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LIBAN-ISRAËL - Les négociations pour l’échange des prisonniers seraient sur le point d’aboutir Le Hezbollah exigerait la présence de grandes figures palestiniennes parmi les détenus libérés

«N’écoutez pas ce que disent les médias israéliens. C’est de la pure désinformation. Les négociations pour l’échange des prisonniers sont en bonne voie et elles englobent de grandes figures palestiniennes. » Pour cette source proche du Hezbollah, ce ne serait plus qu’une question de jours, ou, au pire, de quelques semaines, avant l’aboutissement du processus, qui devrait permettre la fermeture totale de ce dossier, du moins dans son volet purement libanais. Selon cette source, si l’échange proprement dit, avec la libération de personnalités palestiniennes, syriennes et jordaniennes, en plus des détenus libanais qu’il entraînera, est incontestablement une victoire politique pour le Hezbollah, il s’inscrit aussi dans la stratégie actuelle du parti de multiplier les signes de bonne volonté pour laisser passer la campagne américaine et occidentale en général, qui le prend pour cible.
Si, en Israël, les négociations en vue d’un échange des prisonniers avec le Hezbollah constituent un grand débat national, au Liban, nul ne songerait à les contester, estimant que tout détenu libéré est « une victoire sur l’ennemi ». Pourtant, cette fois, le Hezbollah a mis la barre très haut, exigeant le maximum des autorités israéliennes et réclamant en plus des 19 prisonniers libanais, dont cheikh Abdel Karim Obeid et Hajj Moustafa Dirani, des détenus syriens et jordaniens ainsi que de grandes figures du commandement palestinien. Il est ainsi question de Marwan Barghouthi (Fateh), Hassan Youssef (Hamas) et Abdel Rahim Mallouh (FPLP). Et, malgré les refus répétés du Premier ministre israélien, Ariel Sharon, de libérer Barghouthi, considéré par l’État hébreu comme un assassin, ou en tout cas le responsable de plusieurs attentats contre des cibles israéliennes, le Hezbollah continue à réclamer sa libération avec celle de ses compagnons.

Un contexte favorable pour
les Israéliens et le Hezbollah
Une source proche de la formation intégriste va même jusqu’à affirmer qu’il n’est pas question pour le Hezbollah d’accepter un échange qui ne comprendrait pas l’une des figures palestiniennes précitées. Si les autorités israéliennes refusent cette exigence, le Hezbollah sera prêt à arrêter l’ensemble du processus, tout en faisant assumer la responsabilité de l’échec des négociations à la partie israélienne.
Qu’est-ce qui lui permet d’être aussi exigeant et sûr de lui ? La source proche du Hezbollah estime que l’opération intervient à un moment crucial et que plusieurs facteurs la rendent aujourd’hui plus réalisable que jamais.
D’abord, affirme ladite source, la priorité des autorités israéliennes est aujourd’hui l’intérieur des territoires occupés et elles souhaiteraient par conséquent avoir un peu de calme sur le front nord, c’est-à-dire le long de la frontière avec le Liban. Au moins momentanément.
De plus, aux yeux des Israéliens, le dossier des prisonniers était un moyen idéal pour le Hezbollah d’intervenir dans les questions palestiniennes. Car, selon cette analyse, le Hezbollah dispose de trois champs d’action déclarés (même si Israël l’accuse d’en avoir plus et de transporter des armes aux combattants palestiniens) : une activité militaire limitée à Chebaa, qui constitue une intervention plus symbolique qu’effective, destinée à montrer aux Palestiniens que d’autres Arabes agissent aussi contre Israël. Par conséquent, elle a surtout une portée morale. Le second champ d’action est la campagne médiatique et politique d’appui à l’intifada, et le troisième, c’est le dossier des prisonniers qui permet au Hezbollah de considérer qu’il y a une cause commune entre les Libanais et les Palestiniens. Une fois ce dossier clos, le Hezbollah perdra une bonne raison d’intervenir dans le dossier palestinien. Il sera très difficile de faire accepter à la communauté internationale de nouvelles captures d’Israéliens s’il n’y a plus de détenus libanais en Israël. En faisant aboutir l’échange des prisonniers, Israël obtiendrait une sorte de désengagement de facto du Hezbollah envers les questions palestiniennes.

Le prix de l’aboutissement du processus
C’est donc une carte importante que perdrait la formation intégriste avec la fermeture du dossier des prisonniers. C’est pourquoi il faut à tout prix que la contrepartie en vaille la peine et lui permette de sauver la face. Car ses dirigeants savent que le prix de cette libération, c’est l’abandon définitif d’un dossier qui liait les Palestiniens aux Libanais.
Si le Hezbollah a malgré tout choisi de mener sérieusement les négociations, c’est aussi parce que, en l’étape actuelle et en raison de la campagne américaine et même européenne qui le prend pour cible, il a choisi de faire plus ou moins profil bas et de multiplier les signes de bonne volonté. Déjà, depuis quelques mois, son discours sur l’Irak a changé. Il n’appelle plus les citoyens de ce pays à la résistance armée contre l’occupant américain, comme il l’avait fait au début, se contentant d’affirmer que le peuple sait ce qu’il doit faire et choisit lui-même les moyens et la forme de la confrontation. À Chebaa, en dépit de quelques actions destinées essentiellement à faire acte de présence et à relever le moral de ses propres troupes, le calme règne. Le Hezbollah a donc pour mot d’ordre à l’heure actuelle de retirer aux Américains tout prétexte qui leur permettrait de sévir contre lui ou ses protecteurs. Surtout à une étape aussi cruciale, alors que la situation dans les territoires occupés est des plus terribles, avec l’échec de la « feuille de route », des négociations dans l’impasse et des menaces directes contre le chef de l’Autorité palestinienne, Yasser Arafat.
Dans ce contexte, l’aboutissement du processus d’échange des prisonniers pourrait être interpreté comme un lâchage de la part du Hezbollah envers les Palestiniens. Pour les Israéliens, ce serait en tout cas un moyen de plus pour isoler les Palestiniens. Ils veulent bien donner cette stature au Hezbollah, à condition que le dossier soit définitivement fermé.
Conscient de cet enjeu, le Hezbollah veut donc obtenir le maximum. Selon des sources proches de la formation, le débat qui secoue actuellement Israël sur le sujet est aussi dans l’intérêt des autorités israéliennes puisqu’il renforce leur position dans la négociation. Mais cela ne poussera pas pour autant les dirigeants du parti à céder ou à accepter un compromis qui ne leur permettrait pas de se déclarer victorieux. Le Hezbollah veut, à l’aboutissement de ce processus, avoir la stature régionale qu’il réclame, mais surtout montrer, aux yeux du monde, qu’il est une formation sérieuse, capable de tenir ses engagements. Tout comme depuis trois ans, il tient bien en main la situation à la frontière du Liban, il veut montrer qu’il peut être un élément modérateur et surtout un interlocuteur responsable et crédible. C’est à ce prix seulement qu’il acceptera le compromis, et visiblement, les Israéliens l’ont compris, puisque, de l’avis de tous ceux qui suivent le dossier, les négociations seraient sur le point d’aboutir.

Scarlett HADDAD
«N’écoutez pas ce que disent les médias israéliens. C’est de la pure désinformation. Les négociations pour l’échange des prisonniers sont en bonne voie et elles englobent de grandes figures palestiniennes. » Pour cette source proche du Hezbollah, ce ne serait plus qu’une question de jours, ou, au pire, de quelques semaines, avant l’aboutissement du processus, qui...