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CONCERT - L’Orchestre symphonique national libanais à l’église de l’USJ Des fragrances russes aux nostalgies orientales (Photo)

Grand monde à l’église Saint-Joseph des pères jésuites, illuminée et encore étouffante de chaleur, pour le premier concert de la saison donné par l’Orchestre symphonique national libanais sous la houlette de Walid Gholmieh, plus dynamique et entreprenant que jamais. Au menu, concis et brillant, mêlant fragrances russes et subtiles nostalgies orientales, deux invités de marque: le pianiste virtuose italien Lorenzo Turchi et, révélation de l’événement, une œuvre du compositeur libanais Gabriel Saab. Pour les mélomanes libanais dont le nombre va croissant, pour cette rentrée donc, des pages de Borodine, Rachmaninoff et Gabriel Saab.
Ouverture d’une grande vivacité avec les Danses polovtsiennes (savamment orchestrées par Rimsky-Korsakov) tirées de l’opéra le Prince Igor d’Alexandre Borodine qui a su s’écarter de la médecine et de la chimie pour tomber, avec bonheur, dans l’alchimie des notes de musique. Brio, sens de l’épopée et pittoresque d’une narration courte mais intense, profondément russe dans ses timbres, son ampleur et ses couleurs chaudes et vibrantes.
En droite ligne de l’Italie, Lorenzo Turchi, né à Sienne et établi à Rome, devait prendre le relais pour interpréter l’ardu et brillant, néanmoins célèbre, concerto n° 2 pour piano et orchestre de Sergueï Vassilievitch Rachmaninov. Pour cet illustre musicien, qui considérait la « musique comme une sœur de la poésie et une fille de la tristesse », ce concerto aux coulées incandescentes ou diaphanes est la vivante incarnation d’un lyrisme débordant. Trois mouvements (moderato-adagio-allegro scherzando) pour dire toute l’impétuosité et la fougue d’une œuvre agitée et éruptive où clavier et orchestre rivalisent de pics d’émotion et de bravoure. Premiers accords étouffés du piano s’amplifiant crescendo pour rugir insensiblement comme un fleuve qui gronde, torrentiel et tumultueux. Peu à peu, le piano se calme dans ses arpèges et ses chromatismes aux déchaînements éblouissants pour laisser la place à une mélodie profondément russe dans sa douceur et ses emportements, portée discrètement par les cordes, la flûte ou la clarinette. Dramatique à outrance, délirante, démesurée, véhémente, d’une puissance titanesque, cette musique a la houle irrépressible des eaux que rien n’endigue…
Après un bref entracte, des vents, des orages et des embellies de Novgorod, on passe aux rivages ensoleillés et couverts de sable de l’Orient avec la Symphonie n° 1 de Gabriel Saab qui a su concilier une brillante carrière mêlant préoccupations professionnelles scientifiques et passion d’écrire, une partition révélant une personnalité originale et des sonorités insoupçonnées. Tout en gardant un étroit contact avec les milieux de la musique, lui qui est un éminent membre fondateur du Festival de Baalbeck. Quatre mouvements pour traduire, en confidences sonores aux teintes contrastées, les émotions chargées de poésie, de nostalgie, d’espoir, de l’impact des chants religieux et d’une fervente quête spirituelle. Pages frémissantes d’une vie secrète à la narration lente, éthérée et délibérément répétitive dans ses fastueuses lignes mélodiques. Phrases longues et majestueuses où pointe discrètement une certaine orientalité et qui font penser parfois, de bien loin, aux cycles frankiens et par moments aux déchirures mahlériennes, pour mieux émerger vers la lumière.

Edgar DAVIDIAN
Grand monde à l’église Saint-Joseph des pères jésuites, illuminée et encore étouffante de chaleur, pour le premier concert de la saison donné par l’Orchestre symphonique national libanais sous la houlette de Walid Gholmieh, plus dynamique et entreprenant que jamais. Au menu, concis et brillant, mêlant fragrances russes et subtiles nostalgies orientales, deux invités de...