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Parlement - Les députés divisés sur l’opportunité de signer les pétitions de mise en accusation de Siniora et Barsoumian Berry: « C’est moi qui dois être jugé »

Les membres de l’Assemblée nationale semblaient divisés hier quant à l’opportunité de signer les deux pétitions de mise en accusation, pour manquement grave aux devoirs de la fonction, du ministre des Finances Fouad Siniora, et de son ancien collègue du Pétrole Chahé Barsoumian.
Cette division a transparu dans les diverses réactions à l’initiative du chef du Parlement, Nabih Berry, qui avait déclenché la procédure pour montrer surtout que la Chambre ne craint pas d’assumer ses responsabilités, répondant ainsi indirectement à ses détracteurs. M. Berry dit aussi vouloir, à travers cette procédure, « renforcer le contrôle » de l’autorité législative sur l’action de l’Exécutif.
Aussi justifiable soit-elle sur le plan juridique, son initiative ne pouvait cependant qu’entraîner des réactions mitigées, voire susciter des réserves dans la mesure où elle se fonde sur des considérations d’ordre politique et parce qu’elle constitue une réaction à une série de rumeurs qui ont déplu à la présidence de la Chambre, consécutivement à la formation de la Haute Cour chargée de juger les présidents et les ministres.
D’emblée, trois députés de l’opposition, Mme Nayla Moawad et MM. Farès Souhaid et Pierre Gemayel ont annoncé hier qu’ils refusaient de s’associer à cette affaire.
Les propos tenus à ce sujet par Mme Moawad sont on ne peut plus éloquents et expriment un sentiment que de nombreux parlementaires partagent: « Je sens que je suis devenue un instrument aux mains d’inconnus qui veulent se venger de quelqu’un », a-t-elle déclaré dans une conférence de presse qu’elle a tenue place de l’Étoile.
Après avoir rappelé qu’elle avait été la première à dénoncer sous la coupole du Parlement la mafia et le vol du pétrole à l’époque où ce secteur était géré par le ministre Barsoumian, Mme Moawad a estimé que ce sont tous les dossiers liés à la corruption qui doivent être ouverts, et non seulement deux, « parce qu’il est primordial de punir ceux qui ont volé l’argent du peuple et qui ont contribué à aggraver la dette publique ». MM. Souhaid et Gemayel ont à leur tour affirmé qu’ils refusent de signer les deux pétitions en situant la procédure engagée dans le cadre des tiraillements entre les gens du pouvoir.
Les deux textes ont été mis à la disposition des parlementaires pour qu’ils les signent au secrétariat de la Chambre. Mais jusqu’à hier, seuls quatre députés avaient apposé leur signature au bas des deux documents qui relatent les faits reprochés à chacun des deux ministres. Il s’agit de MM. Élie Ferzli, Robert Ghanem,Yassine Jaber et Sélim Saadé. Ce dernier a agi sans en référer à son bloc parlementaire (PSNS) et s’est contenté de signer la pétition de mise en accusation de M. Barsoumian.
D’autres députés semblent vouloir suivre l’exemple de M. Saadé et mettre seulement en accusation l’ancien ministre du Pétrole, accusé de dilapidation de fonds publics. Mais rien n’est encore sûr.
Une effervescence particulière régnait dans les couloirs du Parlement où les tractations parlementaires allaient bon train. Les blocs parlementaires de MM. Rafic Hariri et Walid Joumblatt ainsi que du Hezbollah veulent d’abord tenir chacun une réunion avant de prendre une décision quelconque, sachant qu’ils seraient hostiles à une signature des pétitions.
De sources parlementaires, on juge difficile de réunir 26 signatures pour mettre en accusation les deux ministres, surtout M. Siniora, dans la mesure où il apparaît clair dans les procès-verbaux des réunions du gouvernement et du Parlement, en 1997, que le ministre des Finances était hostile au remboursement par l’État libanais d’une dette contractée à la fin des années 90 par la Fédération des municipalités du Metn auprès d’une société italienne pour la construction, à Bourj-Hammoud, d’une usine de compostage qui n’a jamais vu le jour. M. Berry n’a pas hésité d’ailleurs à soulever ce point devant les députés qu’il a reçus comme chaque mercredi au Parlement, après son entretien hebdomadaire avec le chef de l’État, le général Émile Lahoud, à Baabda.
Selon les mêmes sources, le président de l’Assemblée nationale aurait affirmé: « Si quelqu’un doit être jugé pour cette affaire, c’est bien moi. » Car dans le procès-verbal de la réunion parlementaire des 9 et 10 mai 1997, M. Berry avait expliqué à l’Assemblée qu’il avait été relancé par l’ambassadeur d’Italie Carlo Calio au sujet des sommes que la Fédération des municipalités du Metn devait à la société italienne Sace, et que cette dette constitue un obstacle à la conclusion de deux protocoles financiers avec Rome. « Je pense que nous devons aller de l’avant dans le règlement de ce dossier parce qu’il y va de l’intérêt du Liban », avait-il aussi dit, au moment où M. Siniora s’opposait au remboursement de cette dette à la place de la fédération.
Dans une déclaration à la LBCI, M. Mikhaël Daher, membre de la Haute Cour et président de la commission parlementaire de l’Administration et de la Justice, a également exclu la mise en accusation des deux ministres, à cause surtout des motivations de cette procédure. « Les députés peuvent bien se demander pourquoi ils doivent signer aujourd’hui deux pétitions pour une procédure qui aurait dû être normalement engagée il y a trois ans », a-t-il expliqué.
Il a surtout écarté la possibilité que la Chambre mette en accusation M. Siniora pour des faits qui lui ont été reprochés à l’époque où il n’était qu’un ministre des Finances par intérim, alors qu’elle lui a accordé sa confiance au moment où le portefeuille des Finances lui a été confié il y a deux ans. « Le Parlement ne peut pas se contredire », a estimé M. Daher, surtout après avoir été sérieusement ébranlé par l’affaire du code de procédure pénale qu’il a été contraint d’amender à deux reprise en moins de trois mois.
Dans le même temps, M. Berry assurait devant les députés que le Parlement « accomplit son devoir » dans cette affaire et mettra en application le mécanisme prévu par la loi régissant le fonctionnement de la Haute Cour, tout en relevant les « nombreuses failles dans ce texte », qui ne dit pas à titre d’exemple ce qui peut se passer en cas de blocage à un des niveaux de la procédure de mise en application.
Il a affirmé que les députés membres de la Haute Cour ne peuvent pas signer la pétitition car ils ne peuvent pas être en même temps arbitres et juges, dénonçant de nouveau les tentatives de jeter la balle dans le camp du Parlement.
Rappelons à ce propos que M. Berry avait mal pris l’initiative du parquet de la Cour de cassation de transmettre directement au Parlement – comme s’il voulait la placer devant ses responsabilités – les deux dossiers de MM. Siniora et Barsoumian, au lieu de les lui soumettre par le biais du ministère de la Justice. Il lui avait renvoyé les documents tout en engageant la procédure judiciaire afin de barrer la route aux rumeurs selon lesquelles le Parlement se dérobe à ses responsabilités.
Les membres de l’Assemblée nationale semblaient divisés hier quant à l’opportunité de signer les deux pétitions de mise en accusation, pour manquement grave aux devoirs de la fonction, du ministre des Finances Fouad Siniora, et de son ancien collègue du Pétrole Chahé Barsoumian.Cette division a transparu dans les diverses réactions à l’initiative du chef du Parlement,...