il a appris à manipuler avec Setrag. Études sérieuses avec solfège et tutti quanti...Outre son travail d’enseignant, il a accompagné Sabah, Melhem Barakat et fait beaucoup d’émisions TV. Il taquine aussi le oud mais revient immanquablement vers la «tablé», repenti de ses infidélités et incartades passagères. «On croit que c’est facile de jouer de la“tablé”, mais en plus d’une bonne oreille et d’une lecture juste des notes , il faut de la rapidité et avoir surtout le rythme dans le sang!»
Ali al-Khatib, jeune home de trente-deux ans, regard brillant et originaire de Chebaa (oui, ces fermes qui font couler tant d’encre!). Lui est un ami du « daf », élément fondamental du « takht ». Pourquoi ce choix? «Parce que j’aime le “daf”». Simple non? Ali joue aussi du oud et du bouzouk, écrit de la musique et a un CD sur le marché: Jawab (réponse). Réponse à quoi? Il est plutôt évasif sur l’explication. Il est venu au «daf» parce qu’il juge que cet instrument n’a pas la place qu’il mérite, et à cause de son harmonie particulière. Un intérêt pour le «daf» l’a mené à créer une pédagogie pour cet instrument qu’il ne voudrait pour rien au monde voir négligé. Son palmarès d’accompagnement est remarquable par le chapelet de noms qu’il évoque: Feyrouz, Khalifé, Ziad Rahbani, Charbel Rouhana. De son père chanteur il a hérité l’art de composer. Il dit avec fierté aussi qu’il est apparenté à Nabil al-Khatib, de la troupe al-Mouwachahat. Pour ce garçon qui aimerait être soliste et dont les ambitions n’ont pas de limites (dit-il), la dernière pirouette est dans cette réflexion: «Le “daf” est comme un miroir, il vous donne selon que vous le traitez.»
Fayçal Hassan, frisant la soixantaine, a certainement de la graine musicienne dès la prime enfance, lui qui est familier au « tablé antaki » dite aussi arménienne. Trois de ses cinq enfants font de la musique et deux de ses fils sont respectivement violoniste et clarinettiste. Du bois, une peau plastifiée, une main battant la mesure et le monde chante ou pleure. Seul ou en groupe, la «tablé» est sa compagne indéfectible et il ne saurai se passer de cet instrument dont les sonorités l’ont subjugué depuis la prime enfance. De ses études au Conservatoire à son accompagnement de Feyrouz, Khalifé et Julia Boutros, en passant par ses sessions à l’Orchestre national, ce «tabliste» inconditionnel est toute dévotion à son «arménienne».
Le benjamin du quintette, Walid Nasser, vingt-cinq ans, marié et futur papa, joue du «mazhar» ou «katem» (appelé aux pays du Golf «tar» ou «nakrazan») fait de bois, de nylon tendu et de boulons en fer. Premier plaisir de la musique avec un père qui égrène du oud.
Et puis, c’est le cycle d’études de la «tablé» au «riq» en passant par tous les instruments de percussion. Il enseigne aujourd’hui le «daf» et il a donné la réplique à Feyrouz, Ziad et Mansour Rahbani tout en jouant avec le Philharmonique d’Arménie. «Le “daf”, dit-il, est la base des instruments de percussion. Sans lui il y a un vide. C’est un élément d’équilibre.» Farid Abou Said, trente-deux ans, le seul célibataire du peloton, enseigne la «tablé», tape du «daf» mais joue sur le «katem pander». À son actif, des accompagnements de Sabah et Walid Tewfic, mais il a aussi fait danser Ramira, Zahwa et Randala. Pour lui, le meilleur «tabliste» est l’égyptien «Said l’ artiste». Le secret de son art? «Poser la main et battre la mesure», dit-il en toute simplicité avec un sens mesuré de l’enthousiasme.
Edgar DAVIDIAN
Le rythme, la sensualité, la mesure, la démesure, ce qui ponctue une partition ou une improvisation en musique arabe et lui donne son mouvement, sa pulsion et sa respiration ce sont eux! Eux ce sont les percussionnistes, les musiciens qui manient «tablé», «daf», «mazhr», «nakrazan», «tar», «katem». Désignations différentes pour des instruments appartenant à une même...