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FESTIVAL DE BAALBECK - Deux concerts exceptionnels du pianiste de Pittsburgh Ahmad Jamal, là où on ne l’attend pas(photo)

Soixante-treize ans au compteur, Ahmad Jamal soigne toujours son image. Le pianiste de Pittsburgh – qui n’a pas pris pour autant la grosse tête, encensé qu’il a été, entre autres, par Miles Davis qui envoyait ses accompagnateurs successifs au clavier l’écouter et le prendre comme exemple absolu – est arrivé sur la scène du temple de Bacchus dans un impeccable costume sombre, lunettes noires et barbe blanche, souriant à l’accueil pour le moins enthousiaste de quelque 350 auditeurs.
À 20h30, encore debout et entouré de ses deux merveilleux musiciens, aussi élégants que lui, Ahmad Jamal entreprend son instrument comme un prolongement de lui-même : pas de préparation, pas de jaugeage et avec le naturel évident du pratiquant de très longue date. Pendant 60 minutes, il a rhabillé, avec une facilité déconcertante, les standards du jazz, leur donnant un visage neuf et aussi puissant que sa conception de la musique qui fait autorité depuis : largement rythmique, on dirait presque uniquement rythmique.

Suiveurs
magnifiques
Et c’est là qu’entrent en scène James Cammack et Idriss Mouhamad. Le premier, guitariste bassiste de formation, s’est lancé dans l’apprentissage de la contrebasse pour, d’après Ahmad Jamal, « rester à mes côtés ». Le moins que l’on puisse avoir constaté, c’est que sa formation a été ultrarapide. James Cammack, qui joue auprès du pianiste depuis 20 ans, a donné à la fois une vraie leçon d’accompagnement – le métier d’accompagnateur musical est particulièrement délicat – et d’improvisation sur un instrument avec lequel le corps-à-corps est inévitable, le plus souvent aux dépens du musicien.
Que dire de l’unique Idriss Mouhamad ? Laisser d’abord le pianiste parler de lui : « Des batteurs comme lui ont cette aptitude inimitable à faire danser un rythme, à lui donner une élasticité. » Ensuite, dire que cet excentrique, qui assortit ses chaussures et ses lunettes noires à ses baguettes, toutes les trois rouges et qui ne lâche pas des yeux, cachés derrière leurs verres fumés, le maître, dont il est, depuis 11 ans, le « follower » (suiveur) : en somme, un batteur mélodique qui ne se permet aucune facilité, aucun morceau de bravoure et aucun vieux souvenir d’exercice d’échauffement.

D’un swing à l’autre
Mais tout le mérite revient à Ahmad Jamal, guide éclairé, sans cesse en contact, de la main, du pied ou du sourire, avec ses suiveurs, qui passe d’un swing à l’autre sans prévenir un public qui accepte rapidement de se laisser porter par la pure improvisation de ce créateur, qui tient à être reconnu comme un « musicien contemporain américain », pour éviter le terme réducteur de « jazzman ». Comme tous les grands, sa musique n’est jamais là où on l’attend. Son imprévisibilité calculée lui assure l’estime indéfectible de trois générations d’amateurs. Le jazz, version élargie par Ahmad Jamal, Idriss Mouhamad et James Cammack, s’assure un bel avenir au Festival de Baalbeck.

Diala GEMAYEL
Soixante-treize ans au compteur, Ahmad Jamal soigne toujours son image. Le pianiste de Pittsburgh – qui n’a pas pris pour autant la grosse tête, encensé qu’il a été, entre autres, par Miles Davis qui envoyait ses accompagnateurs successifs au clavier l’écouter et le prendre comme exemple absolu – est arrivé sur la scène du temple de Bacchus dans un impeccable costume...