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COLLOQUE - 25e congrès du Melcom, organisé par la Bibliothèque orientale et l’Orient Institut Le patrimoine écrit irakien dans la tourmente, crainte et espoir pour le livre libanais

Quelle est la situation des bibliothèques au Liban ? Comment adapter les nouvelles technologies dans ce domaine ? Comment se fait l’étude des manuscrits et des collections rares dans les différents pays ? Quel va être le sort des bibliothèques et archives en Irak ?
Des questions aussi diverses que cruciales sont au programme du 25e congrès annuel du Melcom (Association européenne des bibliothécaires du Moyen-Orient) inauguré hier au théâtre Monnot. Il est organisé par l’Orient Institut der Deutschen Morgenländischen Gesellschaft et la Bibliothèque orientale de l’Université Saint-Joseph. Les conférences auront lieu dans les deux institutions.
La séance inaugurale s’est déroulée en présence de l’ancien ministre de la Culture, M. Ghassan Salamé ; du recteur de l’USJ, le RP Sélim Abou ; ainsi que de MM. Manfred Kropp, directeur de l’Orient Institut ; Arnould Vrolijk, président du Melcom ; Wolf-Dieter Lemke, du Orient Institut et Mme May Semaan Seigneurie, directrice de la Bibliothèque orientale.
« Une longue tradition de coopération lie l’Orient Institut et la Bibliothèque orientale, a souligné le recteur Abou. Elle a été renouvelée dans les années 90 et fait partie d’un traité de coopération entre l’Orient Institut et l’Université Saint-Joseph. « Les deux institutions possèdent des fonds souvent complémentaires et s’intéressent aux mêmes domaines du savoir, d’où leur coordination dans les domaines de l’acquisition et des échanges », a-t-il indiqué, ajoutant qu’il apprécie tout particulièrement le fait que les organisateurs aient consacré la première partie du colloque au sort des bibliothèques en Irak. « C’est un problème grave et qui nous concerne tous dans la mesure où toute atteinte à un patrimoine culturel est une atteinte à la civilisation humaine. »
La première table ronde était ainsi consacrée au sort du patrimoine écrit irakien qui a subi des dommages irréparables après les pillages qui ont suivi la chute du régime de Saddam Hussein et l’entrée des troupes américaines le 9 avril. À la tribune : Geoffrey Roper, de la bibliothèque de l’Université de Cambridge et Sjoerd Koopman, représentant de l’IFLA (Fédération internationale des associations de bibliothécaires et des bibliothèques).
Roper a d’abord cité deux rapports : le premier, un aperçu sur l’état des bibliothèques et dépôts d’archives irakiens par Édouard Méténier de l’Ifapo de Damas. Et le second signé par Graham Shaw, de la British Library. Ces rapports font état du sérieux de la situation.
Il en existe d’autres, a noté le conférencier, insistant sur leur diversité et leurs informations parfois contradictoires. « En réalité, nous ne savons pas ce qui s’est vraiment passé. On pensait que les manuscrits islamiques avaient été brûlés. Mais l’on vient d’apprendre qu’ils étaient regroupés depuis 1988 dans la bibliothèque de Saddam (Dar Saddam lil mahfouzat). Cette collection de près de 40 000 pièces se trouve donc actuellement à l’ abri. »
De plus, le directeur général de l’Unesco annonçait la semaine dernière qu’une équipe de quatre experts envoyée à Bagdad avait noté que les chiffres avancés entre 60 000 à 70 000 pièces volées du musée de la ville étaient inexacts. Il semble à présent qu’il y en ait eu moins de 1 000. « Tout cela reste très flou. L’idéal serait de pouvoir envoyer un spécialiste sur le terrain pour recueillir des informations exactes sur l’état des choses », a conclu M. Rooper en se disant prêt à toutes les suggestions.
M. Koopman a ensuite pris la parole pour exposer les objectifs de l’IFLA. Il a présenté le programme Bouclier bleu, constitué par les ONG représentant les archives (ICA), les bibliothèques (IFLA), les monuments et les sites (ICOMOS) et les musées (ICOM). Toutes les parties concernées se sont engagées à faire tout leur possible afin de protéger le patrimoine culturel irakien et empêcher des dommages supplémentaires. Les États-Unis se sont attiré les critiques des intervenants, car lors des pillages, les troupes américaines n’étaient pas intervenues pour protéger les collections riches de quelque 170 000 pièces.
Mais, l’on s’en doute, le sujet n’est pas clos. Les participants ont proposé de regrouper les suggestions dans un plan d’action à publier avec les recommandations du colloque. Par ailleurs et toujours à propos de l’Irak, à noter la projection, ce soir, à 19h, d’un film d’Amal al-Jubouri et Jawad al-Hattab.

Travail fastidieux
« Le projet de la Bibliothèque nationale du Liban » : c’est avec ce sujet, aussi passionnant qu’alarmant, que Maud Stephan-Hachem, responsable du projet de réhabilitation de la Bibliothèque nationale, a ouvert la deuxième série de conférences qui s’articulaient autour du thème « Situation de la bibliothèque au Liban ». Évoquant « les difficultés à rebâtir une bibliothèque nationale détruite », elle brosse un panorama détaillé de l’entreprise de reconstruction, commencée dès 1991 et poursuivie jusqu’à aujourd’hui, avec l’espoir d’être achevée en 2006.
Avec une minuscule équipe de huit personnes, 11 000 ouvrages ont été triés, nettoyés, leurs couvertures digitalisées et des informations sommaires sur les livres ont été saisies. Le travail à effectuer est encore lourd et fastidieux, et la conférencière rappelle quelques handicaps de taille : l’absence d’inventaire pour la collection moderne, répartie en quelque 34 000 caisses largement endommagées par les déménagements successifs ; l’inexistence d’une structure administrative reconnue ; absence d’équipe qualifiée.
Elle conclut en rappelant que
« depuis l’arrivée du nouveau gouvernement, les travaux engagés sur le site provisoire de l’école de droit de l’Université libanaise, à Sanayeh, ont été interrompus. De plus, la Commission européenne doit tenir son engagement de signature de convention financière. »

Espace et lacunes
Antoine Saliba, quant à lui, a évoqué « La Bibliothèque orientale : histoire et orientations actuelles ». Les principales difficultés de cette institution, fondée en 1880 à Ghazir par le père Louis Cheikho et qui contient 200 000 titres dans les domaines, entre autres et pour les plus importants, de l’histoire, de la religion et de l’archéologie, concernent d’une part la protection des manuscrits, une opération commencée en 2000 par une désinfection générale ; la redistribution des fonds d’autre part, avec une protection préventive des ouvrages. Alors que l’informatisation des données a débuté dès 1992, Antoine Saliba relève les deux efforts à effectuer le plus rapidement possible : la gestion de l’espace, qui devient de plus en plus étroit, ainsi que le rattrapage des lacunes de mise à jour de la collection moderne, présentes depuis près de 25 ans.

Le millénaire
de la bibliothèque de l’AUB
Beaucoup plus enthousiaste et sereine a été l’intervention de Samira Rafidi Meghdessian, intitulée « The University Libraries at the American University of Beirut : gearing up for the millenium » (les bibliothèques académiques de l’AUB : en route pour le millénaire). À la pointe de la technologie pour des milliers d’étudiants, de professeurs et de chercheurs, la bibliothèque académique de l’Université américaine est une des plus grandes de la région arabe. Comme ses collègues, la responsable de ces institutions relève le manque évident de bibliothécaires et d’assistants (l’équipe actuelle comprend à peine 20 personnes), mais souligne l’avance prise dans les domaines de la conservation, de l’archivage et du renouvellement des fonds, allant de pair avec une informatisation massive qui se fait forte de mettre un maximum de documents à la portée du plus grand nombre (par exemple, à travers l’adresse Web http://www.staff.aub.edu.lb/˜webjafet/special.html). Comme le souligne la conférencière, « l’un des buts principaux de l’institution est de servir d’intermédiaire entre le local et l’international, grâce à une digitalisation des documents, devenue pour nous prioritaire ».

Le programme
d’aujourd’hui
– 9h-10h45, « Études de manuscrits et ouvrages rares » : Tilman Seidensticker (Université de Jena, Allemagne), « Le développement des miniatures du Coran » ; Zeina Genadry (Bruxelles), « Une reliure laquée de Herati » ; OlgaYastrebova (Bibliothèque nationale de Russie), « Un manuscrit curieux du XVIe siècle contenant les brouillons de deux textes anonymes » ; Cihan Okuyucu (Université Fatih, Istanbul), « Signification de “Vekayi-i Ali Pasa” de Kelami selon le point de vue de la poésie classique turque ».
– 11h-12h15, « Études de manuscrits et ouvrages rares » : Kamaruzzaman Yusoff (Université nationale de Malaisie), « “Zubdat ikhtisar tarikh Misr al-mahrusa” et le fragment, retrouvé à Paris, de l’histoire de l’Égypte ottomane du XVIIe siècle » ; Stoyanka Kenderova (Bibliothèque nationale, département oriental, Bulgarie),
« La bibliothèque d’Osman pacha, wali de Beyrouth et de Saïda » ; Jamileh Osti (Centre de documentation et des études orthodoxes antiochiennes, Balamand), « Le catalogage et l’accès aux archives de l’évêché des grecs-orthodoxes de Beyrouth ».
– 14h-15h15, « Études de manuscrits et ouvrages rares » : Sebah Muhssin (Université de Benghazi, Libye), « Conservation et restauration des collections de manuscrits et des archives dans les bibliothèques et les centres d’archives à Bagdad » ; Youssef Zeidan (Bibliothèque Alexandrina, Égypte),
« Héritage des projets de renaissance à la Bibliothèque Alexandrina » ; Asma Fathallah (Bibliothèque Jafet, AUB), « Manipuler avec précaution : les manuscrits dans les bibliothèques de l’AUB ».
– 15h15-16h30, « Études de manuscrits et ouvrages rares » : Souad Slim (Université de Balamand), « Le rôle de l’université de Balamand dans la préservation du patrimoine culturel et religieux des chrétiens arabes du patriarcat d’Antioche » ; Olga Vasilyeva (Bibliothèque nationale de Russie, département des manuscrits),
« Manuscrits chrétiens arabes de la bibliothèque nationale de Russie : valeur historique et histoire de son acquisition » ; Katherine Gill (St. John’s University, États-Unis), « Le projet en Méditerranée orientale de la Hill Monastic Manuscript Library de l’université St. John ».
– 16h45-18h, « Études de manuscrits et ouvrages rares » : Dmitri Osipov (Centre d’études orientales, Bibliothèque de la fédération russe pour la littérature étrangère, Moscou), « Manuscrits arabes, persans et turcs des collections de Moscou à travers le catalogue électronique » ; Andrew Peacock (Université de Cambridge, Angleterre), « Les manuscrits islamiques (historiques et géographiques) non inventoriés de la bibliothèque de l’université de Cambridge » ; Muhammad Isa Waley (British Library, Londres), « Les trésors cachés de Birmingham ».

M.G.H.
D.G.
Quelle est la situation des bibliothèques au Liban ? Comment adapter les nouvelles technologies dans ce domaine ? Comment se fait l’étude des manuscrits et des collections rares dans les différents pays ? Quel va être le sort des bibliothèques et archives en Irak ? Des questions aussi diverses que cruciales sont au programme du 25e congrès annuel du Melcom (Association...