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SOCIAL - Grève générale et manifestation demain La CGTL, un témoin gênant devenu un instrument de l’État

Demain, la Confédération générale des travailleurs du Liban (CGTL) observe une grève générale qui sera accompagnée d’une manifestation. C’est la première fois depuis une dizaine d’années que la centrale syndicale invite à un mouvement de revendication d’une telle envergure. Puissante durant les années soixante-dix, unifiée malgré les barricades et la guerre, la CGTL a beaucoup perdu de son importance peu après la fin des événements. Elle a été divisée à deux reprises durant les années quatre-vingt-dix, pour être complètement neutralisée ensuite.
Officiellement, ce sont les élections d’avril 1997 qui ont marqué l’éclatement de la CGTL, quand les syndicalistes se sont divisés pour élire, le jour même et au même siège, deux présidents – Ghanem Zoghby et Élias Abou Rizk – à la tête de la centrale syndicale.
Mais l’histoire n’est pas aussi simple. À en croire d’anciens syndicalistes ou à lire les coupures de presse de l’époque, on apprend que c’est la classe politique mise en place après les accords de Taëf qui a eu raison de la CGTL.
Les faits : au début des années quatre-vingt-dix, les ministres du Travail qui se sont succédé sous le mandat Hraoui appartenaient à la même mouvance politique : Abdallah el-Amine (Baas prosyrien) et Assaad Hardane (PSNS). À cela s’ajoute le renforcement par le mouvement Amal de son influence à tous les échelons du pouvoir. Enfin, le Premier ministre Rafic Hariri, qui voulait initier une reconstruction tous azimuts, n’avait visiblement aucun intérêt à se retrouver face à une CGTL superpuissante.
Tout concordait donc pour neutraliser et museler un mouvement syndical gênant, faisant le poids sur le terrain.
Dès 1993, les tiraillements politiques commencent au sein de la CGTL. Élias Abou Rizk, connu pour son entêtement, voulant faire face à l’establishment mis en place, se présente, à deux reprises, aux législatives du Liban-Sud (1996 et 2000), face au ministre du Travail Assaad Hardane et aussi à une liste soutenue par le pouvoir regroupant toutes les forces présentes de la zone méridionale du pays (rouleau compresseur Amal-Hezbollah). Il le paiera cher : il est évincé à deux reprises de la présidence de la centrale syndicale. Il sera arrêté et relâché et l’affaire traîne jusqu’à présent dans les tribunaux.
Sous le poids du nouveau fait accompli apparu sur la scène politique, quatorze nouvelles fédérations, autorisées par le ministère du Travail, sont venues se greffer sur la CGTL. C’est l’époque, disent certains, de la prolifération des syndicats, ayant une même couleur politique et représentant notamment des ouvriers du Liban-Sud et de la Békaa. Ces fédérations rejoignent le bureau exécutif de la CGTL, modifiant sa structure et neutralisant par le fait même le mouvement syndical.
En 1997, à l’expiration du mandat d’Abou Rizk, la centrale syndicale se retrouve divisée. Deux élections se tiennent simultanément à son siège de la rue Badaro. Le ministère du Travail reconnaît le choix du clan qui regroupe entre autres les nouvelles fédérations. Abou Rizk reviendra encore une fois, en 1998, à la tête d’une CGTL affaiblie, neutralisée et muselée.
Le mouvement syndical, qui était un témoin gênant, ne fait plus le poids.

Patricia KHODER
Demain, la Confédération générale des travailleurs du Liban (CGTL) observe une grève générale qui sera accompagnée d’une manifestation. C’est la première fois depuis une dizaine d’années que la centrale syndicale invite à un mouvement de revendication d’une telle envergure. Puissante durant les années soixante-dix, unifiée malgré les barricades et la guerre, la...