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MONNAIE - Conférence à l’Esa du professeur lyonnais Jean-François Goux L’euro n’est pas près de jouer le même rôle international que le dollar

L’euro est une monnaie internationale, mais dont le rôle est pour l’instant essentiellement régional, la monnaie unique européenne n’étant pas près d’égaler le dollar à court terme.
C’est la principale conclusion de Jean-François Goux, professeur à l’Université de Lyon II, spécialiste des questions de politiques économique et monétaire, qui a donné jeudi soir une conférence à l’École supérieure des affaires sur le rôle international de l’euro.
À un public nombreux, surtout inquiet de savoir quelle sera l’évolution de la parité entre l’euro et le dollar, la livre libanaise étant indexée au billet vert, M. Goux a répondu que l’euro vaudra probablement 1,25 dollar d’ici à la fin de l’année, « à moins d’un événement majeur qui changerait les anticipations des marchés ».
Car, pour le professeur lyonnais, qui a tracé une courbe reconstituant l’évolution depuis 1979 du taux de changes entre le dollar et l’euro ou son prédécesseur l’écu, un seul élément permet d’expliquer ces variations « les anticipations des marchés ». L’évolution du taux de change n’est pas le reflet de l’évolution des fondamentaux des économies sous-jacentes, dit-il, mais uniquement des anticipations des marchés qui sont « autoréalisantes ».
De fait, si les opérateurs pensent que le dollar va s’apprécier, ils achètent du billet vert, ce qui a pour effet d’augmenter sa valeur.
Ce processus est interrompu quand un événement provoque un changement des anticipations.
Le dollar s’est ainsi apprécié entre 1979 et 1985, puis il a chuté jusqu’en 1992-93, lors de la crise du serpent monétaire européen. Il est ensuite reparti à la hausse jusqu’en 2000.
« En 1999, l’introduction de la monnaie unique n’a pas cassé la tendance. La rupture de la courbe ascendante du dollar est survenue au moment de l’éclatement de la bulle spéculative sur les marchés financiers », explique Jean-François Goux. À ce moment, les investisseurs se sont détournés des marchés d’action, dont le « lieu privilégié » est Wall Street, pour se tourner vers les obligations émises aux États-Unis, mais surtout en Europe, d’où les achats massifs d’euros qui alimentent l’appréciation de la monnaie européenne depuis cette date.
Les marchés obligataires sont pratiquement le seul domaine où la place de l’euro est dominante. En revanche, pour les autres marchés financiers ou les transactions commerciales qui se font selon des habitudes très difficiles à changer, le dollar est le roi incontesté.
« La deuxième place de l’euro est confirmée, avant le yen dont le rôle est globalement déclinant, mais la monnaie européenne reste loin derrière le dollar », dit l’économiste.
Jean-François Goux a donné plusieurs indicateurs pour mieux apprécier la « deuxième place » de l’euro, en particulier sur les marchés financiers.
La monnaie européenne joue un rôle non négligeable sur les marchés de la dette, elle est aussi choisie comme monnaie de réserve par des banques centrales, notamment celle des États-Unis dont 50 % des réserves sont en euros, mais elle a encore beaucoup de chemin à faire pour s’imposer dans les transactions commerciales.
Si les pays d’Europe de l’Est, par exemple, libellent en euros en moyenne 60 % de leurs transactions, les pays de la zone euro eux-mêmes n’utilisent l’euro que pour 40 à 50 % de leurs transactions avec le reste du monde.
Cette proportion diminue au fur et à mesure que ces échanges concernent des pays géographiquement éloignés de la zone euro.
Tant que les principaux marchés de matières premières et d’énergies resteront libellés en dollars, l’euro aura du mal à devenir une monnaie internationale au même titre que le dollar, explique le professeur lyonnais. L’un des éléments qui pourraient amorcer le changement serait l’entrée éventuelle de la Grande-Bretagne dans la zone euro en raison du poids de la place financière de Londres. Mais cette évolution ne se fera certainement pas à court terme, estime-t-il.

Sibylle RIZK
L’euro est une monnaie internationale, mais dont le rôle est pour l’instant essentiellement régional, la monnaie unique européenne n’étant pas près d’égaler le dollar à court terme. C’est la principale conclusion de Jean-François Goux, professeur à l’Université de Lyon II, spécialiste des questions de politiques économique et monétaire, qui a donné jeudi soir...