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Le ministre palestinien de l’Environnement parle des injustices dont son peuple est victime Eau, arbres, cultures : l’autre guerre d’Israël

Alors que les caméras sont braquées sur les incursions israéliennes quotidiennes dans les territoires palestiniens, sur les destructions de maisons et les meurtres de civils, une autre guerre, sournoise et terrible, a lieu sur cette terre. La question de la surexploitation israélienne des ressources hydrauliques, dont les Palestiniens sont privés, a été au centre des séances de travail des ministres arabes de l’Environnement, qui ont souligné la gravité de la situation. Youssef Abou Safia, ministre palestinien de l’Environnement, présent au Liban pour participer aux réunions avec ses collègues, brosse un tableau très noir des souffrances vécues par son peuple en raison de la dégradation écologique causée par le conflit : manque chronique d’eau, maladies dues à la pollution, vol de terre et de sable, déracinement d’arbres, etc.
« L’eau et l’énergie ont toujours été au centre des préoccupations des Israéliens, depuis qu’ils ont conçu l’idée de fonder un État », affirme M. Abou Safia. « Aujourd’hui, ils surexploitent toutes les ressources, mais surtout l’eau, sans laquelle aucun État ne peut survivre. » M. Abou Safia précise que la quantité d’eau disponible dans toute la Palestine est de 2,1 milliards de mètres cubes par an. « Il y a trois millions de Palestiniens vivant dans la bande de Gaza et en Cisjordanie », poursuit-il. « Ils n’ont accès qu’à 250 millions de mètres cubes par an, soit 10 % de la quantité d’eau totale. Même à l’intérieur des territoires palestiniens, sur les 850 millions de mètres cubes d’eau, Israël s’approprie 700 millions pour ses habitants. »
Comment l’État hébreu empêche-t-il les Palestiniens d’avoir accès à leur eau ? « Il leur interdit de creuser des puits », déclare M. Abou Safia. « Cette politique est en vigueur depuis 1948. On ne nous autorise même pas à planter des arbres qui consomment trop d’eau sur nos propres terres, à moins d’obtenir un permis ! »
Comment le gouvernement palestinien revendique-t-il son droit ? Quel poids a le dossier de l’eau dans les négociations ? « Depuis les accords d’Oslo, ce dossier est continuellement ajourné », révèle-t-il. « Au cours des négociations qui ont eu lieu la semaine dernière, quand (le Premier ministre israélien Ariel) Sharon a prononcé le mot « occupation », l’opposition a été très forte de la part de la presse et des colons, qui lui ont reproché de renoncer à la terre mais aussi à l’eau. »
Il a rappelé qu’« en 1919, celui qui devait devenir le premier président israélien en 1948, Haïm Weizman, a écrit une lettre à Lloyd George, alors Premier ministre de Grande-Bretagne, au moment de la préparation de l’accord de Sikes-Pycot, lui demandant d’élargir le mandat britannique jusqu’au fleuve Awali (Liban-Sud), afin de garantir l’eau du Litani et les cimes enneigées du mont Hermon ».
Selon M. Abou Safia, les Israéliens profitent de leurs incursions en territoires palestiniens, depuis le déclenchement de l’intifada il y a deux ans et demi, pour mener une guerre très particulière : ils détruisent systématiquement les puits d’eau, les réseaux d’eau potable et les arbres. « Comme ils jettent aussi leurs déchets chez nous, l’eau qui nous reste est polluée », poursuit-il. « Ils ont probablement enterré plus de 200 000 tonnes de déchets dangereux dans les territoires palestiniens. Eux ne boivent pas l’eau qu’ils savent sale, ils l’emploient dans l’agriculture et exportent leurs produits en Europe. »
Mais les Palestiniens, eux, n’ont d’autre choix que de consommer de l’eau polluée, déplore le ministre. « Des études menées à Gaza et en Cisjordanie ont montré qu’aucune source d’eau n’était propre », raconte-t-il. « Les enfants, notamment, sont très touchés par ce problème. Nous essayons d’attirer l’attention des mères afin qu’elles préparent le biberon de leur nouveau-né avec de l’eau en bouteille. Nous aidons celles qui sont incapables d’acheter de l’eau afin d’éviter que l’enfant ne grandisse avec des déficiences au niveau du cerveau. »
Il poursuit : « L’eau n’est pas la seule ressource que les Israéliens s’approprient au détriment des Palestiniens. Ils volent également le sable et la terre en dessous, comme ils l’ont fait au Liban-Sud. Le sable est généralement utilisé dans l’industrie, mais il existe une couche de boue en dessous. En mélangeant les deux, ils obtiennent une excellente terre agricole. »
Selon le ministre, les Israéliens emploient la force, et il n’y a aucun moyen de leur faire face dans la situation actuelle. « Tout au long de l’intifada, les bulldozers et les camions n’ont pas arrêté de fonctionner », affirme-t-il. « Cette guerre secrète est plus dangereuse que le conflit déclaré : il s’agit d’une opération de destruction massive. C’est le bulldozer qui détruit les maisons, qui déracine les arbres, et réduit à néant des milliers de mètres carrés de terres agricoles », conclut-il.
S.B.
Alors que les caméras sont braquées sur les incursions israéliennes quotidiennes dans les territoires palestiniens, sur les destructions de maisons et les meurtres de civils, une autre guerre, sournoise et terrible, a lieu sur cette terre. La question de la surexploitation israélienne des ressources hydrauliques, dont les Palestiniens sont privés, a été au centre des séances de...