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Interview - « C’est pour les jeunes que je mène ma campagne », affirme le candidat du CPL Hikmat Dib : La bataille à Baabda-Aley ne menace pas la réconciliation (photo)

Depuis sa désignation, il y a près d’un mois, par le Courant patriotique libre (CPL-aouniste) comme candidat au siège maronite vacant après la disparition du député Pierre Hélou à Baabda-Aley, Hikmat Dib est sous le feu des projecteurs. Depuis le début des années 1990, M. Dib, qui est ingénieur de profession, a fait surtout un parcours de militant, à différents niveaux. Au plan politique, c’est au sein du courant aouniste qu’il a choisi de lutter pour ses idéaux, à commencer par la souveraineté et l’indépendance du Liban. Un combat qui lui a valu par trois fois de faire de la prison : en septembre 1994, pour une période de 23 jours, au ministère de la Défense et au tribunal militaire, puis en 1997, lors de la manifestation estudiantine organisée devant les locaux de la MTV après l’interdiction de la diffusion d’une entrevue avec le général Aoun. La troisième expérience n’était pas la plus heureuse : elle remonte à août 2001. À la suite des rafles dans les rangs aounistes, M. Dib avait passé quatre jours à Yarzé et onze autres à la prison de Roumieh.
Mais pour Hikmat Dib, le militantisme n’est pas limité aux causes politiques et s’étend également au domaine des droits de l’homme et au milieu syndical. Ainsi a-t-il été élu secrétaire général de l’Ordre des ingénieurs en 1997.
Cette expérience au sein de la société civile incite le candidat aouniste à vouloir parler de « choses nouvelles » pour sa campagne électorale. « Certes, j’ai placé le rétablissement de la souveraineté et de l’indépendance au centre de mes priorités électorales, mais j’ai aussi envie de parler de pluralisme, de diversité culturelle, de participation, de culture, des droits de l’homme, de la citoyenneté et de l’opposition, etc. », affirme-t-il, en déplorant le fait que le débat politique électoral stagne à un niveau qui l’empêche d’aborder ces thèmes. « Même au niveau sémantique, il y a tout un nouveau langage qu’il faudrait employer. Prenons pas exemple le mot “coexistence”. Il s’agit d’un vocable statique, sans âme, qui n’est pas représentatif des spécificités du Liban. En ce qui me concerne, dans mon discours politique, j’emploie l’expression “vie commune”, dans son sens dynamique, interactif. Elle évoque le dialogue et la participation », estime M. Dib.
La diversité culturelle et politique et le droit à la différence sont deux autres sujets que le candidat aouniste évoque, mais dans une perspective politique cette fois : « Il est légitime que chaque groupe politique puisse s’exprimer librement, quelle que soit son importance au niveau numérique. Il faut rejeter toute forme de répression, à tous les niveaux. Cette lutte doit être menée au quotidien. Au Liban, certaines personnes sont continuellement traquées en raison de leurs croyances religieuses, politiques. Par ailleurs, il existe une ségrégation au niveau du langage lorsque l’on utilise les vocables “arménien”, “juif”,“chrétien” ou “musulman” pour désigner quelqu’un. Ce sont des questions qui me tiennent à cœur, et c’est pourquoi elles constituent une partie de mon programme électoral. » Et M. Dib de poursuivre en réclamant la libération des détenus dans les prisons syriennes et israéliennes. « Tant au niveau du CPL que des droits de l’homme, j’ai toujours œuvré dans ce sens, et je continue », dit-il.

Non au statu quo
Depuis que Henri Hélou a décidé de se porter candidat à la partielle du 14 septembre, le général Michel Aoun s’est élevé contre le principe de l’élection d’office, collant à M. Hélou l’étiquette de candidat du pouvoir. Hikmat Dib pense-t-il que Henri Hélou est réellement « le candidat du pouvoir » ? « Le président de la République, le président de la Chambre, le Parti syrien national social et le ministre Talal Arslane l’ont assuré de leur soutien spontanément. Toutes les parties qui sont au pouvoir l’appuient dans sa bataille. Par ailleurs, M. Hélou affirme qu’il veut suivre les traces de son père. Or feu Pierre Hélou n’a jamais fait partie de l’opposition. Il n’a pas pris position lors des événements d’août 2001, lorsque des centaines de jeunes ont été arrêtés et tabassés. Certains ministres avaient condamné ces incidents à l’époque, ce qui n’a pas été le cas de Pierre Hélou. »
Qu’en est-il de toute cette polémique autour de l’expression « candidat de deuxième catégorie », utilisée par M. Hélou pour le désigner ? « Henri Hélou opère par stratification. C’est ainsi qu’il distingue les citoyens. C’est inadmissible, et il faut mettre fin à cette manière de voir les choses. J’estime que je suis plus proche des citoyens que lui. Je me suis plus mêlé des soucis des gens au quotidien, notamment à travers l’action syndicale. »
N’aurait-il pas été plus opportun de gagner Henri Hélou à l’opposition plutôt que de mener bataille contre lui? « Le gagner? Dans quel but? Il n’y a rien à gagner, et il n’en a pas été question. Nous ne savons pas comment M. Hélou réfléchit, ce qu’il pense au niveau politique et national. Ensuite, nous avions des objections quant au parcours de son père. Enfin, nous apprécions peu la manière par laquelle il s’est porté candidat. Je suis contre ses prises de position politiques, et, de notre avis, il faut empêcher un tel candidat d’accéder à la Chambre. Il ne sait même pas dans quel camp il est, celui de l’opposition ou celui du pouvoir. Les Libanais en ont assez des personnes qui plaident pour le statu quo et dont les positions sont obscures. »
Ces derniers jours, la bataille de Baabda-Aley s’est transformée en échange d’invectives entre les pôles de l’opposition. Était-il nécessaire d’en arriver là, d’autant plus que Michel Aoun a été accusé d’être à l’origine de ces querelles? « Le général Aoun a donné douze jours à l’opposition pour le choix d’un candidat de consensus. Un laps de temps énorme, dans le cadre d’une bataille électorale, et qui a été inutilement sacrifié. Une partie de l’opposition s’est défilée, ne voulant pas mener bataille. Nous ne voulions pas fuir », répond-il, sans pour autant relancer la polémique.

Promouvoir le dialogue
Pour Hikmat Dib, une victoire à Baabda-Aley constituerait un pas de plus vers le rétablissement de la souveraineté du pays, « qui ne va pas tarder ». Et pour cause, explique-t-il, il s’agit d’une région plurielle. « Le pouvoir et les tuteurs cherchent à empêcher les Libanais de transgresser les frontières communautaires pour dialoguer et se retrouver. Au sein du CPL, nous avons toujours été les promoteurs du dialogue. Une victoire du discours souverainiste à Baabda-Aley signifierait beaucoup à ce niveau et irait dans le sens d’un renforcement de la réconciliation de la Montagne du 5 août 2001 », souligne-t-il. Une manière de répondre à « ceux qui essayent de terroriser les Libanais pour les empêcher de se rendre aux urnes, en les menaçant d’un séisme dans la Montagne et de troubles de la paix civile ». « Si une partielle constitue une telle menace, comment allons-nous faire en 2005? S’il existe actuellement une trêve dans la Montagne, comme l’affirment certains, qu’allons-nous faire aux prochaines législatives, rompre cette trêve et semer le chaos? Le raisonnement ne tient pas. De plus, même à l’époque du général Aoun, certains de nos compagnons de route étaient en contact permanent avec Walid Joumblatt. La situation n’est pas telle qu’on essaie de la présenter. » Il ajoute que son nom n’est pas mal accueilli au niveau de l’électorat du Hezbollah ou du PSP : « Je ne les effraie pas, contrairement aux idées reçues de certains, qui nous accusent de mener une campagne chrétienne. »
Son dernier mot, Hikmat Dib le destine aux jeunes : « Hier, j’ai tenu une conversation sur Internet, sur le site “Loubnan al-Mouwahadd” avec des jeunes émigrés. J’ai souhaité que leur absence du pays ne s’éternise pas et qu’ils reviennent un jour au Liban. C’est pour eux que je mène ma campagne. Et pour ceux qui restent coûte que coûte, malgré les difficultés croissantes de la vie quotidienne. Je connais leurs angoisses : c’est pour eux que je me bats. »

Michel HAJJI GEORGIOU
Depuis sa désignation, il y a près d’un mois, par le Courant patriotique libre (CPL-aouniste) comme candidat au siège maronite vacant après la disparition du député Pierre Hélou à Baabda-Aley, Hikmat Dib est sous le feu des projecteurs. Depuis le début des années 1990, M. Dib, qui est ingénieur de profession, a fait surtout un parcours de militant, à différents niveaux....