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Actualités

The Electric Horseman*


– Amusons-nous d’abord un peu. Les Américains ont besoin de 51 milliards de dollars pour remettre à jour leur réseau électrique Nord récemment défaillant. Proposons-leur un deal, un troc, profitable aux deux parties. Ils effacent notre ardoise de 33 milliards de dollars. Et nous réglons leur problème sans qu’ils mettent une piastre (parce que nous, c’est en piastres que nous comptons). Nous leur enverrions en premier lieu notre Conseil des ministres, bogomoletz infaillible pour énergies (électriques) défaillantes. Puis nos patrouilles à clignotants, si branchées. Qui, dans les bois glacés de la frontière, prendraient la place de la police montée canadienne. Pour offrir aux caméras du monde le spectacle fascinant d’un ballet d’electric horsemen escortant une fée.
– Plus sérieusement, le casse-tête de l’électricité, indéniablement complexe, technique autant qu’administratif, serait aux trois quarts résolu si le problème financier était réglé. Deux milliards de passif à ce jour, malgré les trois milliards avancés par le Trésor ces deux dernières années. La cause première, le nucleus, ce sont les 37 % de courant volé par année, soit 258 millions de dollars. Sur cette fondation se construit un édifice de déficit qui comprend d’énormes exemptions de quittances pour des régions privilégiées, comme le Sud et une partie de la Békaa, ou comme les camps palestiniens. Il y a aussi les arriérés de quittances qui impliquent des débiteurs de forte consommation, dont nombre de services publics. Et il y a le prix, dangereusement flambant, du fuel.
Siniora ne veut plus mettre la main à la poche. Non seulement il faut le comprendre mais encore, sur le plan du traitement financier, on peut se poser la question : n’est-il pas temps de confier directement le budget même de l’EDL, et tout son bordereau comptable, sinon au ministère des Finances du moins à la Banque centrale ? C’est un tel arrangement que, dans un mouvement de rare sagesse, Aoun et Hoss avaient conclu durant la guerre, quand ils étaient en vis-à-vis. Ils avaient laissé les clés, dans ce domaine, à Edmond Naïm, alors gouverneur de la Banque du Liban.
On répondra qu’avant même de songer à des mécanismes d’assainissement financier, il faut se pencher sur la source même de déboires qui débordent largement le cadre énergétique. C’est-à-dire sur le volet dit politique. Il est très significatif ainsi que le portefeuille de l’Énergie soit systématiquement dévolu à une double ancienne partie prenante à la guerre domestique : la communauté chiite et le mouvement Amal. Ce n’est pas une part d’un gâteau partagé plus ou moins équitablement qu’on leur offre de la sorte. Mais bien un butin. Pour que leurs fidèles, leurs régions aient le courant à l’œil. Mais ils ne sont pas les seuls à profiter du soi-disant pacte de paix civile. D’autres ont eu droit, quant à eux, à des dédommagements considérables, sous forme de fonds alloués pour les déplacés, les squatters, les parasites et autres fallacieux prétextes. Bref, toutes ces rapines, 33 milliards de dollars, justifient ce constat : la guerre du Liban a bien produit un vainqueur (plusieurs en fait) et un vaincu. Qui paye tribut.
D’où une conclusion banale : le pouvoir, le régime en particulier, pour assumer sa mission de régulateur national, doit, avant toute chose, dire stop. La dette est plus que payée. Il faut sortir d’une situation de césure prolongée. Il faut réaliser la vraie réconciliation. Sans quoi, c’est la faillite qui va tous nous ronger.

Jean ISSA

*de Sydney Pollack, 1979, avec Robert Redford et Jane Fonda.
– Amusons-nous d’abord un peu. Les Américains ont besoin de 51 milliards de dollars pour remettre à jour leur réseau électrique Nord récemment défaillant. Proposons-leur un deal, un troc, profitable aux deux parties. Ils effacent notre ardoise de 33 milliards de dollars. Et nous réglons leur problème sans qu’ils mettent une piastre (parce que nous, c’est en piastres que...