«Dahr nos el-Aali». C’est ainsi que les habitants de la région appellent communément l’espace transformé en réserve. Beyno (entre 550 et 750 mètres d’altitude) est à 130 kilomètres de Beyrouth et 48 kilomètres de Tripoli (soit environ deux heures de voiture à partir de la capitale). On y accède par la route principale reliant Tripoli au chef-lieu du Akkar, Halba, en passant par les villages de Edbel et Dahr Nassar.
La réserve est un espace de 200000 mètres carrés où poussent des chênes, des cyprès et des oliviers, ainsi que des plantes rares. Certains arbres ont été plantés tout récemment, mais le choix de ces nouvelles pousses a été effectué en conformité avec l’environnement de la région.
Pour protéger la zone des chasseurs, des vandales et des animaux sauvages, une enceinte en béton de deux mètres de hauteur ceinture la réserve. Ainsi, des espèces nouvelles, qui étaient éteintes ou en voie de disparition, vivent désormais à Beyno. Tel est le cas, notamment, des gazelles disparues du Liban depuis plus de 70 ans en raison du comportement des braconniers, des lièvres qui se reproduisent rapidement dans la réserve, des écureuils dont 70 ont été laissés en liberté hors de l’espace protégé, des chèvres et des hérissons.
Plusieurs espèces de volatiles ont également été introduites dans la réserve : les perdrix, devenues rares au Akkar (actuellement plus d’un millier de perdrix vivent dans l’espace protégé et plus de 600 autres ont été libérées dans les forêts avoisinantes), des faisans, des pigeons de tous les genres, des flamants roses, des cailles, des dindes blanches et des poules.
La réserve a été convenablement équipée pour recevoir tous ces animaux. Des spécialistes, dont un vétérinaire, sont sur place pour s’occuper des quadrupèdes et des volatiles.
Des jardins enchanteurs
L’un des responsables de la réserve, Fakhr Jreij, explique que « la création de la réserve vise à réintroduire des espèces éteintes ou en voie de disparition au Akkar . Elles sont en danger du fait de la négligence ou de l’inconscience de certains responsables qui ne font rien pour lutter contre la chasse, la déforestation et les incendies », dit-il.
La réserve produit toutes sortes de produits laitiers ainsi que du miel. Des ruches ont été installées à l’intérieur de l’espace protégé, où les engrais chimiques et les fertilisants sont prohibés. À la réserve de Beyno, le consommateur a droit uniquement à des produits naturels.
L’espace a également été spécialement conçu pour recevoir des promeneurs qui peuvent sillonner de charmants sentiers. Au sud de la réserve, un lac artificiel, d’une capacité de 80 000 mètres cubes, a été construit. Durant l’été, le lac est alimenté par un puits artésien. Diverses espèces de poissons d’eau douce ainsi que des canards et des oies y vivent.
Les rives du lac artificiel ont été aménagées pour accueillir les visiteurs de nuit comme de jour. Non loin de là, de petits jardins, où poussent des fleurs multicolores, des pins, des chênes et des saules, offrent un spectacle enchanteur.
Ce lac n’a pas seulement été construit pour des considérations esthétiques, mais aussi pour aider les agriculteurs à irriguer les terrains voisins. Grâce à des techniques modernes, le lac a été pourvu de canaux spéciaux capables d’emmagasiner l’eau de pluie et de réduire les risques d’inondations.
Le président du conseil municipal de Beyno, Fayez Jreij, relève que son village « avec sa nature et ses maisons traditionnelles a, de tout temps, inspiré les peintres et les poètes . Ce projet d’écotourisme qui a vu le jour dans notre localité devrait attirer des visiteurs de tout le Liban », souligne-t-il. Le déplacement vaut d’autant plus la peine que d’autres sites voisins méritent d’être visités : les chutes et la citadelle croisée de la localité, la plus ancienne du caza, Akkar el-Atika (située à 7 kilomètres de Beyno), les forêts de Kammouah (à une dizaine de kilomètres de la réserve) ; le vieux sérail ottoman du village voisin de Barj … Et pour rendre la visite encore plus agréable, de petits restaurants montagnards (notamment à Beit Mallat et Rahbé, sans compter Beyno) offrent des repas libanais complets à des prix variant entre 10 et 15 dollars par personne.
Des bungalows tout confort
Le développement que connaît Beyno et les secteurs voisins depuis quelques années a encouragé le retour des familles originaires de la localité qui vivaient à Beyrouth ou à l’étranger, souligne Fayez Jreij. Ces habitants viennent passer des week-ends ou une partie de leurs vacances d’été dans la région. Certains d’entre eux ont entrepris de restaurer leurs maisons anciennes ou de construire de nouvelles habitations tout en respectant le cachet traditionnel de leur village.
Ghassan Hani a vécu 35 ans à l’étranger avant de rentrer définitivement à Beyno, son village natal. Il y a entamé un ambitieux projet qui ne manquera pas de donner un élan certain au tourisme interne dans la région : la construction de 30 bungalows dans un centre baptisé « L’auberge du chasseur ». Six de ces bungalows ont été achevés. D’une superficie de trente mètres carrés, ils sont entièrement équipés et offrent tout le confort nécessaire (télévision, cuisine, ameublement). Ils peuvent être loués pour le week-end ou la semaine à un prix défiant toute concurrence : 30 dollars la nuitée pour le bungalow (où peuvent loger quatre à cinq personnes).
La beauté de la nature, le calme et la sérénité, la douceur de vivre dans son village, en sus évidemment de la réserve naturelle, ont poussé Ghassan Hani à effectuer un retour aux sources. Autant de facteurs qui devraient aussi inciter nombre de Libanais, en quête de dépaysement, à venir découvrir cette région un peu trop méconnue.
Michel HALLAK
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