Ghazi Aad et
Jeannette Khawand
À 13h, les étudiants de la base Kataëb, conduits par Sami Gemayel, ont effectué une marche de protestation parfaitement disciplinée entre l’école de La Sagesse et le trottoir qui fait face au palais Bustros, où les attendaient Ghazi Aad, Selmane Samaha, Mme Sonia Eid et la famille de Boutros Khawand. Les étudiants ont brandi un calicot portant les noms de 174 Libanais présumés détenus en Syrie, avec la mention : « Prisonniers de la liberté ». Ils ont également brandi des portraits de Boutros Khawand avec la mention : « Un résistant du Liban ». À L’Orient-Le Jour, M. Samaha lance, ironique : « C’est une honte. À l’heure où le Hezbollah négocie avec Israël par le biais de l’Allemagne pour la libération des détenus libanais, l’État libanais faillit à ses devoirs en matière de dialogue équilibré avec la Syrie. Peut-être qu’une médiation allemande entre le Liban et la Syrie pourrait s’avérer efficace pour la libération des prisonniers... ».
Prenant la parole, M. Aad a exprimé son ras-le-bol face à la politique de l’autruche pratiquée par l’État libanais concernant le dossier des détenus en Syrie : « Nous, ONG, parents et partisans, avons perdu patience. Nous avons été positifs jusqu’au bout avec l’État : nous avons remis aux responsables tous les documents, toutes les preuves et tous les témoignages dont nous disposons. Que personne ne nous critique si nous avons décidé de passer à l’action. Nous avons été positifs, et nous n’avons rien reçu en retour, pas même un rapport officiel. Le problème, c’est que nous parlons en termes juridiques, et que le pouvoir nous donne des réponses politiciennes. Les dirigeants sont plus royalistes que le roi et continuent à nier l’existence de prisonniers libanais en Syrie alors que les autorités syriennes ont elles-mêmes reconnu l’existence de Libanais dans leurs geôles. » « Ils ne comprennent pas qu’à partir du moment où ils affirment que ces personnes sont mortes, il incombe au parquet de réclamer leur rapatriement. Dans tous les cas, c’est la dernière fois que nous nous adressons aux autorités pour le règlement de cette question. Nous avons collaboré autant que possible. Désormais, que personne ne nous blâme pour ce que nous ferons », a souligné M. Aad. De son côté, l’épouse de Boutros Khawand, Mme Jeannette Khawand, a fait assumer à l’État la responsabilité de l’enlèvement de son mari. « Il est du devoir des autorités de découvrir son lieu de détention et de suivre cette affaire. L’État doit se soucier des citoyens et ne pas ignorer leur existence », a-t-elle affirmé, appelant les compagnons de Boutros Khawand à ne pas l’oublier. Elle a par ailleurs indiqué qu’elle a demandé audience au président de la République, le général Émile Lahoud, pour lui exposer le cas de son mari, mais que le palais présidentiel n’a donné à ce jour aucune suite à sa démarche. Pour sa part, Sonia Eid a rappelé que le dossier des détenus politiques relève du droit humanitaire et n’entre pas dans le cadre des revendications politiques. « Nous souhaitons que le ministre Obeid soit solidaire. Les détenus doivent être jugés en territoire libanais, pas en territoire syrien. Ils sont tous malades, et nous voulons qu’ils reviennent rapidement et en bonne santé, et non pas morts, à l’instar de Adel Ajoury », a-t-elle ajouté. Une sœur de détenu, Fatmé Abdallah, a ensuite pris la parole, accusant les services de renseignements syriens d’avoir enlevé et déporté son frère en 1981. Brandissant son portrait, elle s’est effondrée en sanglots avant de pouvoir terminer son intervention. À son tour, le cousin de Boutros Khawand, Najib Khawand, a tenté de s’exprimer, avant de s’interrompre, en pleurs. C’est à ce moment précis qu’une manifestante s’en prend avec virulence au ministre chargé du Développement administratif et chef du parti Kataëb, Karim Pakradouni. « Karim Pakradouni en fait trop. Il est plus syrien que les Syriens », indique-t-elle, sous les applaudissements des étudiants.
Sami Gemayel :
« Un seul peuple »
Le chef de la base Kataëb Sami Gemayel a affirmé : « Le message n’est pas adressé au seul ministère des Affaires étrangères. C’est l’ensemble du pouvoir qui est concerné. Un pouvoir qui traite les Libanais de manière inégale depuis près de 13 ans. Certains sont arrêtés et qualifiés de criminels, d’autres sont arrêtés, mais on en fait des héros. Nous ne comprenons plus la logique de l’État libanais. » Interdit d’entrée au palais Bustros, Ghazi Aad remet le mémorandum au fonctionnaire, en lui demandant de faire parvenir l’enveloppe au ministre Obeid. Le document appelle entre autres, non sans une pointe d’ironie, le ministère des Affaires étrangères à « profiter un peu des “relations fraternelles et particulières avec la Syrie sœur” pour régler cette question humanitaire et nationale par excellence ».
Michel HAJJI GEORGIOU
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