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Conditions US pour une « feuille de route » sur le volet syro-libanais

Des entretiens entre le délégué européen Moratinos et les autorités locales il ressort que les États-Unis ne sont pas disposés à permettre l’élaboration d’une « feuille de route » séparée pour le volet syro-libanais. Plus exactement, Washington conditionne son feu vert à la réalisation de ses exigences itératives. D’autant qu’à son avis, ces exigences permettent de conforter un climat d’ensemble propice à un règlement du principal problème régional, le conflit israélo-palestinien.
Dans le même sens, il se confirme que lors d’un récent échange téléphonique avec Assad, Colin Powell a rappelé sommairement les revendications de son gouvernement, avant de souligner qu’il est grand temps pour Damas de prendre clairement position à cet égard. En laissant entendre que seule une attitude franchement positive pourrait encourager la reprise des négociations syro-israéliennes et israélo-libanaises sur base d’un document spécifique. Ce qui n’interviendrait toutefois qu’après un constat de progrès significatifs dans l’exécution de la « feuille de route » consacrée au contentieux israélo-palestinien.
Le président Assad a répondu, indiquent des sources fiables, que la Syrie est disposée à répondre favorablement aux attentes américaines. Mais en base des mécanismes qui lui semblent appropriés ainsi que suivant un timing évolutif déterminé en fonction de chaque demande US prise à part. Le chef de l’État syrien a redit à son interlocuteur que la paix doit être globale et non pas fragmentée ou partielle. En soulignant qu’il faut prévoir une « feuille de route » pour la Syrie et le Liban en tant qu’États directement concernés par le processus de règlement régional, sur lequel d’ailleurs ils influent par la force des choses. La même position a été certifiée à Moratinos par le président Lahoud. Qui a souligné, en substance, que « le Liban et la Syrie œuvrent pour la paix. Ils encouragent toute initiative visant à redonner sécurité et stabilité aux pays comme aux peuples de la région. La dégradation dans les territoires palestiniens risque de compliquer la situation au point de torpiller les chances qui s’offrent pour la relance du processus de paix ». Le président de la République a exprimé l’espoir que la réunion du quartette demain dimanche « permette d’ouvrir une brèche dans le mur compact dressé devant les travaux du comité par les positions d’escalade qu’adoptent des dirigeants israéliens, qui ne veulent manifestement pas d’une paix équitable. Et qui misent sur le facteur temps pour saborder les efforts déployés en vue de les convaincre d’intégrer la marche vers la paix ».
L’émissaire européen a répondu qu’au besoin, des pressions politiques seraient exercées sur Israël. Ainsi que des pressions économiques, qui devraient avoir de l’effet, à cause des difficultés dans lesquelles l’État hébreu se trouve plongé depuis le début de la deuxième intifada. Difficultés sensibles dans le domaine du tourisme, comme au niveau des investissements et de la croissance. Pour Moratinos, il y aurait donc moyen d’influer sur Sharon pour l’amener à faire des concessions. Un Sharon qui souligne volontiers que si lui-même ne parvient pas à conclure la paix avec les Arabes, nul autre dans son pays ne le pourrait.
Le fait est que son gouvernement, après avoir tenté d’introduire de multiples amendements à la « feuille de route », y a finalement renoncé, acceptant le texte tel quel. Mais tout est dans l’exécution. Des pressions sont exercées à cette fin sur tous les protagonistes. Colin Powell multiplie les rencontres avec les dirigeants israéliens et palestiniens pour faire avancer les choses. Les chances de succès ou les risques de fiasco devraient se décanter dans les prochains jours.
Au stade actuel, les questions d’ordre pratique restent nombreuses. Va-t-on, comme le suggèrent Annan et l’Europe, installer une force-tampon internationale entre les Israéliens et les Palestiniens ? Les Casques bleus, déployés dans les Territoires, permettraient-ils à l’Autorité palestinienne de mieux se consacrer à renforcer ses propres capacités de sécurité ? Va-t-on pouvoir accélérer la création d’un État palestinien, étant entendu que l’actuel gouvernement d’Abou Mazen n’est pas en mesure de contrôler le terrain ? Ce sont là des points essentiels, vu qu’Israël n’accepte de débloquer la « feuille de route » qu’à la condition sine qua non d’une neutralisation des actions violentes du Hamas comme du Jihad islamique ou du FPLP.
Pour en revenir au volet syro-libanais, un diplomate indique que les deux pays, tout en réclamant leur propre « feuille de route », savent qu’il va falloir attendre des résultats du côté israélo-palestinien. Car la réouverture de négociations syro-israéliennes, tout comme la réalisation des demandes américaines, serait facilitée par des progrès dans les Territoires. En effet, la fermeture des bureaux des organisations radicales palestiniennes à Damas et même le retrait syrien du Liban iraient pratiquement de soi une fois l’horizon dégagé. De même, le désarmement du Hezbollah pourrait être sérieusement envisagé une fois la feuille réservée au volet syro-libanais mise en route. Ce document établirait en effet les lignes de retrait au Golan comme à Chebaa, la récupération pouvant alors se faire par la négociation et non plus par les armes.
Par contre, souligne la même personnalité, s’il devait y avoir une impasse ou une explosion sur le front israélo-palestinien, il n’y aurait plus de raison de fermer les bureaux palestiniens à Damas. Ni de précipiter le retrait syrien du Liban et encore moins de désarmer le Hezbollah. Cependant, ajoute le diplomate, on se retrouverait alors dans une situation extrêmement dangereuse, Israël pouvant recourir à la force pour pousser les Palestiniens des Territoires à l’exode. Mais, d’autre part, les Américains ont de plus en plus besoin de l’Europe et de l’Onu, comme des États voisins de l’Irak, pour se désembourber dans ce pays. Surtout que Bush cherche à marquer des points dans la perspective de sa réélection.

Émile KHOURY
Des entretiens entre le délégué européen Moratinos et les autorités locales il ressort que les États-Unis ne sont pas disposés à permettre l’élaboration d’une « feuille de route » séparée pour le volet syro-libanais. Plus exactement, Washington conditionne son feu vert à la réalisation de ses exigences itératives. D’autant qu’à son avis, ces exigences...