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Le Liban face à trois préoccupations majeures : la présidentielle, le problème régional et la récession

C’est avec inquiétude que ce pays envisage la présidentielle, les complications régionales et la dépression économique. L’ancien ministre Ghassan Salamé répercute les appréhensions des Libanais en relevant en substance, dans un entretien radiophonique, que « si l’on ne traite pas comme il convient la conférence de Paris II et le programme de privatisations, nous allons nous retrouver au prochain automne exactement au point où nous en étions l’automne précédent. C’est-à-dire dans une situation difficile et préoccupante ». Cela signifie que le gel des projets à cause du conflit entre les présidents risque de replonger le pays dans un climat inquiétant, sur le plan de la subsistance comme des finances, avec tous les dangers que cela peut entraîner pour la stabilité de la monnaie nationale. En d’autres termes, la paralysie, instaurée pour éviter l’explosion entre les dirigeants, peut se révéler d’un prix plus lourd que la tentative de régler le contentieux une fois pour toutes, d’une manière ou d’une autre.

Il y a quelque temps, une phase providentielle d’harmonie entre les présidents avait permis la réussite de Paris II. La reprise de leur bras de fer menace de torpiller ces résultats. Car, on le sait, l’aide promise reste conditionnée par les mesures que le Liban s’est engagé à prendre. Notamment pour ce qui est des privatisations, dont le cellulaire qui doit rapporter, aux termes du projet du budget, un milliard de dollars. Conditions que ce pays n’a toujours pas remplies, à cause de l’antagonisme qui empoisonne ses instances dirigeantes. Il est donc indispensable que les présidents Lahoud et Hariri retrouvent le chemin de l’entente, de la coordination et de la coopération. Pour sauver le Liban de l’effondrement économique et financier. Sinon, comme le souligne le ministre Ghazi Aridi, « tout le monde y perdra, le pouvoir comme le gouvernement, et le Liban payera le prix de la crise de confiance entre Lahoud et Hariri ». Il faut sortir de l’impasse. Car le président Lahoud reste jusqu’à la fin de son mandat, par la force de la Constitution. Et le président Hariri reste également, par la force d’une majorité parlementaire qui ne change que sur consigne extérieure. Les deux hommes doivent donc cohabiter en paix, en recourant le cas échéant à l’arbitrage de la Constitution. Le Conseil des ministres, presque réduit à l’inactivité, est appelé à mettre les bouchées doubles. En multipliant les séances. Et en abordant tous les dossiers. À condition que les deux présidents s’entendent, en toute bonne foi, pour faire passer avant tout l’intérêt national, en condamnant tout esprit de défi mutuel. Les protagonistes concernés par chaque dossier doivent de leur côté se réunir pour essayer, toujours en toute bonne foi, de trouver des solutions à l’amiable. Et s’ils n’y parviennent pas, on recourrait à la procédure de vote en Conseil des ministres. Étant entendu que nul n’y verrait un geste hostile et que tout le monde s’inclinerait devant la volonté de la majorité. Il faut également veiller à empêcher certains ministres de jouer les perturbateurs, pour torpiller les travaux du Conseil, comme ce fut le cas lors de la dernière séance, à propos de la représentation libanaise auprès de la Banque mondiale. En somme, il est nécessaire que le Conseil retrouve sa fonction d’institution et il faut, pour cela, qu’un bon esprit y règne. Certes, le recours à l’urne signifie en pratique que les ministres subiront des pressions, de part ou d’autre, pour voter dans un sens ou dans l’autre. Ils doivent, à ce moment, n’écouter que leur conscience et leur sens de la responsabilité, pour s’exprimer suivant des convictions désintéressées.
Quoi qu’il en soit, le régime ne veut pas terminer son mandat sur une note de blocage, mais de réalisations. C’est pourquoi le président Lahoud annonce qu’il faut que les dossiers conflictuels, générateurs de projets importants, soient étudiés par le Conseil des ministres et ne restent plus sur l’étagère.
Le président Hariri soutient maintenant ce point de vue, car il ne souhaite pas se voir imputer la responsabilité de la paralysie, néfaste pour l’économie.
Mais, bien entendu, cette jonction de principe ne suffit pas. Il faut qu’en pratique la machine se remette à fonctionner sans grincements et sans frictions. Or il existe des ministres déterminés, qui semblent porteurs de bombes à retardement, qu’ils sont prêts à faire sauter en Conseil des ministres au gré de leurs visées. Les dirigeants doivent veiller, ensemble, à neutraliser ces velléités et à insuffler au gouvernement un véritable esprit d’équipe. Pour transformer ce champ de mines en chantier sécurisé de reconstruction. C’est urgent, car du train où l’on va, le déficit budgétaire réel va atteindre des sommets catastrophiques, l’État n’ayant toujours pas assuré les rentrées supplémentaires mentionnées dans le texte prévisionnel. Les tiraillements influent négativement, en outre, sur l’élément de confiance qui est capital dans le domaine économique et financier. Pour sa part l’ancien ministre et actuel député Yassine Jaber rappelle qu’aux termes de la Constitution issue de Taëf, c’est le Conseil des ministres réuni qui dirige le Liban. C’est à cette personne morale qu’il revient de trancher les sujets qui fâchent, car l’économie libanaise ne supporte pas davantage de secousses et de fuites en avant. Le temps presse, souligne-t-il, et il faut sans tarder lancer le plan initial de réforme économique, c’est-à-dire de redressement. Jaber relève, pour conclure, qu’heureusement la Banque du Liban dispose de dix milliards de dollars de réserves et qu’il faut savoir en tirer profit sans épuiser le stock mais en le renforçant. Par le travail général.

Émile KHOURY
C’est avec inquiétude que ce pays envisage la présidentielle, les complications régionales et la dépression économique. L’ancien ministre Ghassan Salamé répercute les appréhensions des Libanais en relevant en substance, dans un entretien radiophonique, que « si l’on ne traite pas comme il convient la conférence de Paris II et le programme de privatisations, nous allons...