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Environnement - Dénonciation du rôle désastreux joué par la classe politique « La gestion du dossier des déchets confiée à Ali Baba », dénonce Abdallah Zakhia

Le problème des déchets ménagers au Liban n’est pas d’ordre technique, comme partout au monde, mais d’ordre... politique. Et le fin mot de l’histoire, c’est que la confiance est absente entre les citoyens et les dirigeants, dont les intérêts personnels priment dans cette affaire sur l’intérêt public (ce ne sera pas la première fois...). Ce sont les sombres conclusions que tire Abdallah Zakhia, président du comité de l’environnement de l’Ordre des avocats de Beyrouth, militant écologique depuis de nombreuses années. « Si l’on ne retire pas le dossier des déchets ménagers des mains des hommes politiques, aucune solution ne pourra être adoptée », estime-t-il.
Pour lui, le découpage par caza, prôné mardi par la commission ministérielle chargée d’étudier le dossier, est un moindre mal « parce que si les déchets de deux grands mohafazats comme Beyrouth et le Mont-Liban allaient finir dans deux décharges, celles de Monsef et de Jieh, comme c’était prévu dans le plan initial présenté par le Conseil du développement et de la reconstruction (CDR), cela aurait créé un problème ingérable ». « Tout au plus, si l’on pense à installer une décharge d’une telle ampleur dans une région donnée, il faut l’accompagner de projets de développement qui profitent directement à la population, sinon on ne peut demander à celle-ci d’accepter son sort sans réagir », ajoute-t-il.
Toutefois, confier la gestion des déchets ménagers aux autorités locales des cazas n’en équivaut pas moins à un statu quo, selon Me Zakhia. « Rien ne changera vraiment », estime-t-il. Il pense que des sites servant déjà de dépotoirs pourraient être choisis pour accueillir des décharges. Pour ce qui est des usines de compostage, on pourrait difficilement en prévoir une dans chaque caza, le volume des déchets n’étant probablement pas assez important pour les faire fonctionner.
« Il ne s’agit de toute évidence pas d’une solution à long terme », poursuit-il, ajoutant qu’il n’était lui-même pas hostile à l’adoption d’un tel plan provisoire dans la situation actuelle. « Mais le grand problème reste celui du contrôle, dit-il. Il faudrait le confier à une institution indépendante mais qui soit reliée au secteur public. C’est son double statut qui sera la garantie de confiance, surtout si le contrôle est confié à des autorités locales. »
Ce militant infatigable reste cependant convaincu que l’État ne réussira pas plus ce nouveau plan de gestion de déchets que les précédents. Il soutient qu’« il y a des luttes entre différents pôles du pouvoir pour... l’obtention de contrats de gestion des déchets ». La possibilité de voir les prix grimper pour que ces messieurs fassent plus de bénéfices n’est pas non plus exclue. « Comment améliorer l’état de notre environnement quand la gestion de tels dossiers est confiée à Ali Baba ? dit-il non sans ironie. La situation est telle qu’il m’est arrivé de suggérer que les circonscriptions électorales soient équivalentes au découpage du territoire relatif au traitement des déchets ! Cela simplifierait les choses. »
Revenant sur les réactions virulentes des communautés visées par le plan initial de traitement des déchets, notamment à Monsef (Jbeil) et à Jieh (Chouf), Me Zakhia rappelle que « les responsables, si intéressés par ce dossier pour leurs affaires personnelles, ne donnent jamais le bon exemple ». Il lance l’idée que « les hommes politiques, qui possèdent personnellement des millions de mètres carrés de terrains, peuvent pour une fois prévoir une décharge chez eux afin d’apaiser les craintes ». « Mais quand, poursuit-il, on choisit toujours de prendre leurs terrains aux petits propriétaires qui n’ont pas d’influence, il est normal qu’ils réagissent négativement. Sans compter que les critères scientifiques ne sont jamais pris en compte. »
Empêcher les hommes politiques ou leurs proches d’avoir des parts dans des entreprises d’intérêt public, retirer le dossier « technique » des déchets de l’arène politique et rétablir la confiance du citoyen dans la capacité de l’État à résoudre les grands problèmes de la vie quotidienne, tels sont, selon Me Zakhia, les difficiles objectifs à atteindre avant qu’une solution durable et sérieuse ne soit envisagée. On peut toujours espérer... Malgré son scepticisme, il relève cependant un point positif dans l’effervescence causée actuellement par le débat sur le traitement des déchets : « La population se rend enfin compte que le paysage politique influe sur sa vie quotidienne. »

Suzanne BAAKLINI
Le problème des déchets ménagers au Liban n’est pas d’ordre technique, comme partout au monde, mais d’ordre... politique. Et le fin mot de l’histoire, c’est que la confiance est absente entre les citoyens et les dirigeants, dont les intérêts personnels priment dans cette affaire sur l’intérêt public (ce ne sera pas la première fois...). Ce sont les sombres...