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Présidentielle - Le choix des puissances reste en suspens Les parties locales déjà divisées en deux grands camps

Il est encore trop tôt pour savoir quel va être l’éventail des puissances appelées, en septembre 2005, à peser sur l’élection présidentielle libanaise. La qualification des grands électeurs potentiels, la répartition des rôles entre eux (qui désignera, et qui aura un droit de veto) dépendront de l’évolution de la situation régionale comme des rapports de force. Mais les forces locales n’attendent pas, de leur côté, et se trouvent déjà en précampagne. En se divisant en deux grands camps : ceux qui manœuvrent en fonction d’une reconduction ou d’une prorogation du mandat du président Lahoud. Et ceux qui cherchent ailleurs, en affirmant tous qu’ils ciblent l’option d’un président idéal pour les phases à venir. Ce qui signifie, bien évidemment, un président capable de dynamiser au maximum l’effort de redressement économique que le pays, en pleine récession, doit produire.
En tout cas, en ce qui concerne l’échéance, certains avancent l’équation suivante : soit le départ, soit le maintien de tous. En d’autres termes, les présidents Lahoud, Berry et Hariri verraient leurs carrières liées. Et si le chef de l’État actuel devait abandonner la barre, les deux autres devraient s’éclipser. Pour que le changement soit total et que la direction soit assurée par de nouvelles figures de proue. Pour ces professionnels, le poids du régime présent contrebalance celui des présidents Berry et Hariri. Il faut éviter qu’à l’avenir, ces deux derniers ne dominent, à la faveur de la présence d’un chef de l’État moins fort. Car le déséquilibre signifierait que le pays serait privé d’un régulateur capable de corriger la trajectoire en cas de dérive. En somme, selon cette thèse, la présidence de la République ne doit pas se transformer en poste purement honorifique. Cette logique aboutit, évidemment, à la conclusion suivante : nul ne peut mieux que le président Lahoud freiner les orientations erronées et le mieux ce serait qu’il reste au pouvoir, si Berry et Hariri devaient en faire autant.
En face, on répond que chaque régime cherche à faire croire qu’il est indispensable, ce qui n’est jamais vrai. Dès le début, les partisans de Béchara el-Khoury avaient entonné ce refrain, en affirmant qu’on ne trouverait jamais un successeur du même calibre. Venu pour prouver le contraire, Chamoun, ou plutôt ses partisans, était tombé dans la même erreur. Tout comme d’ailleurs, ensuite, le camp de Fouad Chéhab. Et d’ajouter que la démocratie est, par essence, mobile, variable, fluctuante. Elle produit parfois des présidents forts et parfois des présidents faibles, ou ordinaires. En France, tous les présidents n’avaient pas l’envergure d’un Poincaré ou d’un De Gaulle. En Amérique, les grands présidents se comptent sur le bout des doigts : Lincoln, Roosevelt, Kennedy... C’est le cycle normal dans les pays qui exercent vraiment la démocratie, sans intervention pour la dénaturer.
Du reste, soulignent les défenseurs de cette thèse, la Constitution veille sur le respect de l’alternance, en interdisant la reconduction d’un mandat présidentiel. Pour que le pouvoir ne se transforme pas en règne de droit divin camouflé et qu’il reste aux mains de la nation. Au Liban, comme ailleurs, il y a eu des présidents forts, faibles ou ordinaires. Et c’est bien ce qui permet à ce pays de se prévaloir d’une certaine dose de démocratie, qui lui apporte les rares avantages dont il dispose dans cette partie du monde.
De plus, toujours selon les adversaires de la reconduction, rien n’interdit que l’on choisisse, avec le concours des grands électeurs extérieurs, un président fort pour succéder à l’actuel. La majorité des Libanais souhaite en effet que le régime soit capable et reste en mesure de faire jeu égal avec Berry et Hariri. Sans compter que l’équilibre des forces n’est plus de rigueur lorsque les présidents s’entendent, pour mieux servir le pays. Dans cet esprit, il est d’ailleurs évident que la force intrinsèque de chaque président se trouve érodée par les divisions au sein du pouvoir. Des tiraillements qui conduisent la Syrie à intervenir pour arbitrer et imposer une cohabitation relativement pacifique. Or, soulignent les mêmes pôles, l’animosité de base est telle entre les protagonistes qui se partagent le podium que le Liban ne pourra pas supporter six ans supplémentaires de crises. Donc, si le président Lahoud devait rester, il faudrait envisager le départ de Berry et de Hariri. Un départ ou un maintien qui, pour leur part, est conditionné par les législatives. Ou plus exactement par la configuration de la Chambre qui en découle. En effet, le président de l’Assemblée nationale est en poste pour quatre ans. Le président du Conseil est désigné à travers des consultations parlementaires impératives. Ce qui revient à dire qu’en principe, la présence de Berry et de Hariri n’est pas absolument garantie, que le chef de l’État soit Lahoud ou un autre. En d’autres termes, on ne peut lier entre eux les trois mandats pour soutenir que la direction devrait toute ou s’en aller ou rester.
Une controverse qui fait sourire plus d’un observateur. Car nul n’ignore que, jusqu’à nouvel ordre, ce sont les grands électeurs régionaux et internationaux qui décident de tout. Qui disent qui doit rester et qui doit partir, à tous les niveaux. C’est à eux qu’il revient d’initier un changement, complet ou relatif.

Émile KHOURY
Il est encore trop tôt pour savoir quel va être l’éventail des puissances appelées, en septembre 2005, à peser sur l’élection présidentielle libanaise. La qualification des grands électeurs potentiels, la répartition des rôles entre eux (qui désignera, et qui aura un droit de veto) dépendront de l’évolution de la situation régionale comme des rapports de force. Mais...