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Communautés - En Allemagne, le patriarche maronite se fait l’avocat de l’option pacifique au Proche-Orient Sfeir : Arafat et Sharon devraient se mettre d’accord pour vivre en paix

Berlin et Munich - De notre envoyé spécial Habib Chlouk
L’étape munichoise du périple européen du patriarche maronite, Mgr Nasrallah Sfeir, restera dans les esprits comme un moment d’histoire, celle qui a vu l’un des chefs de la chrétienté orientale se faire l’avocat passionné d’une paix au Proche-Orient fondée sur la coexistence de deux États, Israël et la Palestine.
Alors même que les perspectives d’une éclaircie s’éloignent pour longtemps, que l’heure est à la confrontation quasi totale, le patriarche a lancé, sans détour, un appel solennel au président palestinien, Yasser Arafat, et au Premier ministre israélien, Ariel Sharon, pour qu’ils se mettent d’accord afin de « vivre en paix ». Il a, d’autre part, critiqué l’édification d’une barrière par les Israéliens, la comparant, bien à propos, avec le « mur de la honte » de Berlin.
Arrivé dimanche en Allemagne, sixième étape de sa tournée entamée au début du mois, le cardinal Sfeir a pris l’avion hier matin pour Munich, la plus grande ville catholique du pays, où il a été aussitôt reçu par le vice-président du gouvernement du Land (région) de Bavière, Otto Wieshew. L’entretien, qui a duré 35 minutes, a porté sur la situation au Liban et au Proche-Orient.
Au cours de la conversation, M. Wieshew a indiqué avoir visité le Liban à la fin des années quatre-vingt, dans le cadre d’une mission d’assistance au profit d’œuvres sociales.
Mgr Sfeir s’est ensuite rendu au siège de l’archevêché de Munich, où l’attendait le prélat de la ville, le cardinal Friedrich Wetter. Après un entretien de trente minutes, Mgr Sfeir a tenu une conférence de presse commune avec le cardinal Wetter.
Ce dernier a d’abord présenté le patriarche à la presse, évoquant les différentes étapes de sa vie de prélat et révélant que Mgr Sfeir était l’aîné de trois jours du pape Jean-Paul II.
« Le pays du patriarche Sfeir a été secoué par des troubles dans le passé. À présent, il commence à renaître », a déclaré Mgr Wetter, avant d’ajouter toutefois : « À l’heure actuelle, il n’y a pas de guerre au Liban, mais il n’y a pas de paix non plus. »

Éviter les généralisations
Interrogé à son tour sur les développements survenus hier au Liban-Sud, le patriarche maronite a répondu sur un plan beaucoup plus général : « Le conflit israélo-palestinien dure depuis plus de cinquante ans et ses effets se font ressentir sur toute la région de plus en plus fort. »
« La vie est un enfer autant pour les Palestiniens que pour les Israéliens. Ces derniers attaquent les Palestiniens avec des avions, ils détruisent leurs maisons et jettent des habitants dans les rues. Quant aux Palestiniens, ils ripostent par des explosions et des voitures piégées », a-t-il noté.
« À nos yeux, il n’y a de solution à ce problème qu’en donnant à chacun des deux peuples un État à l’intérieur duquel il pourra vivre dans la sécurité et en paix », a-t-il souligné.
« Quant au mur (érigé par Israël), il ne saurait donner la paix. Celui de Berlin, qui a été démoli, en est l’exemple », a-t-il dit.
À un journaliste qui lui demandait quel conseil il donnerait à Yasser Arafat et Ariel Sharon s’ils étaient devant lui, le patriarche a déclaré : « Je leur dirai qu’ils devraient se mettre d’accord afin que chacun des deux peuples puisse vivre en paix dans son État et aussi qu’aucun des deux peuples ne parviendra, par les tueries, à annihiler l’autre. »
Au sujet du Liban, Mgr Sfeir a rappelé que les chrétiens sont présents dans ce pays « depuis l’aube du christianisme et celle de l’islam ». « Il est vrai que nous avons connu des périodes de guerre et d’oppression, nul ne peut le nier, mais les jours de paix entre chrétiens et musulmans ont été bien plus nombreux que les jours de guerre », a-t-il noté.
La perspective « d’une absence du témoignage chrétien dans la région où le Christ et né, a vécu et est mort est un signe de grande inquiétude, mais il y a beaucoup de musulmans qui pensent que la vie serait sans saveur si les chrétiens venaient à quitter le Liban », a-t-il dit.
Il a réaffirmé que les accords de Taëf ont mis fin à la guerre dans ce pays « mais n’ont pas pour autant réglé tous les problèmes », prenant comme exemple les jeunes diplômés des universités qui s’en vont à l’étranger, « soit parce qu’ils ne trouvent pas de travail, soit parce qu’ils ne sont pas en harmonie avec le climat politique ambiant ».
En réponse à une question sur le terrorisme et son identification à l’islam, Mgr Wetter a pour sa part estimé que « la distinction doit être faite ». « Il est vrai que la plupart des auteurs des attentats du 11 septembre (2001) sont des musulmans, mais cela n’empêche pas les musulmans d’être en majorité des amoureux de la paix. C’est d’ailleurs ce qui s’est passé en Allemagne au temps des nazis. Les Allemands sont un peuple qui aiment la paix, mais il y avait une minorité nazie qui allait dans un sens contraire. En conséquence, évitons les généralisations », a-t-il souligné.


« Qui vous savez »
Dimanche soir, Mgr Sfeir avait célébré, selon le rite maronite, une messe à la cathédrale de Berlin, en présence de l’archevêque de la ville, le cardinal Georg Sterjinski, et de plusieurs membres de la colonie libanaise de toutes les confessions, y compris une délégation du Hezbollah.
Dans son homélie, le patriarche s’est dit « heureux et fier de visiter pour la première fois la capitale de l’Allemagne réunifiée et de célébrer la messe maronite dans sa belle cathédrale ».
Il a à cette occasion remercié l’Église et le peuple d’Allemagne pour l’aide qu’ils ont fournie au Liban, notamment durant les années de guerre, et appelé les Libanais résidant dans ce pays à retourner dans leur mère patrie « dès que les circonstances le permettront ».
Dans la soirée, Mgr Sfeir était l’hôte d’une réception offerte dans un hôtel de la ville par une association libanaise de Berlin, le Rassemblement maronite chrétien, en présence de Mgr Sterjinski.
Après plusieurs allocations de bienvenue, le patriarche a pris la parole, établissant une comparaison entre la destruction de Berlin et celle de Beyrouth. Revenant à une actualité intéressant les Libanais, il a ajouté : « Je vous rappelle que les militaires américains étaient omniprésents dans ce pays et avaient tenté de s’ingérer dans ses affaires intérieures. Mais des Allemands sont allés leur dire : vous êtes les bienvenus ici, car vous êtes chez vous. Mais faites attention à ne pas intervenir dans nos affaires intérieures et, ainsi, nous resterons de bons amis. »
« Je dis cela sans commentaire. D’ailleurs nous (Libanais) voulons être les amis de tout le monde, surtout de ceux qui nous sont les plus proches, c’est-à-dire qui vous savez », a-t-il poursuivi, dans une claire allusion à la Syrie.
Mgr Sfeir doit encore regagner Berlin ce matin pour y rencontrer le président allemand, Johannes Lau. Demain mercredi, il est attendu à Londres, dernière étape de son périple.
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