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Éclairage Le piège israélien pourrait servir la cause régionale du Hezbollah

Comment comprendre le dernier revirement opéré par le gouvernement israélien dans l’affaire de l’échange de prisonniers avec le Hezbollah ?
Alors que l’on s’attendait depuis quelques semaines à un dénouement heureux, après une série de manœuvres par l’une ou l’autre partie, Tel-Aviv décide, le plus simplement du monde, de « piéger » l’accord de principe portant sur la liste des prisonniers « libérables ». En excluant de la transaction Samir Kantar, « le symbole fort » de la résistance, Israël chercherait à effectuer ainsi une fuite en avant, dont la portée continue d’être mystérieuse pour beaucoup d’observateurs, qui craignent que, dans ce geste que certains qualifient de désespéré, Israël soit en train de tendre un nouveau guet-apens au Hezbollah.
Dans les milieux progressistes, on affirme que le refus d’Israël de livrer Samir Kantar, l’un des premiers résistants libanais se trouvant dans les prisons israéliennes, est en contradiction avec la volonté apparente de l’État hébreu de vouloir régler, une fois pour toutes, son contentieux avec le Hezbollah libanais. Vouloir retenir l’auteur de l’opération de Nahariya ne peut que perpétuer le conflit avec le parti intégriste, sachant que ce dernier allait certainement refuser la nouvelle condition rédhibitoire israélienne.
Pour certains analystes, Samir Kantar demeure une « figure symbole » dans la mesure où il incarne une résistance « plus que meurtrière » aux yeux de la société israélienne. Celle-ci n’a pas encore oublié le côté spectaculaire d’une attaque, baptisée à l’époque « opération Abdel-Nasser » constituant une réponse à la signature des accords de Camp David. Ainsi, affirment ces sources, le fait de maintenir en prison Samir Kantar est une manière pour le gouvernement israélien d’atténuer l’impact d’un échange que d’aucuns estiment inéquitable. En prévoyant la réaction du parti intégriste, Israël chercherait à lui faire assumer la responsabilité de l’échec de l’échange et à se disculper aux yeux de son opinion publique.
Pour le Hezbollah, les calculs sont autrement plus stratégiques. Car en acceptant de ne pas abandonner un détenu, qui après tout ne fait pas parti de ses rangs – Samir Kantar appartient au Front de libération de la Palestine – et qui de surcroît est druze, le parti intégriste cherche à gagner sur deux fronts. En se réconciliant avec une résistance non chiite, voire parfois laïque qui, dans les années 80, avait été écartée de la scène – parfois physiquement –, le parti apparaît sous son visage le plus « national ». Toutefois, et ne voulant plus ou ne pouvant plus se contenter d’une mission locale qui rétrécit comme une peau de chagrin, il cherche également à s’attribuer un rôle régional, en prenant la défense de la cause de « tous les prisonniers arabes », et à leur tête de celui qui a incarné le nationalisme arabe de l’époque. « Si le Hezbollah parvient à réussir cet échange à ses conditions, Nasrallah sera sans aucun doute acclamé en tant que héros national arabe ».
Jeanine JALKH
Comment comprendre le dernier revirement opéré par le gouvernement israélien dans l’affaire de l’échange de prisonniers avec le Hezbollah ? Alors que l’on s’attendait depuis quelques semaines à un dénouement heureux, après une série de manœuvres par l’une ou l’autre partie, Tel-Aviv décide, le plus simplement du monde, de « piéger » l’accord de principe...