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Exigence et avertissement syriens ou initiative personnelle pour hâter le dossier des prisonniers ? La réaction du Hezbollah pourrait faire furieusement l’affaire de Washington

8 août 2003 : c’est la date de la dernière attaque menée par le Hezbollah contre des positions israéliennes présentes dans le secteur des fermes de Chebaa, ce lapin tiré ex abrupto du chapeau d’Assad pour décréter que l’occupation israélienne du Liban-Sud n’est pas terminée, ni avec elle le travail de la branche armée du Hezb, et que les volets libanais et syrien resteront (ad vitam aeternam) concomitants. Cela faisait donc plus de deux mois et demi que le parti de Hassan Nasrallah évitait de provoquer inutilement le gouvernement Sharon. Qu’est-ce qui a bien pu le pousser, hier, à rompre cettre trêve de facto dont le Liban avait – et continue d’avoir – grandement besoin ? D’autant que c’est la première fois qu’il annonce avoir bombardé la partie occupée du village (libanais) de Abbassiyé, depuis le déclenchement de ses attaques, en octobre 2000.
La toile de fond, le contexte et le timing sont cette fois-là prépondérants.
Le 5 octobre dernier, l’aviation israélienne avait touché de plein fouet – une première depuis près de trente ans – une localité située à 16 kilomètres de la capitale syrienne. Sans compter l’imperméable surdité de Washington à la suite de ce raid, ainsi que la conviction de Bush fils qui, après avoir donné toute latitude aux congressmen de voter le Syria Accountablity Act, avait affirmé que cette attaque s’inscrivait dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. Sachant également qu’il y a quelques jours, l’incontournable Farouk el-Chareh avait menacé Israël de représailles contre des colonies juives du plateau du Golan syrien annexé au cas où l’État hébreu lancerait une nouvelle attaque contre son pays.
D’autre part, le 22 octobre dernier, le chef de la diplomatie israélienne, Sylvan Shalom, exprimait de Berlin son espoir de voir prochainement réussir la médiation menée par l’Allemagne pour l’échange de prisonniers entre l’État hébreu et le Hezbollah. « J’espère que nous allons bientôt être au plus près d’un accord », avait-il dit, reconnaissant néanmoins avoir « toujours quelques problèmes à surmonter ». Et avant-hier dimanche, c’était au tour du chef du bloc parlementaire du parti intégriste de brandir la menace d’une nouvelle escalade si les pourparlers n’aboutissaient pas. « Nos prisonniers rentreront dans leurs foyers soit par la négociation, dont nous attendons le dénouement, soit par un autre moyen, qui est fin prêt à être utilisé au moment opportun », avait asséné Mohammed Raad.
De deux chose l’une - ou les deux. D’une part, Damas aurait très bien pu, avec le soutien docile de Beyrouth et la neutralité bienveillante de Téhéran, demander au Hezbollah – ou exiger de lui, tout naturellement – de lancer un avertissement à Tel-Aviv. Et au-delà, à Washington. D’autre part, Hassan Nasrallah (qui semble jouer sa dernière carte régionale avec l’affaire de l’échange des prisonniers), voyant que la procédure traînait lamentablement, de par la multiplication quasi quotidienne des obstacles, a peut-être pu décider de s’émanciper d’une tutelle (syrienne) devenue trop pesante. Et de prendre l’initiative de hâter d’une façon ou d’une autre les choses, de lancer, en bombardant les fermes de Chebaa, un message, sans avoir préalablement consulté Damas, trop occupé à tenter de régler ses propres problèmes.
Rares sont ceux qui, au Liban, continuent de s’époumoner en vain pour demander l’indispensable et l’urgent rétablissement de la légitimité de l’État, par le déploiement de l’armée nationale et le désarmement du Hezb, dans la partie méridionale du pays. De demander que le Liban soit au moins en accord avec la légalité internationale, à défaut d’être conséquent avec lui-même. Raison a donc été faite : la branche armée du parti intégriste continuera de jouer l’épouvantail au Sud, face à l’ex-armée d’occupation. Soit.
Il n’empêche, dans un cas comme dans l’autre (une exigence syrienne ou une décision personnelle), le Hezbollah donne la très trouble impression, en prenant les devants et en attaquant l’armée israélienne, de faire furieusement et dangereusement le jeu de Washington. Qui serait tout à fait capable de ne pas voir d’un mauvais œil, dans le contexte actuel, une translation de son bourbier entre Tigre et Euphrate du côté du Litani. Ou du Barada.

Ziyad MAKHOUL
8 août 2003 : c’est la date de la dernière attaque menée par le Hezbollah contre des positions israéliennes présentes dans le secteur des fermes de Chebaa, ce lapin tiré ex abrupto du chapeau d’Assad pour décréter que l’occupation israélienne du Liban-Sud n’est pas terminée, ni avec elle le travail de la branche armée du Hezb, et que les volets libanais et syrien...