Il faudra attendre et voir. Pour le moment, divers parlementaires et politiciens mettent l’accent sur l’évidente nécessité d’une nouvelle loi des naturalisations, afin que leur octroi ne soit plus discrétionnaire et opportuniste. Le code en question doit se fonder sur des critères clairs, en prévoyant des barrières pour prévenir les fraudes, notamment par le biais de faux mariages. De même, indiquent ces sources, les nouveaux naturalisés devront être soumis à une période probatoire, sur le plan de leur comportement moral ou civique, pendant cinq ans. Et, naturellement, les Palestiniens devront être exclus, pour ne pas favoriser l’implantation. Comme le prévoit d’ailleurs une résolution de la Ligue arabe visant à préserver l’identité palestinienne des réfugiés.
Pour en revenir à la commission d’élagation, le ministre de l’Intérieur, Élias Murr, tient à ce qu’elle enquête sérieusement au cas par cas, afin que chaque décision soit solidement motivée, politiquement et juridiquement inattaquable. Il s’agit en effet de désamorcer une redoutable polémique. Car, lors de la parution du verdict du Conseil d’État, l’on avait entendu certains soutenir qu’un très grand nombre de bénéficiaires du décret de naturalisation l’avaient été d’une manière illégale et devaient être radiés. Tandis que d’autres soutenaient que le facteur temps allait jouer un rôle négatif. Ajoutant que le Conseil d’État, en transmettant le décret au ministère de l’Intérieur au lieu de l’annuler tout simplement, allait sans doute entraîner une repolitisation du dossier. D’autant que parmi les naturalisés on trouve des Palestiniens, ce qui est contraire à Taëf comme au prologue de la Constitution. D’autre part, l’on trouve également, selon ces critiques, des naturalisés qui sont des repris de justice ainsi que des particuliers qui ont présenté de faux papiers. Quoi qu’il en soit, le ministère de l’Intérieur se dit déterminé à jouer la transparence à fond, dans les enquêtes de vérification qui vont être lancées. Les conclusions seront uniquement fondées, ajoute ce département, sur le droit et la loi. Pour couper court à toute éventuelle exploitation politique, notamment en ce qui concerne les Palestiniens. Dont le cas est clair : ils ne peuvent devenir Libanais, sous aucun prétexte, du moment que c’est contraire à la Constitution comme au droit de retour. Mais sur le plan numérique, l’affaire n’est pas simple. En effet, selon diverses sources, dans le paquet de naturalisés, il y aurait non moins de 30 000 Palestiniens ! Sur un total de 150 000 naturalisés, selon les indications du Conseil d’État. Le Journal officiel mentionne de son côté le chiffre de 159 000. Mais il y aurait en réalité, selon les sources citées, plus du double ! En tout cas, sur les quotas communautaires, tout le monde s’accorde : 65 % de mahométans et 35 % de chrétiens. Béchara Merhej, qui était ministre lors de la parution du décret, affirme que le texte initial est lui-même clair : la nationalité libanaise serait automatiquement retirée à quiconque l’aurait obtenue illégalement, de manière frauduleuse. Il en va de même, ajoute-t-il, pour les Palestiniens. L’ancien ministre de l’Intérieur pense cependant, pour sa part, qu’il n’y a pas eu beaucoup de fraudes. Parce qu’à son avis, ce serait trop compliqué : il faut passer les barrières de la Sûreté générale, de l’État civil, des services fonciers, et falsifier partout les formalités. Il reconnaît cependant que certains auraient pu passer à travers le tamis, car les séquelles de la guerre ont rendu les contrôles moins étanches.
Émile KHOURY
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