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La cohésion du pouvoir préoccupe les décideurs plus que le budget


On le sait, c’est grâce au diligent, au vigilant « téléphone de Anjar », que le projet de budget Siniora a été bouclé. Et bâclé. Car les questions des ministres, notamment au sujet de ces grands absents que sont les privatisations, les crédits de développement et les titrisations, sont restées sans réponse. Le ferme « conseil » prodigué par les décideurs était qu’il fallait en finir. Que six séances consécutives suffisaient et qu’à prolonger les débats, on risquait l’impasse, voire l’implosion de l’Exécutif. Des recommandations si pressantes qu’elles ont été dépêchées de nuit, à beaucoup de monde, après la séance de mardi qui s’était terminée en queue de poisson. Première exigence des tuteurs : ne pas attendre la semaine prochaine, comme Hariri et Samaha l’avaient annoncé. Deuxième obligation : ne pas clôturer la séance de mercredi sans avoir approuvé le projet de budget, amendé ou pas. Pour bien s’assurer de la bonne exécution de leur plan de marche, les maîtres du jeu se sont assuré le concours actif de plusieurs ministres. Qui ont été chargés de servir, le cas échéant, de force tampon entre les lahoudistes et les haririens, d’arrondir les angles, de prêcher la détente et la célérité. Bref de surveiller le jeu de près. Mais ces aimables auxiliaires bénévoles n’ont pas eu trop à se dépenser. Car tous les intéressés avaient capté le message téléphonique cinq sur cinq. Et personne n’a fait mine de vouloir empoisonner l’atmosphère par des attaques ou des critiques contre tel ou tel camp. Tout le personnel était soudain convaincu de l’urgente nécessité prioritaire de transmettre à la Chambre dans les meilleurs délais le projet de budget, quel qu’il soit. Oubliées d’un coup les revendications pour le chapitre de la réforme, les inquiétudes sur le sort des privatisations ou les accusations relatives aux 110 milliards du CDR comme aux nominations au sein de cet organisme. Oubliées aussi les résolutions, furieusement contradictoires, de promouvoir les prestations sociales, d’augmenter les crédits dits de chantier et de réduire la dette publique ainsi que le déficit du budget. Qui s’est joyeusement inscrit à 31 %. Ce qui signifie, puisqu’il s’agit d’un chiffre prévisionnel, qu’on devrait se retrouver avec à peu près le double à la fin de l’exercice comptable 2004. Tout comme l’année en cours semble devoir se terminer à quelque 50 %, ou plus, de déficit, alors que Siniora avait promis à la fin de l’année dernière moins de 27 %. Pour en revenir au CDR, il convient de signaler qu’un ministre a quand même tenté un baroud d’honneur. En développant des objections au sujet des projets de ce supraministère. Dont les cadres, invités à la séance, ont répondu que les projets en question ont tous été dûment approuvés par le Conseil des ministres. Au titre du plan de redressement du développement initié par l’Exécutif lui-même. Après quoi, l’on a prudemment refermé le dossier du CDR, le Conseil des ministres décidant, pour sauver les apparences, de lui consacrer ultérieurement une séance. Selon certains ministres, le CDR doit en tout cas repasser devant ses examinateurs puisqu’il a dernièrement mis au point un nouveau plan de redressement qui nécessite l’approbation des pouvoirs politiques. D’autant qu’il existe certains emprunts qui restent gelés, en attendant des affectations concrètes ; et qu’il faut solliciter d’autres emprunts pour le restant des projets envisagés. Ces ministres se posent d’ailleurs des questions sur tout cela. Car, affirment-ils, l’on a dépensé 135 millions de dollars pour des projets crédités de 350 millions de dollars ; et l’on n’a utilisé que 145 millions de dollars d’une ligne de crédit globale s’élevant à 850 millions de dollars pour des projets sous étude. En fait, comme Hariri le précise dans ses assises privées, il y a en tout quelque 2 milliards de dollars (empruntés, bien évidemment) qui n’ont pu être utilisés par les différents départements ministériels ou offices auxquels ils étaient destinés. Le président du Conseil accuse certaines parties, qu’il ne nomme pas, d’avoir entravé l’exploitation de ces fonds. Ajoutant qu’il y a lieu de craindre que les créanciers ne reprennent leurs billes, car il existe évidemment des délais pour utiliser des crédits prêtés à des fins de travaux. Toujours au sujet du CDR, un ministre propose la mise en place d’une commission ministérielle qui garderait en permanence le contact avec cet organisme pour en surveiller la bonne marche et vérifier qu’elle ne dévie pas de la ligne voulue par l’Exécutif. Cette solution permettrait d’éviter les malentendus et éviterait à chaque ministre l’obligation pénible de démarcher le CDR pour tout et pour rien. De même, ajoute l’intéressé, on dissiperait le climat de tension et de suspicion qui entoure les prestations du CDR. Mais la proposition de commission ministérielle sous-entend, sur le plan politique, qu’on parviendrait de la sorte à arracher le contrôle du CDR à Hariri, donc c’est l’un des plus puissants leviers d’influence.
Philippe ABI-AKL
On le sait, c’est grâce au diligent, au vigilant « téléphone de Anjar », que le projet de budget Siniora a été bouclé. Et bâclé. Car les questions des ministres, notamment au sujet de ces grands absents que sont les privatisations, les crédits de développement et les titrisations, sont restées sans réponse. Le ferme « conseil » prodigué par les décideurs était...