Rechercher
Rechercher

Actualités

Les haririens souhaitent un statu quo prolongé Un armistice interne sous haute surveillance syrienne

L’équation, soulignée par Damas : du moment que la situation dans la région n’est pas calme, il faut que la scène libanaise le soit. Ce message, assorti d’une étroite surveillance, a été capté cinq sur cinq par les dirigeants locaux. Comme en atteste le dernier Conseil des ministres, aucun d’entre eux n’envisage de prendre la responsabilité de rompre les scellés et d’indisposer les décideurs.
Selon des sources fiables, Hariri souhaite, pour sa part, voir la trêve durer jusqu’au début de l’été 2004. C’est-à-dire jusqu’au début de l’entrée en campagne pour la présidentielle. Il se mettrait de la sorte à l’abri d’un changement de cabinet que la persistance des querelles au sein du pouvoir pourrait justifier. Les tiraillements seraient intolérables en regard des intérêts du pays s’ils devaient continuer pendant des mois. Par contre, ajoutent ces sources, il ne serait pas anormal, ni autant préjudiciable, de déterrer de nouveau la hache de guerre pendant les quelques semaines précédant l’échéance présidentielle. Le moment des grandes, et dernières, explications serait alors venu.
Toujours selon ses proches, Hariri est donc prêt à inscrire au compte secondaire des pertes et profits les revers politiques, ou les défenses plus ou moins réussies, relatifs aux dossiers litigieux. Dont on peut citer les expropriations, la révision de la loi les concernant, les privatisations dont le cellulaire, la titrisation, le mouvement diplomatique, la relecture de certains articles de la Constitution touchant aux prérogatives ou l’adoption en cette matière des us et coutumes. En réalité, il espère pouvoir, dans cette question comme dans d’autres, renverser la vapeur en sa faveur si d’aventure il gagnait la bataille de la présidentielle. C’est-à-dire que s’il parvenait à faire élire un candidat selon son cœur, il obtiendrait sans doute ensuite l’annulation ou la correction des décisions contraires à ses vues. Il cesserait alors d’accepter à contrecœur que, sur le plan fondamental des prérogatives, on continue à faire prévaloir les us et coutumes, pour exiger un strict respect des textes constitutionnels. En attendant, il se garde de polémiquer sur ce point avec les ministres ou députés soucieux de promouvoir l’influence du régime.
Selon les mêmes sources, Hariri a accepté les handicaps, ou même les sacrifices, que la trêve lui impose parce qu’il est véritablement convaincu que la sauvegarde de la stabilité intérieure est une priorité absolue. Il pense néanmoins qu’au bout du compte, tout le monde en viendra à la conclusion qu’il faut s’en tenir à la Constitution, sans qu’aucune partie ne se considère comme gagnante ou perdante. Dans ce cadre même, Hariri n’admet pas le point de vue selon lequel en cas de conflit, c’est le chef du gouvernement qui doit démissionner du moment que son siège est éjectable alors que le régime est inamovible. Pour lui, en effet, seul le Parlement, en lui déniant la confiance, peut faire sauter le cabinet. Qui, par ailleurs, peut imploser constitutionnellement au cas où le tiers de ses membres rend son tablier.
Mais cette position marquée est pour plus tard. Pour l’heure, répètent les mêmes sources, Hariri est résolu à dissiper les tensions en s’inclinant devant la volonté de la majorité ministérielle, qu’elle s’exprime à l’amiable ou par un vote. Dans le même esprit, les échanges contradictoires au sein du Conseil des ministres, tout à fait normaux quand il s’agit de questions offrant des approches distinctes, ne doivent pas prendre une tournure personnelle. Chaque partie, chaque protagoniste, doit accepter de bon cœur des décisions qui lui sont contraires, et non les prendre pour autant de camouflets cuisants dont il faut exiger réparation.
Le ministre Ghazi Aridi souligne à ce propos que le Conseil des ministres n’est pas le gouvernement d’un seul parti, d’un seul président ou d’une seule fraction. C’est une formation de coalition regroupant des forces politiques aux vues variées. Avec sans doute un plafond commun soutenu par des principes généraux, mais étalé sur des opinions différentes en ce qui concerne la gestion des affaires publiques et le traitement des problèmes.
Revenant de son côté sur la crise antérieure, le ministre Farès Boueiz relève qu’elle découlait du lien entre les sujets débattus et les vues respectives du chef de l’État comme du président du Conseil. Ce qui provoquait cette anomalie : toute position des ministres était considérée sous l’angle de sa proximité avec les vues du régime ou avec celles du chef du gouvernement. Tout était intégré dans un climat conflictuel. Ce qui était inadmissible, ajoute-t-il, car la présidence de la République est de par nature au-dessus de toute mêlée. Dans la même logique, l’on avait tort d’interpréter une position déterminée comme étant dirigée contre la présidence du Conseil. Bref, l’objectivité était battue en brèche. Farès Boueiz souligne cependant qu’il y a un certain nombre de ministres organiquement liés à la présidence de la République ou à la présidence du Conseil. Leur attitude, pendant la crise, était politique et non objective. Les partisans du régime en approuvaient les recommandations, même si elles pouvaient heurter leurs convictions propres, et de même dans le camp d’en face. Pour Boueiz, il est élémentaire de dire que le Conseil des ministres ne doit pas être un champ de bataille avec des tranchées. Pour fonctionner en tant qu’autorité exécutive, le Conseil ne doit pas être conçu comme un amalgame détonant de forces antagonistes, mais comme une autorité cohérente. Faute d’une telle unité, les secousses frappent de plein fouet le pays socio-économique. Boueiz plaide donc pour l’objectivité autonome. Au sujet d’un projet de troisième force au sein du Conseil, il reconnaît que l’idée peut paraître séduisante, dans la mesure où elle traduit justement un souci de faire prévaloir l’objectivité sur le partisanisme. Mais il précise que lui-même y est opposé parce qu’à son avis il ne faut pas encore rajouter des camps distinctifs au sein d’une instance qui ne doit pas être divisée en blocs.
Émile KHOURY
L’équation, soulignée par Damas : du moment que la situation dans la région n’est pas calme, il faut que la scène libanaise le soit. Ce message, assorti d’une étroite surveillance, a été capté cinq sur cinq par les dirigeants locaux. Comme en atteste le dernier Conseil des ministres, aucun d’entre eux n’envisage de prendre la responsabilité de rompre les scellés et...