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Coopération - Deux partenaires privilégiés sur la scène internationale La romance du Liban et du Canada

Chapeau : Depuis la fin de la guerre, les mouvements migratoires entre le Liban et le Canada sont passés d’un flux de réfugiés à un flux d’immigrants économiques et universitaires. En quelques années les rapports entre les deux pays se sont considérablement accrus, grâce notamment à la dynamique culturelle qu’engendrent ces flux migratoires et aux investissements canadiens au Liban. Le Canada travaille à la modernisation du pays, que ce soit dans le cadre de la francophonie ou grâce à des initiatives privées (comme ce fut le cas pour la rénovation du système postal). Depuis un certain temps, le succès de l’intégration des Libanais du Canada inspire bon nombre de jeunes candidats à l’immigration, qui s’enthousiasment de plus en plus pour ce modèle canadien à mi-chemin entre une Europe riche mais peu dynamique et le libéralisme américain.
En trente ans, le Canada et le Liban sont devenus des partenaires privilégiés sur la scène internationale. Liés par la francophonie et une forte communauté libanaise au Canada, les deux pays ont approfondi leurs relations dans un climat d’entente profonde. Le Liban a besoin de capitaux pour sa reconstruction, le Canada, d’immigrants pour occuper son immense territoire. C’est la guerre du Liban qui a donné une impulsion décisive à l’immigration vers le Canada de milliers de Libanais, puisque les données montrent que le flux migratoire a été multiplié par dix pendant le conflit.
Le choix du Canada ne s’est pas fait par dépit, parce qu’après quelques années, certains pays accueillant traditionnellement l’immigration libanaise ont réduit le nombre d’entrants autorisé. Si les USA ont ainsi durci leur politique de visas et l’Europe s’est unie autour des critères très sévères de la Convention Schengen, des pays comme le Canada ont développé à l’opposé une vraie politique favorable à l’immigration qui a permis à de nombreux Libanais de s’installer. L’ambassade du Canada à Beyrouth estime officiellement à 1 000 par an le nombre de Libanais partis s’installer au Canada en temps normal, et avance le chiffre de 15 000 migrants par an durant la guerre. Ces statistiques témoignent du rythme soutenu de l’immigration libanaise. Celle-ci ne s’est pas répartie également sur l’ensemble de l’immense territoire canadien, puisque 66 %, soit les deux tiers, sont allés s’installer au Québec. La ville de Montréal, la grande métropole de la province, rassemblant à elle seule une immense partie de cette communauté. La langue a sans aucun doute joué un rôle important dans ce choix, les Libanais se concentrant naturellement dans les zones francophones du pays. Mais les flux migratoires ont généralement des motivations économiques, comme c’est le cas pour l’immigration libanaise au Canada, et ils se dirigent habituellement vers les zones les plus prospères d’un pays, ce qui est le cas du Québec.
Dans ce pays, mille fois plus grand que le Liban et seulement dix fois plus peuplé, le mythe américain des grands espaces à peupler vit encore, d’où cette politique très ouverte des pouvoirs publics en matière d’immigration. Le seul risque que souhaite éviter l’Administration fédérale reste les immigrants qui ne viendraient au Canada que dans le but d’obtenir avec un passeport canadien, le droit de libre circulation vers les États-Unis et ainsi contourner la législation des USA.
Outre sa tradition de terre d’immigration, le Canada possède d’indéniables qualités et des avantages (économie prospère, niveau de vie élevé, protection sociale efficace, enseignement de qualité) qui ont conduit bon nombre de migrants libanais à s’installer à Montréal, Québec, Toronto, Vancouver... Là-bas, ils ont découvert un univers qui correspond encore un peu au mythe de l’Amérique, du « go west », et un dynamisme économique qui laisse sa chance à tout le monde.
Le fait que bon nombre d’entre eux aient choisi de s’installer au Québec ne doit pas laisser croire que la « Belle Province » n’est qu’un substitut francophone à une impossible immigration en France. Il y a au Québec un cosmopolitisme et un multilinguisme qui plaît aux Libanais, car il s’apparente en quelque sorte aux grands traits de la société libanaise actuelle, où l’on a pris l’habitude de jongler avec le français, l’anglais et l’arabe.
Les Libanais-Canadiens que l’on rencontre ne tarissent pas d’éloges sur le Canada et sur le Québec. Ils louent la simplicité des gens, leur ouverture et le dynamisme économique du pays. Dans l’esprit de bien de jeunes Libanais, le Canada a pris le relais de la France et ils sont de plus en plus nombreux à s’y rendre. Le Québec a, de fait, endossé le rôle d’une terre d’accueil un peu particulière où les Libanais peuvent profiter de la francophonie alors même que chez eux la pratique du français diminue.
La conjugaison de cette tradition d’accueil et de l’incroyable pouvoir d’adaptation des flux migrants libanais a permis de développer entre ces deux pays une relation très particulière qui aujourd’hui produit ses effets.

Francophonie
et investissements
D’abord le Canada est devenu, par le biais du Québec, l’un des principaux défenseurs de la langue française au Liban. Il s’y est aussi affirmé comme l’un des tout premiers investisseurs, et les exemples ne manquent pas, que ce soit dans le secteur bancaire, postal ou touristique.
Ces investissements dans la plupart des cas sont le fait de Libanais qui ont réussi professionnellement au Canada, ou qui y ont fait des études et qui ensuite reviennent travailler ou investir au Liban. Ces « retours économiques » ne sont pas la seule forme d’engagements canadiens au Liban. On trouve notamment des collaborations universitaires comme celle qui lie l’École supérieure et internationale de gestion de Beyrouth et l’Université du Québec à Montréal. Selon un responsable de l’ambassade canadienne, « la coopération universitaire est le prolongement logique de l’immigration ».
L’action du Canada dans le domaine de la culture passe, elle, notamment par le canal de la francophonie. Lors du sommet de Beyrouth en octobre 2002 réunissant les représentants des États ayant le français en commun, le gouvernement du Québec a ainsi offert de financer l’installation de panneaux informatifs pour le site de Byblos. Le français étant une passerelle entre les deux États, chaque année un représentant de la langue de Gaston Miron vient à Beyrouth pour le Salon du Livre, comme ambassadeur de la littérature québécoise. En octobre 2002 il s’agissait de Christyne Brouillet. Depuis ce sommet, la francophonie a pris une tournure nettement plus politique et économique, sans pour autant abandonner son fondement littéraire. Pour ne pas laisser la francophonie devenir une table ronde poussiéreuse, ses membres se sont lancés dans des programmes de développement et d’investissement. Le Canada, qui développe notamment des projets d’hydrologie en Afrique, pourrait un jour être amené à travailler sur ce thème au Liban, car l’écologie est une de ses priorités. Pour l’instant, son programme d’aide se concentre sur la reconstruction du pays, la réforme du système de taxation et la formation professionnelle et technique.

Fabrice BOSSOLINI
Chapeau : Depuis la fin de la guerre, les mouvements migratoires entre le Liban et le Canada sont passés d’un flux de réfugiés à un flux d’immigrants économiques et universitaires. En quelques années les rapports entre les deux pays se sont considérablement accrus, grâce notamment à la dynamique culturelle qu’engendrent ces flux migratoires et aux investissements...