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Dimane - Le quatrième appel des prélats réclame la fin de la tutelle syrienne Les évêques maronites pressent les jeunes à ne pas perdre espoir et à contribuer au redressement

L’Assemblée des évêques maronites, réunie hier matin à Dimane (Liban-Nord) sous la présidence du patriarche maronite, le cardinal Nasrallah Sfeir, a rendu public son quatrième appel (depuis l’an 2000) axé, comme les précédents, sur les grands problèmes nationaux auxquels est confronté le pays. Le document dresse un tableau particulièrement sombre – et réaliste – de la situation qui prévaut dans les divers domaines de la vie socio-économique ainsi qu’au niveau politique. Le communiqué souligne, toutefois, que cette situation n’est nullement désespérée. L’Assemblée des évêques lance à ce propos un message d’espoir, invitant, notamment, les jeunes à apporter leur contribution au redressement requis sur la scène locale. Abordant le problème de la souveraineté et de l’indépendance, l’Assemblée des évêques souligne la nécessité de mettre fin à la tutelle syrienne, affirmant que celle-ci porte préjudice aussi bien au Liban qu’à la Syrie. Nous reproduisons ci-dessous le texte de ce quatrième appel des prélats maronites :
« Il y a un an, nous avions rendu public un appel dans lequel nous avions évoqué les appréhensions des Libanais, mettant l’accent sur ce qu’ils endurent du fait de la politique qui consiste à diviser pour régner. Nous avions fait état des promesses faites aux Libanais concernant la corruption, la dilapidation des fonds publics et les ingérences de la politique dans l’action de la justice. Si nous effectuons un bilan des développements survenus sur la scène libanaise, nous constatons que la situation ne fait que se détériorer, de l’aveu même d’anciens responsables qui affirment que l’État n’existe pas, qui dénoncent la corruption et qui déplorent le fait que nul n’est contraint de rendre des comptes. Cette situation nous pousse à lancer ce quatrième appel, dans l’espoir que ceux qui détiennent le pouvoir de décision prennent les mesures aptes à mettre un terme à la tragédie libanaise. »
Le communiqué des prélats maronites aborde sur ce plan les points suivants :
« 1 - La corruption de l’Administration et la négligence.
La population dénonce depuis longtemps la corruption de l’Administration. Certains fonctionnaires se font les complices des citoyens pour priver l’État de certains de ses revenus en encaissant des pots-de-vin. Les précédentes tentatives de réforme ont été vouées à l’échec. Nous espérons que cette fois-ci, la volonté de réforme aboutira aux résultats escomptés en vue de régler les problèmes suivants :
* L’électricité : les fonds publics sont dilapidés en raison des commissions qui sont versées, sans compter que les administrations publiques et les abonnés dans diverses régions s’abstiennent de régler leurs factures.
* Les caisses (étatiques) : les fonds publics y sont dilapidés sans que nul ne réclame des comptes. Tel est le cas, notamment, de la Caisse des déplacés qui a coûté à l’État d’importantes sommes, sans pour autant que les déplacés ne réintégrent leurs villages.
* La recherche de marchés pour l’exportation des fruits : les agriculteurs se plaignent du fait que leurs produits ne sont pas écoulés. L’État n’est-il pas en mesure d’imposer l’exportation (de produits libanais) comme condition à l’importation ?
* L’affaire du gravier : cette question a fait l’objet de multiples accusations. Certaines parties ont même été jusqu’à se demander pourquoi le gravier n’est pas importé de Grèce plutôt que de Syrie, la qualité du gravier importé n’étant pas, semble-t-il, adéquate. Le Liban serait-il formé uniquement de plaines, à tel point qu’il n’y aurait pas de gravier dans le pays ?
* Le problème des autobus (de transport en commun) : les grands autobus ont été autorisés à utiliser le mazout, contrairement aux véhicules moyens, ce qui a poussé les conducteurs à crier à l’injustice.
* Les taxes : elles ne cessent d’augmenter et constituent un poids pour toutes les fractions de la population, alors qu’elles devraient être fonction du degré de richesse.
2 - La déterioration de la situation.
* Au plan économique : la dette supportée par les citoyens s’élève à près de 35 milliards de dollars et l’État continue de s’endetter sans essayer de payer une partie des intérêts qui se chiffrent à près de 3 milliards de dollars par an.
* Au plan social : le chômage grandissant pousse les jeunes à émigrer. C’est le cas, notamment, de ceux qui sont détenteurs de diplômes universitaires.
* Au plan financier : l’affaire de la banque el-Madina illustre le fait que le secteur bancaire n’est pas totalement à l’abri, en dépit de toutes les mesures de précaution qui ont été prises à ce propos.
* Au niveau politique : les tiraillements entre les pôles du pouvoir paralysent l’action gouvernementale et donnent lieu parfois à des conflits d’ordre confessionnel. Cette situation donne l’impression que les Libanais ne sont pas en mesure de se gouverner eux-mêmes.
* Au niveau sécuritaire : les vols se multiplient dans toutes les régions et jusqu’à présent, aucune lumière n’a été faite au sujet de certains crimes dont ont été victimes des citoyens, notamment des personnes qui avaient une place au soleil dans la société.
* Sur le plan national : depuis longtemps, les Libanais réclament l’adoption d’une loi électorale qui leur permettrait d’élire leurs représentants. L’État s’est habitué à élaborer une loi électorale quelques semaines seulement avant le scrutin, ce qui empêche les forces vives du pays d’exprimer leur opinion à ce propos. Une telle attitude (de la part de l’État) n’est en aucune façon saine. »

Les raisons
de la dégradation
Le communiqué des évêques maronites énumère ensuite les principaux facteurs qui ont abouti à la dégradation de la situation dans les différents domaines susmentionnés. Le communiqué expose comme suit ces facteurs :
« * Le manque de sentiment national, plus particulièrement chez ceux qui font prévaloir leurs intérêts personnels au détriment de l’intérêt supérieur du pays, sans compter ceux qui s’appuient sur les non-Libanais pour accéder à des postes ou marquer des points face à leur adversaire.
* L’effritement des partis et des associations civiles, pour satisfaire les intérêts de certains responsables (de ces partis et associations) ou pour obtenir des acquis matériels ou moraux.
* L’apparition chez les jeunes d’un certain fanatisme, ce qui laisse craindre un retour au climat qui caractérisait la période de la guerre libanaise.
* Le sentiment qui s’est emparé d’une partie des citoyens qui ont l’impression qu’ils sont indésirables dans leur pays, ce qui les pousse à déserter la Fonction publique. Ces citoyens sont, en outre, poursuivis dès qu’ils tentent d’exprimer leur opinion, et la justice est utilisée comme instrument afin d’atteindre cet objectif.
* La non-application, ou l’application sélective, de nombreuses clauses de l’accord de Taëf, ce qui pousse les citoyens à s’interroger sur les critères qui dictent le comportement du pouvoir.
* Le manque de considération à l’égard des valeurs humaines et religieuses et l’esprit mercantile qui s’est emparé de certaines parties. »

Tutelle syrienne
et message d’espoir
Le communiqué invite, d’autre part, les jeunes à « ne pas perdre espoir en leur pays durant les moments difficiles, d’autant que la patrie, comme l’individu, traverse parfois des phases difficiles et parfois des périodes heureuses ». « Les jeunes, souligne le texte, doivent aider le pays à surmonter les difficultés auxquelles il est confronté. »
Le communiqué aborde, enfin, le thème de l’indépendance et de la souveraineté. « Ce qui manque au Liban, c’est d’assumer lui-même ses responsabilités, souligne sur ce plan le communiqué des prélats maronites. Cela le prive de multiples bienfaits qui auraient pu profiter à ses voisins arabes, notamment à la Syrie avec qui il est intimement lié historiquement et géographiquement. Le droit de voisinage et l’amitié impliquent le respect du voisin, de ses intérêts et de ses particularités, et le maintien des meilleures relations. Mais nul n’accepterait, tant qu’il possède un tant soit peu de raison, de rester sous tutelle toute sa vie. Cette tutelle qui se poursuit depuis 27 ans fait sentir aux Libanais qu’ils sont incapables d’assumer leurs responsabilités. Ce qui porte préjudice au Liban et à la Syrie. Nul n’ignore que le Liban est en train de se dissoudre progressivement dans les pays d’émigration et perd peu à peu ses fondements. Il devient impossible de rendre quiconque responsable et de réclamer des comptes. Une telle situation risque de mener à la disparition du pays. »
En conclusion, les évêques maronites lancent un message d’espoir, en dépit du sombre tableau qu’ils ont dépeint. « La situation du Liban n’est pas sans espoir, souligne le communiqué. En comparaison avec son environnement, le Liban continue de jouir relativement d’un certain climat de sécurité et de paix. La plupart des Libanais, s’ils ne sont pas soumis à des ingérences, désirent vivre ensemble comme l’ont fait leurs ancêtres, dans un climat de coopération et de dignité. Certes, de nombreux obstacles persistent mais la volonté et la détermination à surmonter les difficultés donnent bon espoir de réaliser toutes les aspirations. »
L’Assemblée des évêques maronites, réunie hier matin à Dimane (Liban-Nord) sous la présidence du patriarche maronite, le cardinal Nasrallah Sfeir, a rendu public son quatrième appel (depuis l’an 2000) axé, comme les précédents, sur les grands problèmes nationaux auxquels est confronté le pays. Le document dresse un tableau particulièrement sombre – et réaliste –...