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22 novembre L’indépendance, d’hier à aujourd’hui (photos)

Leurs pères ont tous joué un rôle dans le processus qui a débouché, le 22 novembre 1943, sur l’indépendance du Liban, dont nous célébrons le 60e anniversaire, ou le 60e souvenir, selon les perspectives : Béchara el-Khoury, Riad el-Solh, Camille Chamoun, Pierre Gemayel, l’émir Magid Arslane, Abdelhamid Karamé, Sabri Hamadé, Saëb Salam, Adel Osseirane et Hamid Frangié (nous n’avons pas pu joindre le ministre Talal Arslane et l’ancien Premier ministre Omar Karamé). La plupart d’entre eux ont assumé des fonctions dans la chose publique, certains ont même accédé aux plus hauts postes de l’État libanais. D’autres y sont encore, quand ils n’ont pas rejoint les rangs de l’opposition et milité pour un autre Liban, différent de l’actuel, et qui serait dans l’esprit du pacte national de 1943. À toutes ces personnalités, L’Orient-Le Jour a posé la même question : Que signifie pour vous l’indépendance, soixante ans après son avènement, où en est-elle, et qu’aurait dit votre père sur la situation actuelle s’il était encore vivant ?
Michel HAJJI GEORGIOU

Amine Pierre Gemayel
« Pour moi, l’indépendance est un défi de tous les jours. Elle n’est pas seulement une lutte pour préserver ou restaurer la souveraineté. Il faut la construire chaque jour. De toute manière, la souveraineté est une notion très relative à l’heure actuelle, et c’est pourquoi il faut la grignoter par petits morceaux. Il faut également renouveler la foi en l’indépendance, continuer à la construire avec la même détermination et la préserver. Si mon père était là, il aurait réagi de la même manière. Il était un battant, un lutteur. Il a mené des combats en 1943, 1968 et 1975. Pour lui, l’indépendance était un apprentissage de chaque jour, une lutte de chaque jour, une résistance quotidienne. »

Ali Sabri Hamadé
« L’indépendance est, pour moi, source de deuil et d’infamie. Le deuil est relatif au projet d’État né du pacte de 1943, même s’il n’était pas exemplaire. Ce pacte s’est transformé en bien moins qu’un projet de ferme. Et encore : au moins, les fermes ont des propriétaires. Le moins que l’on puisse dire, c’est que l’État n’applique pas la loi. Quant à l’infamie, nous en sommes tous responsables. Tous les Libanais sont responsables du fait que les choses en soient là. Des hommes d’État comme Sabri Hamadé nous manquent. Ils auraient su préserver ce pays avec sagesse. Ils auraient des sages qui ont fait taire leur égoïsme dans l’intérêt du pays. »

Samir Hamid Frangié

« L’indépendance ? Le Liban n’est pas souverain. Le peuple libanais n’est pas libre de choisir ses représentants et d’exercer sa souveraineté nationale. L’indépendance, dans le cas libanais, est la résultante de deux compromis : l’un est interne et l’autre externe. Le compromis interne existe potentiellement. Quant au compromis externe, il n’existe pas. L’opposition a proposé un compromis historique avec la Syrie. Non seulement cette dernière l’a refusé, mais elle empêche l’émergence du compromis qui existe réellement sur la scène interne. S’il était vivant, mon père serait entré dans une grande colère. »

Dory Camille Chamoun
« Soixante ans d’indépendance ? Ce n’est pas vrai. Cela fait une vingtaine d’années qu’on ne l’a plus. Nous sommes un pays qui, sur le papier, est censé être libre, mais, dans la réalité, il n’en est rien. Quand on voit comment la Syrie tire les ficelles du pouvoir... Toute décision importante est prise à Damas. Je ne vois vraiment pas comment on peut parler d’indépendance. J’ai souvent dit à ceux qui fleurissent chaque année les tombes des hommes de l’indépendance, lorsqu’ils me demandaient de les accompagner : “Je ne monte pas avec vous, mon père pourrait se lever de sa tombe et me donner une raclée” ».

Tammam Saëb Salam

« L’indépendance est une réalisation historique dans la marche du peuple libanais. Elle a fait l’unité et la force du Liban. Elle constitue toujours un exemple, soixante ans après. J’espère que le Liban continuera à exister, toutes confessions et communautés confondues, dans l’optique de cette indépendance. Je souhaite au Liban de poursuivre dans l’esprit du pacte et dans le développement, malgré les condition difficiles tant sur le plan interne qu’externe. Le Liban a été édifié sur les bases de tous les Libanais. Certains leaders ont joué un rôle particulier dans cette édification. C’est de ce type de leaders, comme Saëb bey, et de ce type de sacrifices que nous avons besoin aujourd’hui. C’est grâce à eux que l’on restaurera le cours normal des choses, pour construire l’État et renforcer la cohésion nationale pour immuniser davantage le Liban. »

Riad el-Assaad (petit-fils de Riad el-Solh)

« Si Riad el-Solh était encore vivant, il aurait versé une larme. Non par sur les 10 452 km2 ou sur le drapeau libanais, mais sur le fait que le Liban a perdu son rôle sur le plan de la liberté et de la dignité. Par ailleurs, il aurait été rassuré de savoir qu’on a beau essayer de détruire ce pays, il continue quand même à vivre. Riad el-Solh voulait un Liban fort, stable, souverain, indépendant et libre. Mais nous avons perdu la spécificité qui en faisait un pôle dans la région : le message de coexistence. Nous l’avons nous-mêmes saboté. L’indépendance, c’est la souveraineté de la nation et de l’individu. Or le citoyen et la nation disposent d’une souveraineté tronquée. Cela m’encourage à lutter davantage. L’indépendance à laquelle j’aspire, je l’aurai. »

Ali Adel Osseirane

« L’indépendance est un souvenir glorieux pour tous les Libanais. Nos pères ont consenti beaucoup de sacrifices pour l’obtenir, et cela déjà du temps de la domination ottomane. Ils se sont réunis à la fin de la guerre et ont imposé leur volonté à la France. Et, en s’unissant, ils ont uni leur nation. Mon père aurait dit aujourd’hui ce qu’il a toujours dit aux Libanais, et que je répète à mon tour : “Préservez l’unité nationale, préservez-vous les uns les autres. Le Liban est un message, et nous devons en connaître la valeur.” Je considère pour ma part que l’avenir sera florissant. Les Libanais ont de l’esprit, une pensée, un potentiel et des moyens. Ils ont de quoi faire du Liban un grand pays, malgré les obstacles et les circonstances, qui sont difficiles dans l’existence d’une nation, et que nous devons surmonter. »

Cheikh Michel Béchara
el-Khoury
« Je peux me féliciter que mon père soit mort, pour qu’il ne voit pas comment l’indépendance s’est évaporée. L’indépendance a disparu, et le vocable utilisé ne correspond plus du tout à la réalité. »
Leurs pères ont tous joué un rôle dans le processus qui a débouché, le 22 novembre 1943, sur l’indépendance du Liban, dont nous célébrons le 60e anniversaire, ou le 60e souvenir, selon les perspectives : Béchara el-Khoury, Riad el-Solh, Camille Chamoun, Pierre Gemayel, l’émir Magid Arslane, Abdelhamid Karamé, Sabri Hamadé, Saëb Salam, Adel Osseirane et Hamid Frangié...