Le système de poulies qu’emploient ces acrobates et de poids intrépides est aussi impressionnant que les artistes eux-mêmes, qui ouvrent le feu avec un duo en costumes acidulés en s’élançant au-dessus de la scène sans aucune sécurité au sol.
Le cirque chinois a bien changé depuis ses débuts, il y a deux mille ans de cela. Si son talent, voire son génie – qui, en effet, résiste à l’admiration que provoquent la tour de chaises, la pyramide de verres remplis à ras bord et tenue à bout de bouche et à d’autres extravagances corporelles ? – est, on aimerait le croire, inoxydable, il n’en va pas de même pour le supershow américano-international qui gangrène son essence même. Le public a eu à subir un «medley» indigeste et sans intérêt de musiques d’ascenseur et de fête foraine, sans compter que les passages entre l’un et l’autre étaient très peu dignes des ingénieurs du son qui étaient aux commandes de cette première soirée.
À qui la faute ? Peu importe, le résultat sonore est infect. Quant aux panoplies de samouraïs du futur, assorties à un éclairage de spectacle de très, très grande consommation, elles font plus sourire qu’autre chose.
École immémoriale
La déconnexion de l’environnement événementiel opérée, il est alors plus facile de se concentrer sur ces merveilleuses machines humaines qui exploitent leurs possibilités jusqu’au bout, sans aucune difficulté apparente. Il faut dire qu’en Chine, le cirque est d’abord une affaire de famille, bien plus qu’ailleurs et depuis bien plus longtemps.
Se suspendre par les cheveux à une poulie et effectuer des acrobaties gracieuses dans les airs, singer des clowneries pendant un exercice d’équilibre affolant ou encore appréhender une perche de bambou de trois mètres comme un vulgaire escalier, voilà la force toute-puissante de l’immémoriale école de l’empire du Milieu.
Foin d’animaux exotiques, de rencontre dangereuse avec des fauves ou des reptiles : ici, on se mesure entre hommes et femmes, dans une entente parfaite. En cas de chute, c’est au mieux un collègue qui rattrape, toujours attentif, sur ses gardes. Les objets qui accompagnent les artistes sont ceux d’un lointain quotidien : assiettes, chaises impériales carrées, drapeaux et tissus en soie.
Les spectateurs, à ce propos, attendaient les numéros des jarres et du monocycle, qui ont brillé par leur absence.
Bien qu’irréprochables, les numéros ont été menés tambour battant sans, encore une fois, de transition bien orchestrée : un show découpé à la scie électrique, en somme, alors que tout l’ensemble voulait être «vendu» sous le label international.
Dommage pour les fâcheux à-côtés. Mille bravos à ces extraordinaires Chinois qu’on aurait peut-être aimé applaudir sur une simple estrade, dans des costumes aussi beaux que traditionnels, enchaînant leurs prouesses avec tact et drôlerie sur des rythmes non bâtards, sous des lumières moins tonitruantes.
Le génie – le mot est approprié – du Cirque impérial de Chine se passerait bien de tout accessoire.
Diala GEMAYEL
Les plus commentés
Israël est en train de perdre, mais pas autant que les Palestiniens
Don de l'UE : après avoir déclaré la guerre à Mikati, les chrétiens proposent la paix ?
Frontière terrestre libano-israélienne : où en sommes-nous ?