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FESTIVAL DE BYBLOS Gregorian: variétés «médiévalisées», quelque peu dévoyées (photo)

C’est par les ruelles pavées et piétonnes du vieux souk de Jbeil qu’on accède à l’entrée de la citadelle où, à l’ombre des vieilles pierres réveillées par les spots des sunlights, est érigée une scène. Public nombreux et agité, qui restera mouvant, même lorsque les chanteurs et les musiciens (une quinzaine d’artistes) seront, vers 20h 45, sous les feux de la rampe, et chaises ultraserrées, pratiquement collées les unes aux autres. Sans oublier les photographes, dos tourné à l’ensemble vocal déjà en performance, qui font tranquillement crépiter leurs flashes sur les personnalités du premier rang.
Atmosphère sombre et menaçante d’hiver, avec averse et son de clocher par cette fin d’août étouffante de chaleur et de moiteur pour les Gregorian en procession avec leurs robes de moine en blanc et velours de nuit. Capuchons sur la tête, lampes électriques (fonctionnant approximativement) sous leurs amples manches (au lieu probablement des lanternes à bougies... ), ces moines privés de cathédrale, maîtres du chant (disent-ils) et champions des disques les plus vendus, officiaient dans le vieux port de Byblos. Auditoire à prédominance jeune, venu applaudir les succès des étoiles de la chanson moderne, mais dans une version nouvelle, soumise à une remontée dans le temps, comme la machine de H.G.Wells ou comme un sablier mis à l’envers et à contre-emploi…
«Médiévalisés», presque dévoyés, avec une sonorisation outrancière et souvent assourdissante, étouffant la netteté du chant et sa grandeur, ces succès dans leur «remake» spiritualisé, plus ou moins heureux, teintés brusquement d’un curieux mysticisme, sont restitués ici dans une version « singulière », empruntant une grande part à la beauté et piété des chants des moines «grégoriens», dont la grande tradition vocale s’est épanouie en Syrie et en Palestine, au Moyen Âge, et qui reste un des piliers les plus solides de l’art chrétien et un des éléments permanents de la prière chantée.
C’est dans cette ambiance empreinte de « religion » et de musique sacrée, sur fond de jeux de lumière en vitraux et de nuage fumigène, que sont nivelés et presque unifiés, dans leur psalmodie chantée, les tubes qui nous ont fait chavirer dans les discos et les boîtes de nuit où entre danse, cigarettes, whisky et lumière stroboscopique, l’on s’entend à peine tandis que s’éffilochent les rêves les plus têtus.
D’Eric Clapton aux Pink Floyd en passant par Phil Collins, Led Zeppelin, Elton John, Simon et Garfunkel, Sting et autres vedettes du temple des variétés sur les ondes et dans les night-clubs, sous les doigts des DJ qui savent chauffer et surchauffer les ambiances, ces airs, ces ritournelles, ces mélodies, ces éclats de jazz et ces rythmes de pop music ont ici des effets cathédrale forcés, avec tout un attirail musical électrique (guitare, batterie, synthé) qui les sert avec une amplitude exagérée, marquée au fusain. Les puristes des chants grégoriens vont crier ici à l’hérésie.
Les mordus de Clapton, d’Elton John et de Zeppelin ne trouvent certainement pas leur compte dans ces versions célestes à décibels d’enfer. Style particulier que celui des Gregorian, mélange et métissage d’angélisme et de rituel à rythmes accélérés où, entre ciel et terre, la chansonnette ne sait plus à quel saint se vouer. La première impression de surprise passée, les chansons se ressemblent et les émotions s’aseptisent. Pour ce qui est de la mise en scène des chanteurs, quatre enjambées, une marche en procession et deux mouvements obséquieux d’une vague bénédiction ne font certainement pas une sérieuse mise en place d’un spectacle attachant.
Voyage au bout des notes peut-être pour ces énigmatiques variations, où la sono siffle et grésille à profusion. Mais les Gregorian, avec deux bis, n’ont pas comblé, le premier soir de leur concert, les attentes de leurs fans en s’abstenant de chanter Voyage, voyage. Sur clip ou sur platine de CD, les Gregorian diffusent sans nul doute une certaine atmophère, une ambiance que leur concert live n’arrive guère à égaler.
Edgar DAVIDIAN
C’est par les ruelles pavées et piétonnes du vieux souk de Jbeil qu’on accède à l’entrée de la citadelle où, à l’ombre des vieilles pierres réveillées par les spots des sunlights, est érigée une scène. Public nombreux et agité, qui restera mouvant, même lorsque les chanteurs et les musiciens (une quinzaine d’artistes) seront, vers 20h 45, sous les feux de la...