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ÉLECTRICITÉ Un problème aggravé par une négligence chronique

Les responsables concernés par la crise de l’électricité n’auraient-ils pas pu trouver une solution, ne serait-elle que provisoire, sans que le chef de l’État ait besoin d’intervenir en personne, pour les réunir à Baabda ? N’y avait-il pas moyen de rassurer les gens, au lieu de les paniquer en annonçant que le pays allait être plongé dans le noir ? Les Libanais peuvent-ils encore supporter les frais, devenus très lourds, des abonnements à des générateurs de quartiers ? Les produits, dans des réfrigérateurs condamnés, vont s’avarier. Et les derniers villégiateurs arabes s’enfuir.
En fait, les Libanais se trouvent placés devant la brutale alternative suivante : ou le retour à la chandelle ou le relèvement des tarifs au compteur. Une hausse qui a été accueillie, lorsque l’EDL en a parlé, par un refus unanime. En principe, pour éviter la pénurie, les Libanais vont devoir assumer une considérable surcharge des dettes qui les accablent.
Un ancien ministre, qui connaît le dossier sur le bout des doigts, souligne qu’on aurait dû soigner le mal à ses débuts, il y a une dizaine d’années. Car les causes sont toujours les mêmes. D’abord, un manque de liquide pour se procurer des dérivés du pétrole. À quoi s’ajoutent la gabegie et les contrats tordus. D’où un déficit financier traité immanquablement de la même manière déraisonnable : des avances du Trésor, que le ministère des Finances consent à contrecœur, pour ne pas être accusé de provoquer une coupure définitive du courant. Puis la faute récurrente : le refus de payer de plus de 50 % des consommateurs, dont bon nombre volent le courant. En étant assurés de l’impunité, grâce à des protections politiques. De plus, l’équipe de percepteurs est réduite, sans compter que certains d’entre eux ne se mettent en mouvement que tous les trois mois à peu près.
L’histoire se répète dès lors, depuis des années, avec toujours les mêmes épisodes : des tankers qui attendent en rade qu’on les paie, pour décharger leur fuel ou leur mazout. Pendant que le rationnement fait rage. Les gouvernements successifs n’ont fait que gérer la crise, en fermant les yeux sur la corruption ambiante, sans jamais réagir sur le fond. Le chef de l’État a décidé, pour sa part, de prendre le problème à bras le corps, de lutter contre les pourris et les corrupteurs. L’ancien ministre cité se demande toutefois comment on peut espérer régler la crise de l’électricité. Est-ce en s’endettant encore, dans l’espoir que l’EDL assainisse progressivement ses finances et soit en mesure de rembourser ses créances ? L’office devrait à cet effet faire fonctionner ses turbines à gaz, améliorer la perception, recouvrer les arriérés qui lui sont dus et se nettoyer de ses éléments pourris. Pour devenir enfin cessible, dans le cadre du programme de privatisations. Mais à qui va-t-on réclamer des comptes et à partir de quelle date ? se demande le ministre. Peut-on remonter à l’origine de la crise, jusqu’à 1990, voire jusqu’à 1985, et interroger les ministres de l’Énergie, les directeurs généraux de leur département et de l’EDL qui se sont succédé ? Doit-on poser des questions à ceux qui, en Conseil des ministres, avaient approuvé des contrats douteux, tout au long de ces années ? La logique d’enquête et l’équité le voudraient, mais ce ne serait évidemment pas réaliste, ni faisable. Ne serait-ce que parce qu’une telle opération serait interprétée comme un règlement de comptes politique vindicatif.
En fait, ce que les Libanais veulent surtout, c’est que les autorités trouvent un règlement durable à la crise de l’électricité. Tout en souhaitant que désormais, la loi soit vraiment appliquée à tous, sans discrimination. Il va falloir attendre la séance du Conseil des ministres de ce jeudi pour savoir si le pouvoir va être capable de proposer une solution de fond. Ou s’il va encore recourir à des palliatifs qui ne font qu’alourdir la dette publique. Le vice-président du Conseil, Issam Farès, presse cette instance de consacrer à la crise de l’électricité, ainsi qu’à d’autres questions comme la réforme, un séminaire ou des sessions ouvertes. Cet appel au travail sérieux sera-t-il entendu ?

Émile KHOURY
Les responsables concernés par la crise de l’électricité n’auraient-ils pas pu trouver une solution, ne serait-elle que provisoire, sans que le chef de l’État ait besoin d’intervenir en personne, pour les réunir à Baabda ? N’y avait-il pas moyen de rassurer les gens, au lieu de les paniquer en annonçant que le pays allait être plongé dans le noir ? Les Libanais...