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Électricité - Le procureur général s’engage officiellement à mener l’enquête jusqu’au bout Addoum : Aucune indulgence envers les contrevenants

Après les volets technique, financier et politique, c’était, hier, au tour du volet judiciaire de la crise de l’EDL d’être officiellement lancé. Au cours d’une conférence de presse, et après une réunion générale des procureurs et des avocats généraux du pays, le procureur près la Cour de cassation, M. Adnane Addoum, a annoncé que le parquet ira jusqu’au bout, rapidement mais sans précipitation, en se basant essentiellement sur des éléments concrets et sans avoir la moindre indulgence pour les contrevenants. Autrement dit, il n’est pas question de mener une vaste campagne qui tournerait court, comme ce fut le cas en 1998. Tout le parquet est mobilisé et les juges travaillent sans relâche pour aboutir à des résultats, punir ceux qui violent la loi et défendre les intérêts des citoyens.
La déclaration pourrait paraître un peu pompeuse, elle n’en reste pas moins sincère. Le procureur général près la Cour de cassation, M. Adnane Addoum, s’est officiellement engagé, hier, auprès de l’opinion publique, à poursuivre jusqu’au bout le volet judiciaire de la crise de l’EDL. Ce n’est pourtant pas une affaire simple, le dossier comportant plusieurs aspects et peu de données réelles. Selon le procureur général, il y aurait ainsi les problèmes relatifs à la production d’électricité, ceux qui concernent les réseaux de transport et de distribution, la qualité du fioul et les questions de facturation. Pour chacun de ces aspects, les ministères publics ont toute latitude pour enquêter, demander des éclaircissements et entendre les personnes concernées et ils ont des instructions précises pour traiter fermement les contrevenants. « C’est un vaste chantier, a déclaré M. Addoum. Mais nous le mènerons jusqu’au bout. »

Rapidité mais sans
précipitation
Le procureur général a précisé toutefois que le parquet ne possède pas une baguette magique et que les enquêtes doivent prendre du temps, d’autant que le dossier est complexe. Et si, aujourd’hui, chacun veut mettre son grain de sel dans cette affaire qui est à la une des médias et faire de la surenchère, le procureur, lui, a affirmé que les parquets du Liban n’ont reçu que quelques centaines de procès-verbaux et non des milliers comme cela avait été dit. La raison ? « Dans de nombreux cas, a précisé M. Addoum, ceux qui établissent les PV préfèrent les garder à l’EDL ou dans les compagnies privées qui font la collecte des fonds, afin qu’ils soient réglés à l’amiable, en se contentant du paiement d’une amende. Mais nous autres, nous préférons tout recevoir, car le vol de courant est un délit, ainsi que l’atteinte aux équipements d’un établissement public. Ils sont punis par la loi. »
La réunion avec les procureurs et les avocats généraux a donc été consacrée à l’organisation du travail de manière à accélérer les procédures pour aboutir à des jugements rapides, lorsque les données sont suffisantes. Il n’est toutefois pas question de traiter les violations qui concernent le courant électrique comme les infractions dans le cadre des problèmes de la circulation. Car, dans le cas du courant, il y a souvent des délits et parfois des crimes. Il ne s’agit donc pas de simples infractions. Le procureur Addoum a donné des instructions précises à la police judiciaire pour mener des investigations rapides. Il a annoncé que le parquet utilisera la détention préventive comme moyen de dissuasion, afin de montrer aux contrevenants la détermination de la justice à combattre toutes les violations de la loi.
Au sujet de la production d’électricité, M. Addoum a déclaré que l’enquête judiciaire portera sur les équipements utilisés, s’ils sont conformes aux critères de l’adjudication. « J’ai entendu dire que certains équipements ne seraient pas neufs. Dans ce cas, leur prix devrait être relativement bas. Tout cela doit être vérifié », a-t-il déclaré.
Pour les stations de production d’électricité, il s’agit de voir pourquoi dans de nombreux cas, les réseaux de distribution et de transport de courant sont insuffisants. Les contrats sont-ils conformes à la loi ? Y a-t-il eu des inspections pour vérifier leur exécution ? Qui est responsable de l’inexistence de réseaux de transport et de distribution suffisants ? Tout cela devrait faire l’objet d’une enquête.
Concernant le problème du fioul, le procureur voudrait savoir pourquoi les centrales de Zahrani et Beddaoui ont été aménagées pour fonctionner au gaz, alors que le gaz n’a jamais existé et qu’elles ont fonctionné différemment. Il devra aussi vérifier la teneur en soufre du fioul importé. Selon certaines informations, le fioul importé contiendrait 3 % de soufre, alors que le bon fioul ne devrait en comporter que moins de 1 %. Il aurait ensuite été mélangé à d’autres matières pour aboutir à un fioul à 1 % de soufre. Dans ce cas, selon le procureur général, il s’agirait carrément de fraude et de détournement de fonds publics, puisque le fioul à 3 % de soufre coûte évidemment moins cher que celui qui n’en contient que 1 %. C’est donc un délit pénal, qui doit être puni.

Des données concrètes
pour entamer une enquête
Concernant les facturations, le procureur a rappelé que le parquet financier avait déjà mené une enquête à ce sujet et l’ancien directeur général de l’EDL avait été déféré devant le juge d’instruction. « Nous devons voir pourquoi le juge n’a pas achevé l’étude de ce dossier, a déclaré M. Addoum. Il y a aussi une enquête concernant la concession de l’électricité de Kadicha qui traîne et nous devons savoir pourquoi ». (À ce sujet, le juge d’instruction, M. Hatem Madi, en charge du dossier de l’ancien directeur général de l’EDL, M. Georges Moawad, a aussitôt fait savoir que celui-ci lui a été déféré depuis des mois, mais qu’il attend lui-même l’avis du parquet financier au sujet de l’exception de forme soulevée par Moawad suite au refus du Conseil d’État d’autoriser l’engagement de poursuites contre lui.)
Le procureur a ajouté que le parquet compte mener une enquête sur la collusion entre certains fonctionnaires de l’EDL et des propriétaires de générateurs privés qui empêchent l’État de recevoir son dû dans les factures par le biais de la coupure du courant pour favoriser l’usage des générateurs.
M. Addoum a insisté sur le fait que toutes ces enquêtes prendront du temps et que le parquet n’engagera de poursuites que lorsqu’il aura des données vérifiées. « Nous avons demandé aux services de sécurité d’entamer les enquêtes et aux organismes de surveillance de nous donner leurs rapports. Pour l’instant, certains nous sont parvenus, nous en attendons d’autres et nous procédons à des recoupements. Nous avons aussi reçu des notes d’information sur la société phénicienne de l’eau et de l’électricité de Nahr Ibrahim, sur la compagnie d’électricité de Aley, la compagnie d’électricité de Nahr el-Bared et la direction générale des investissements au sein de l’EDL. Nous étudierons chaque dossier et nous nous engageons auprès des citoyens pour faire de notre mieux pour que la vérité soit faite et les contrevenants punis. Ce n’est pas une opération folklorique, mais un travail assidu et de longue haleine. »
M. Addoum a fermement rejeté les propos accusant la justice d’être soumise à des pressions de la part du pouvoir politique. « On nous sort à chaque fois la même rengaine. Les juges travaillent pourtant selon leur conscience. Mais ils ont besoin de données de base pour entamer leur enquête. Une fois celles-ci réunies, rien ne les empêchera d’entendre les personnes concernées, qu’il s’agisse de responsables, d’anciens fonctionnaires, de ministres ou de politiciens. Mais si les accusations restent dans le cadre des déclarations politiques, nous ne pouvons pas agir. D’autant qu’en droit, c’est au plaignant de fournir la preuve de ses accusations. »
M. Addoum a insisté sur le fait que le parquet n’attend pas une autorisation d’une quelconque administration pour agir, mais il ne peut le faire sans des données concrètes. Selon lui, si le dossier de l’EDL n’a pas été ouvert auparavant, c’est que c’est la première fois qu’il est officiellement déféré devant la justice. « N’oubliez pas qu’il y a eu il n’y a pas si longtemps une décision annulant les anciennes redevances et exemptant ceux qui ne les avaient pas payées de la moindre amende. Aujourd’hui, ce qui justifie l’ouverture de ce dossier, ce sont les pannes de courant et les demandes répétées d’argent de la part de l’EDL. Il faut donc voir ce qui ne va pas. De notre côté, nous n’avons jamais hésité à examiner un dossier lorsqu’il nous est transmis, qu’il s’agisse de l’affaire contre le ministre Barsoumian ou celle de l’incinérateur de Bourj Hammoud, dans laquelle était impliqué le ministre des Finances. Hier encore, nous avons engagé des poursuites contre l’ancien ministre de l’Agriculture… »
En conclusion, le procureur général a reconnu qu’une lourde responsabilité pèse sur les épaules de la justice, « à la mesure des problèmes que connaît actuellement le Liban. Mais nous essaierons d’être à la hauteur de l’attente des citoyens et nous les tiendrons au courant de notre action ».
Après les volets technique, financier et politique, c’était, hier, au tour du volet judiciaire de la crise de l’EDL d’être officiellement lancé. Au cours d’une conférence de presse, et après une réunion générale des procureurs et des avocats généraux du pays, le procureur près la Cour de cassation, M. Adnane Addoum, a annoncé que le parquet ira jusqu’au bout,...