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SÉMINAIRE - La troisième journée d’études psychanalytiques, samedi « Le paradis perdu – Plaisir et culpabilité », à l’USJ

« Le paradis perdu – Plaisir et culpabilité », tel est le thème de la troisième journée d’études psychanalytiques qui se tiendra samedi 10 mai, dès 9 heures, au campus des sciences humaines de l’Université Saint-Joseph, rue de Damas. Organisé par le Cercle d’études psychanalytiques (CEP), avec le concours du département de psychologie de la faculté des lettres et des sciences humaines de l’Université Saint-Joseph, de l’Université pour tous et du Conseil de la recherche, relevant, tous deux, de la même institution, le séminaire regroupera des spécialistes libanais et français, venus au Liban spécialement pour l’occasion. Huit spécialistes donc interviendront au cours de cette journée. Les Pr Mounir Chamoun, Antoine Courban, Jad Hatem et Mauricette Saïkali, Philippe Gutton, Nicole Jeammet, Philippe Jeammet et René Kaës traiteront divers thèmes relatifs à la culpabilité, notamment celle de l’adolescent qui devrait apprendre à devenir adulte en faisant une fois pour toutes le deuil de son enfance, et celle – toujours présente au Liban à cause de la guerre qui a touché durant 17 ans le pays – des survivants. Ceux qui perdent des êtres chers et qui ne parviennent pas à faire le deuil des personnes perdues, et qui se refusent le droit de vivre… de survivre. Le Pr Chamoun évoque dans ce cadre, « le deuil pathologique vécu comme une autopunition » et qui touche principalement les populations ayant vécu des guerres où des civils « meurent d’une manière soudaine et inattendue ». « Comme ces morts sont hasardeuses, le survivant se demande pourquoi lui (ou elle) et pas moi », relève le psychanalyste citant l’exemple d’une femme qui a perdu son époux et ses enfants en 1984 et qui ne parvient pas, jusqu’à présent, à se laisser vivre. Mais ces morts hasardeuses ne surviennent pas uniquement en temps de guerre, elle peuvent être dues à d’autres facteurs, notamment un accident de la route. « Pendant la guerre, ce phénomène est plus massif, spécialement quand on a affaire à une guerre injuste, qui n’a jamais été reconnue comme une véritable guerre », indique le Pr Chamoun. Le mal est fait donc quand on remplace parfois le mot « guerre » par la phrase nominale « les événements du Liban », ou encore quand, une douzaine d’années après l’instauration de la paix, un groupe de la population se sent toujours marginalisé. Se penchant sur ce thème, le spécialiste cite un exemple contraire, rapporté dans le mémoire d’une étudiante en psychologie, sur les enfants des martyrs du Hezbollah. « La situation est parfaitement maîtrisée. Ces enfants et ces familles sont très fiers de compter un martyr parmi les leurs », explique le Pr Chamoun. Il faut savoir aussi que la mort est vécue différemment selon les communautés religieuses. Le spécialiste précise également qu’il existe d’autres formes de culpabilité accentuées par la guerre : la culpabilité du groupe, qui sera abordée au cours du séminaire. Que les victimes se réjouissent, les spécialistes affirment que la culpabilité du bourreau existe aussi… Cette forme de culpabilité prend de l’ampleur avec le temps. C’est le cas par exemple des tortionnaires français de la guerre d’Algérie, qui ont reconnu les faits des dizaines d’années plus tard, ou encore la culpabilité des Allemands face aux juifs. À leur tour, les victimes et leurs enfants ont un travail de mémoire à effectuer, celui de ne pas oublier et de rappeler tout le temps ce qui s’est passé. Jusqu’à présent aucune étude systématique n’a été entreprise dans ce cadre sur des groupes d’adultes libanais, mis à part un colloque sur la mémoire, tenu il y a deux ans, et un ouvrage traitant des séquelles de la guerre sur les enfants. Pourquoi ? Le Pr Chamoun explique : « On a beaucoup de mal actuellement à éveiller ces sentiments chez la population. » « Les personnes qui ont vécu la guerre n’ont pas envie d’en parler, elles veulent mettre une certaine distance par rapport au passé. Ceci est compréhensif dans un premier temps », poursuit-il. Cette attitude n’est pas considérée comme maladive, au contraire. Pour le Pr Chamoun, elle est « assez saine au début ». « Il faut laisser passer le temps », dit-il, ajoutant qu’il est nécessaire également de prendre en considération le fait qu’au « Liban, on vit toujours dans une situation d’incertitude politique et sociale. » Sachez enfin qu’il existe différentes formes de culpabilité. La culpabilité ontologique, liée à l’être humain en lui-même. Cet être culpabilise parce qu’il n’est pas parfait ; la culpabilité historique que tout un peuple peut vivre dans ses habitudes et ses comportements ; et la culpabilité factuelle, qui est liée aux agissements de l’individu, c’est-à-dire les faits qui le rendent coupable (crime, mensonge, parole non tenue…). Depuis 2001, le Cercle d’études psychanalytiques de Beyrouth (CEP) a organisé deux séminaires. Deux thèmes ont été traités : les visages de la souffrance et le rêve et la réalité en psychanalyse. Formé d’une quarantaine de spécialistes, le CEP est un regroupement de psychanalystes, psychologues et psychothérapeutes désireux de bien connaître les divers courants articulés autour de l’œuvre de Freud, créateur de la psychanalyse, et de réfléchir sur ses retombées théoriques et pratiques dans son application au contexte libanais. Patricia KHODER
« Le paradis perdu – Plaisir et culpabilité », tel est le thème de la troisième journée d’études psychanalytiques qui se tiendra samedi 10 mai, dès 9 heures, au campus des sciences humaines de l’Université Saint-Joseph, rue de Damas. Organisé par le Cercle d’études psychanalytiques (CEP), avec le concours du département de psychologie de la faculté des lettres et...