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Actualités

Déferlante de scènes d’action sur l’écran local

Aoun, Sfeir, Berry et maintenant Hariri. Après un petit crochet par Siniora, voire par Addoum et Salamé. La rentrée politique confirme les pronostics estivaux d’agitation effrénée. Avec, en double toile de fond, une crise économique bien actuelle et une course au pouvoir, à la présidentielle plus précisément, encore indécise.
Le plus mobile, sinon le plus loquace, c’est encore Hariri. Encore une fois, il a été voir son grand ami Chirac. Pour se précipiter ensuite, encore une fois, chez Assad. Rendre compte, avant qu’on ne lui en demande.
Mais le plus marquant, et le plus remarqué, reste sans doute le patriarche. Encore une fois (lui aussi), comme lors de sa fameuse tournée américaine, c’est en mettant à profit un périple occidental que le patriarche affiche des positions en flèche. Moins réservées, sinon moins souples, que celles adoptées l’été à Dimane, fief lointain, enclavé en quelque sorte dans une contrée bien tenue en main par les décideurs. Le cardinal a mis les points sur les i et sur deux points : on n’oublie pas la souveraineté, loin de là ; et on ne veut pas de la reconduction. Vifs applaudissements dans les rangs de l’opposition, étrangement attachée pour l’occasion à une Constitution qu’ordinairement elle dénigre. Et « standing ovation », bien entendu, chez les contempteurs loyalistes du régime, haririens en tête. La conjonction d’intérêts, la collusion diraient les lahoudistes, est illustrée par la visite que le chef du gouvernement a voulu effectuer en France au moment même où le cardinal y déploie ses talents d’avocat de la cause nationale.
Un détail significatif, qui montre combien reste grande l’autorité morale, sinon l’influence de Bkerké : contre toute logique et pour ne pas le contrer de front, les lahoudistes soutiennent que le discours patriarcal ne leur est pas défavorable. À en croire ces subtils exégètes, le prélat n’a pas du tout fermé la porte à la reconduction, du moment qu’à son avis elle n’est envisageable qu’en cas d’urgence, de force majeure. C’est-à-dire dans des circonstances exceptionnelles, ce qui concorde, d’après les lahoudistes, avec les conditions de l’heure, dans le pays comme dans la région. Les partisans du régime ajoutent que le patriarche n’a pas pris l’initiative de se déclarer sur la présidentielle et ne faisait que répondre à des questions de presse. En laissant la porte ouverte, répètent-ils, à toutes les éventualités.
« Qu’est-ce qu’il leur faut », ricanent devant cette lecture astigmatique les opposants. Qui, pour leur part, rappellent que les autorités françaises, Chirac en tête, ont tenu à souligner, pour leur part, après avoir parlé avec Sfeir, que la Constitution libanaise doit être respectée à la lettre. Notamment côté « délais », entendre durée d’un même régime.
Dans la pratique donc, on est bel et bien en pleine bataille d’une présidentielle vue sous l’angle de la reconduction. Les Syriens ne doivent pas être très contents, car ils avaient demandé avec insistance le gel de ce débat sensible, pour ne pas dire explosif (ou implosif, au choix). Le bras de fer est tel qu’il y a bien peu de parties qui ne partagent pas le verdict de Berry: le pays subit une véritable « crise de pouvoir » et non pas une simple « crise de gouvernement ». Un propos d’autant plus tranché qu’il a été tenu à l’issue d’une rencontre avec le chef de l’État, partie prenante au conflit désigné. En somme, Berry confirme l’impression générale que Baabda et Koraytem sont définitivement irréconciliables. Et cela malgré les pressants conseils d’entente, voire les admonestations, régulièrement délivrés par les décideurs.
Encore une fois (c’est un leitmotiv), les lahoudistes interprètent les déclarations de Berry comme les avantageant. Ils veulent y voir en effet un constat tellement désabusé qu’il laisse entendre que la seule solution serait de changer le gouvernement. Et Hariri. Mais ce dernier, quand on lui pose la question, rigole doucement. Le cabinet reste, indique-t-il. Et il n’y a pas de raison de ne pas le croire, du moment qu’il affiche une telle assurance après avoir parlé avec les Syriens. Il reste cependant à savoir si le régime, qui est encore le mieux vu comme on sait à Damas, ne va pas pouvoir persuader les décideurs de changer d’avis et de gouvernement (libanais s’entend). Les haririens cependant se montrent confiants. Ils affirment que leur chef de file, objet d’une campagne entêtée visant à le déloger, ne va pas rester passif. Qu’il a déjà marqué beaucoup de points. Bref, le spectacle continue. Et risque de tenir l’affiche pendant de longs mois encore.

Philippe ABI-AKL
Aoun, Sfeir, Berry et maintenant Hariri. Après un petit crochet par Siniora, voire par Addoum et Salamé. La rentrée politique confirme les pronostics estivaux d’agitation effrénée. Avec, en double toile de fond, une crise économique bien actuelle et une course au pouvoir, à la présidentielle plus précisément, encore indécise.Le plus mobile, sinon le plus loquace, c’est...