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PROFESSIONS LIBÉRALES - Quatorze millions de dollars de gaspillés, des cotisations impayées, une couverture médicale « mutilée »... Climat de fronde chez les médecins

Un climat de fronde règne au sein de l’Ordre des médecins. Depuis quelques mois, et après avoir en vain tenté de laver le linge sale en famille, un groupe de médecins largement représentatif, semble-t-il, a fini par décider de faire entendre sa voix. Non pas pour « attirer l’attention des médias, ni pour tenir un meeting électoral, encore moins pour des questions personnelles, mais pour « informer de la vérité l’ensemble du corps médical et l’opinion publique libanaise ».
Ils étaient huit à tirer la sonnette d’alarme hier, à l’Ordre de la presse, en présence des anciens présidents de l’Ordre des médecins Mounir Rahmé, Fouad Chémali et Fouad Boustany, ainsi que du président et du vice-président de l’Ordre de la presse, MM. Mohammed Baalbacki et Kamal Esber Ghorayeb. Pourquoi à l’Ordre de la presse ? « Parce qu’on nous a interdit de nous réunir à la Maison du médecin, qui est supposée être notre maison à tous et non pas l’apanage du conseil d’administration de l’Ordre », ont précisé les médecins dans leur communiqué.
Les Drs Assaad Rizk, Charbel Azar, Naji Gharios, Raëf Rida, Edmond Azzi, Afif Alouan, Antoine Daher et Jean el-Hajj ont mis en garde contre « le danger que constitue la mauvaise gestion des affaires de l’Ordre, notamment en ce qui concerne le laxisme au niveau de la réalisation des revendications syndicales et professionnelles des médecins, ce qui les a empêchés de participer d’une manière efficace aux travaux des conseils syndicaux et les a forcés à renoncer à exercer un contrôle et à demander des comptes ».
« Notre groupe est formé de médecins membres de l’ordre, qui, au lendemain d’une assemblée générale frisant la parodie, tenue le 16 mars dernier, ont intenté une action en justice pour faire invalider les décisions prises, a expliqué le Dr Raëf Rida. Nous nous sommes engagés à poursuivre notre action afin d’atteindre les buts suivants : améliorer les prestations syndicales, mettre fin aux ingérences politiques et aux tiraillements communautaires, demander des comptes concernant le dossier de la Maison du médecin, œuvrer à obtenir une couverture médicale totale pour les praticiens et leurs familles et une pension honorable. »
C’est que la Caisse nationale de Sécurité sociale (CNSS) ne couvre que les frais d’hospitalisation des médecins et de leur famille alors que ces derniers n’épargnent aucun effort énorme pour permettre à la CNSS de poursuivre son activité. « Nous ne quémanderons pas notre droit à une couverture médicale totale, ont indiqué les médecins dans leur communiqué. Nous sommes supposés en bénéficier à l’instar de nos collègues dans les pays développés, d’une manière qui correspond à nos cotisations. Car, pour ceux qui l’ignorent, la cotisation fixée par la CNSS aux médecins est de 50 % inférieure à celle pratiquée par les sociétés d’assurances accréditées par l’ordre. En contrepartie, le médecin n’a droit qu’à une couverture “mutilée”. » Et comme unique solution, le conseil de l’Ordre s’est retrouvé à quémander un droit qui aurait dû être acquis.

Où est passé l’argent ?
Les médecins ont également précisé dans leur communiqué, que malgré la situation économique actuelle, ils œuvreornt à augmenter la pension du praticien en adoptant une position ferme quant à l’application de la loi concernant les timbres. En effet, ces derniers doivent être apposés sur tous les rapports médicaux émis, ainsi que sur toutes les formalités administratives, ce qui permettra de verser la totalité des rentrées à la caisse de retraite. Or, jusqu’à ce jour, cette loi n’a pas été mise en application.
La stratégie pour augmenter la pension des médecins prévoit, par ailleurs, le prélèvement d’une partie des recettes des congrès et des expositions médicales en faveur de la caisse de retraite, de revoir à la baisse le budget de la Maison du médecin et de dresser un plan qui vise à tirer profit des services et des locaux de celle-ci.
Les conditions dans lesquelles ce bâtiment a été édifié constituent en fait le dossier le plus brûlant, d’autant que les médecins estiment que les travaux de construction ont donné lieu à des gaspillages. « La Maison du médecin nous a coûté dix-huit millions de dollars, mis à part le terrain qui est une propriété de l’ordre et qui a coûté à lui seul près de quatre millions de dollars, a indiqué le Dr Charbel Azar. Selon les estimations des architectes, ce bâtiment ne devrait pas coûter plus de quatre millions de dollars. Nous ignorons ce qu’il est advenu des quatorze millions restants. Nous exigeons qu’une enquête soit menée sur cette affaire. »
Ne pouvant accéder au dossier relatif à cette affaire malgré les démarches entreprises à titre personnel, une pétition signée par plus de mille médecins et un échange de correspondances par le truchement de notaires, les membres de l’ordre se sont trouvés contraints de s’adresser une fois de plus à la justice. « Un expert sera désigné par la Cour pour mener une enquête », a précisé le Dr Assaad Rizk.
Et les médecins de conclure dans leur communiqué : « Nous ne sommes pas des amateurs de guerre d’usure et aucun d’entre nous n’éprouve de la rancune contre l’un des membres du conseil actuel. Nous voulons dynamiser et développer les activités de l’ordre pour qu’elles répondent aux aspirations du corps médical. Nous nous promettons de contrôler l’ordre en notre qualité de membres qui cherchent à instaurer une activité syndicale libre, productive et utile au service du médecin, de la profession et du patient. »
Mais pourquoi aujourd’hui ? Pourquoi avoir voté le projet relatif à l’édification de la Maison du médecin ? Que se passera-t-il après la conférence de presse ? À toutes ces questions, le Dr Assaad Rizk répond : « Nous essayons de discuter de ces sujets depuis plus de six mois. Mais le dialogue étant devenu impossible, nous avons décidé d’avoir recours à la justice, qui tranchera. Notre action ne fait que commencer. À travers cette conférence de presse, nous essayons de sensibiliser le plus grand nombre de médecins pour qu’ils se rallient à notre cause et surtout pour qu’ils versent leur cotisation. Pour cela, nous commencerons dans les prochains jours à visiter les hôpitaux, où nous nous réunirons avec le corps médical pour lui exposer les problèmes que nous rencontrons. Nous ne baisserons pas les bras. »
Nada MERHI
Un climat de fronde règne au sein de l’Ordre des médecins. Depuis quelques mois, et après avoir en vain tenté de laver le linge sale en famille, un groupe de médecins largement représentatif, semble-t-il, a fini par décider de faire entendre sa voix. Non pas pour « attirer l’attention des médias, ni pour tenir un meeting électoral, encore moins pour des questions...