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Environnement - Un bilan noir dressé par un spécialiste « Le Liban participe à la célébration... en spectateur »

À l’occasion de la Journée mondiale de l’environnement, le Liban accueille d’importants congrès, et beaucoup de discours pompeux sur l’écologie à un niveau mondial sont prévus. Mais puisque l’heure est aux bilans, certains aiment rappeler que les réalisations en matière d’environnement restent minimes, notamment au Liban, et que la dégradation écologique menace notre économie à long terme, notre qualité de vie, notre santé, notre existence même. Un environnementaliste engagé depuis des années dans l’association écologique scientifique Green Line, dont il est actuellement le secrétaire général, Ali Darwiche, dresse un bilan pessimiste d’une situation qu’il a examinée de près. Il constate amèrement que « le Liban participe à une fête internationale, mais en tant que spectateur ».
« Cela fait treize ans que l’on prend pour prétexte les années de guerre pour ne pas adopter des solutions radicales aux différentes questions écologiques, souligne d’emblée M. Darwiche. Or ces problèmes ne disparaissent pas d’eux-mêmes, au contraire, ils vont croissant. Prenons le dossier irrésolu des déchets ménagers par exemple : cela fait dix ans que nous appelons le gouvernement à adopter des solutions faciles à appliquer. Depuis dix ans, il aurait été plus aisé de résoudre cette question. Dans dix ans, elle sera devenue beaucoup plus compliquée. Qu’attendent-ils donc ? »
Parmi les études effectuées par Green Line, l’une d’entre elles, accomplie en collaboration avec Greenpeace, a donné lieu à des chiffres particulièrement éloquents : sur le littoral libanais de 220 kilomètres de long environ, on trouve 58 égouts majeurs se déversant sans aucun traitement dans la mer, sept dépotoirs sauvages, 29 complexes industriels qui fonctionnent sans aucune surveillance, 26 ports et marinas et 81 complexes balnéaires dont certains seulement auraient prévu une station d’épuration des eaux usées.
« Depuis un an surtout, la situation ne cesse d’empirer, constate M. Darwiche. Le dossier des carrières est de nouveau sur le tapis et les sites pourraient recommencer à fonctionner bientôt. Cela dit, même après l’interdiction, des carrières à Abou Mizan (Metn), au Liban-Sud ou à Rayak (Békaa) n’ont jamais interrompu leur activité. En fait, ce qu’il faudrait, c’est une véritable organisation du secteur. »
N’est-ce pas justement ce dont le ministre de l’Environnement a parlé ? « Ce serait une bonne chose, mais l’ennui, c’est que depuis treize ans, aucun secteur n’a été organisé avec succès, répond-il. Pourquoi celui-là le serait-il ? »
Sur le thème adopté cette année par l’Onu lors des festivités à l’occasion de la Journée mondiale de l’environnement, notamment les problèmes liés aux ressources hydrauliques dans le monde, il fait remarquer qu’« au Liban, c’est le gaspillage et non le manque d’eau qui constitue un obstacle à une alimentation correcte des foyers ». « Cet hiver, poursuit-il, alors même qu’il pleuvait des cordes, on nous imposait déjà un rationnement sous prétexte, nous a-t-on appris, que le débit de l’eau était trop fort... En été, le rationnement est dû à un débit trop faible. On nage en plein absurde. »
Selon M. Darwiche, le défi n’est pas d’ordre technique. « Il existe un plan déjà établi pour la construction de tous les barrages dont le Liban a besoin, estime-t-il. Mais avec une dette qui s’élève déjà à plus de 30 milliards de dollars, aucun d’entre eux n’a été finalisé. De plus, la qualité de l’eau se dégrade progressivement, avec l’extension de la pollution. »
Le dossier de la pollution de l’air ne se porte pas mieux, malgré les mesures prises depuis l’été passé avec l’interdiction des taxis et des minibus au mazout. « C’est la qualité du mazout importé et utilisé qui est problématique, constate-t-il. Pourquoi le gouvernement ne maîtrise-t-il pas l’importation des carburants ? » À ce propos, M. Darwiche rappelle que son ONG a effectué une étude sur les moyens de rendre les transports publics plus efficaces en ville. « Il est possible d’évaluer les besoins, le ministère des Transports possède des chiffres significatifs », ajoute-t-il. L’étude porte autant sur la pollution résultant du secteur des transports que sur les propositions de solutions.
Comment, avec un bilan aussi noir, les environnementalistes continuent-ils à travailler ? Qu’est-ce qui doit être révisé dans leur action ? « Il faut faire progresser notre action vers un lobbying politique plus efficace, estime-t-il. C’est la prise de décisions politiques et leur application sur le terrain qui font défaut. La seule mesure à avoir vraiment été appliquée est celle dirigée contre des pauvres, les chauffeurs de taxi et de bus. Le problème, c’est que l’intérêt personnel prime. Mais même dans cette dernière optique, je ne comprends toujours pas la logique : comment exploiter touristiquement un pays s’il est dégradé, que ses déchets jonchent les rues et ses égouts se déversent dans la mer ? »
S.B.

Les recommandations des ministres
de l’Environnement
Le Conseil des ministres arabes de l’Environnement a clôturé hier ses travaux à l’hôtel Phoenicia par des recommandations qui ont porté sur la région et sur l’Irak en particulier. Les participants à la réunion ont ainsi chargé le secrétariat du Conseil de coordonner avec les organismes spécialisés de l’Onu et des pays arabes concernés « les efforts internationaux visant à remédier à la dégradation de l’environnement en Irak ». Le communiqué du Conseil a insisté d’autre part sur l’exploitation des potentiels arabes dans les domaines du commerce et de l’environnement. C’est le ministre Farès Boueiz qui a présidé la séance de clôture à laquelle a notamment participé le directeur régional du Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE), Klaus Toepfer. Dans une allocution prononcée à cette occasion, M. Boueiz a déclaré : « En tant qu’Arabes, nous devons nous entendre sur un certain nombre de questions écologiques d’autant plus que ces questions-là ont des répercussions politiques. D’où la nécessité d’élaborer une stratégie arabe dans ce domaine », a-t-il précisé. Et d’ajouter : « L’élaboration d’une véritable politique environnementaledans cette région dépend en grande partie de notre volonté de coopérer avec les organisations internationales, avec à leur tête les Nations unies. »
Dix banques s’engagent à ne financer que des projets sociaux et écologiques
Dix grandes banques de sept pays ont annoncé mercredi qu’elles s’engageaient à ne financer que des projets respectant les droits sociaux et l’environnement dans les pays en développement. À l’initiative de la Société financière internationale (SFI/IFC), agence de la Banque mondiale de soutien au secteur privé dans les pays en développement, les dix banques ont adopté les « principes d’Équateur » qui fixent une série de lignes directrices acceptées sur une base volontaire pour les futurs financements de projets de développement. Les dix banques sont Citigroup, Barclays, Crédit Lyonnais, Crédit Suisse Group, ABN AMRO, Rabobank, HVB, WestLB, Royal Bank of Scotland et Westpac Banking. Par l’adoption des « principes d’Équateur », une banque s’engage, selon la SFI, à n’octroyer de prêts qu’aux projets dont les responsables pourront « démontrer leur volonté et leur capacité d’agir conformément au respect des droits sociaux et à des actions respectueuses de l’environnement » lors de la mise en œuvre des projets en question. Les prêts concernés sont tous ceux équivalant ou dépassant 50 millions de dollars et dont le remboursement est dépendant des revenus que les projets sont supposés créer lorsqu’ils sont complètement mis en œuvre. Parmi la quinzaine de critères environnementaux retenus pour l’obtention des prêts, on trouve l’utilisation de ressources naturelles renouvelables, la protection de la santé humaine et de la biodiversité, la production et la fourniture efficace d’énergie, la gestion des déchets, la sécurité des barrages ou la protection des peuples indigènes.
L’homme impuissant à enrayer
la dégradation de la planète
La communauté internationale reste impuissante à enrayer la dégradation de la planète, trente ans après la création de la Journée mondiale de l’environnement, célébrée aujourd’hui. « Les efforts internationaux sont insuffisants par rapport à la destruction accélérée de la biodiversité », a estimé dans un entretien à l’AFP Sébastien Moncorps, directeur du comité français de l’Union mondiale pour la nature (UICN), qui publie tous les ans la « liste rouge » des espèces menacées. Un mammifère sur quatre est menacé de disparition, un oiseau sur huit, un poisson, un reptile et un amphibien sur trois : au total, 5 500 espèces animales sont en péril, et 34 000 espèces végétales, selon l’UICN. Il s’agit d’une « crise d’extinction majeure », relève l’organisme international. Pourtant, l’environnement a été à peine évoqué par les huit pays les plus riches de la planète au sommet d’Évian ces derniers jours. Déjà, le deuxième sommet de la Terre à Johannesburg en août 2002 n’avait pas été marqué par des avancées majeures, alors qu’il devait amplifier l’élan pris dix ans plus tôt à Rio. Alors que la planète est menacée d’une hausse de température moyenne de 1,4 à 5,8 degrés d’ici à la fin du siècle, les efforts des grands pays émetteurs de gaz à effet de serre sont dérisoires. Les Nations unies ont mis en garde mardi contre une envolée des émissions de gaz à effet de serre qui pourrait atteindre 10 % dans les pays industriels et 17 % en Occident dans la décennie en cours. L’Union européenne fait assaut de promesses en faveur de l’environnement, sans toujours tenir ses engagements. Elle a promis de mettre un terme à la dégradation de la biodiversité (faune et flore) d’ici à 2010, lors d’une conférence en avril 2002. « Nous attendons les mesures concrètes », remarque M. Moncorps.
À l’occasion de la Journée mondiale de l’environnement, le Liban accueille d’importants congrès, et beaucoup de discours pompeux sur l’écologie à un niveau mondial sont prévus. Mais puisque l’heure est aux bilans, certains aiment rappeler que les réalisations en matière d’environnement restent minimes, notamment au Liban, et que la dégradation écologique menace...