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Diplomatie - Chareh à Baabda aujourd’hui, Powell à Beyrouth samedi La France appelle la Syrie à continuer à se retirer du Liban

Du fait de la guerre en Irak et de la volonté de relance du processus de paix régionale, le Liban, entre autres, se retrouve, pour la première fois depuis des années, au centre des préoccupations internationales. Signe annonciateur de cet intérêt nouveau des capitales internationales, le ballet diplomatique qui se prépare sur la scène locale, et plus particulièrement la visite annoncée du secrétaire d’État américain Colin Powell, attendu samedi au Liban. Il s’agit d’ailleurs de la première visite d’un secrétaire d’État depuis celle de George Schultz durant la deuxième moitié des années quatre-vingt, le très court passage de Margaret Albright durant le mandat Hraoui n’ayant pas été prévu à l’avance. Une visite qui sera précédée par l’arrivée aujourd’hui du ministre syrien des Affaires étrangères Farouk el-Chareh, lequel doit évoquer principalement le dossier régional avec les différents responsables. Mais la grosse surprise est venue hier du ministre français des Affaires étrangères Dominique de Villepin, qui a appelé contre toute attente la Syrie à « continuer de retirer ses troupes déployées au Liban » et à appliquer la résolution 520 du Conseil de sécurité. Une position d’autant plus surprenante que c’est la première fois depuis la période 1989-1990 – l’ambassadeur de France au Liban était à l’époque René Ala – que le Quai d’Orsay fait référence à la résolution 520 du Conseil de sécurité (adoptée le 17 septembre 1982, trois jours après l’assassinat du président-élu Béchir Gemayel, et qui réclame « le retrait de toutes les forces non libanaises du Liban »). La référence à la 520 était ces derniers temps exclusive au courant politique du général Michel Aoun, hostile à la présence syrienne au Liban, mais ne trouvait aucun autre relais local ou international. Le président français Jacques Chirac s’était de son côté prononcé en octobre dernier devant le Parlement libanais à Beyrouth, pour le « retrait complet » des forces syriennes du Liban, en liant toutefois ce retrait à la relance du processus de paix régional et à l’application de l’accord de Taëf. Le grand marchandage « La Syrie peut dès maintenant faire des gestes et poursuivre le repli engagé de ses forces déployées au Liban », a déclaré M. de Villepin lors d’une conférence de presse, en situant ses propos dans la perspective d’une « paix globale ». « Il est nécessaire que le Liban retrouve rapidement, conformément à la résolution 520, sa pleine indépendance et son entière souveraineté. Cela passe par le retrait de toutes les troupes étrangères et le déploiement des forces libanaises sur la frontière avec Israël », a-t-il souligné. Appelant par ailleurs la Syrie et l’Iran à exercer leur influence sur le Hezbollah « dans le sens de la modération », M. de Villepin a indiqué, dans une allusion au Hezbollah : « À cette fin, il faudra distinguer, au sein de certaines organisations, entre leur composante politique, qui joue un rôle important, et les branches militaires. » Selon notre correspondant au palais Bustros, Khalil Fleyhane, des sources diplomatiques bien informées, étonnées par les déclarations parisiennes, ont mis en exergue le lien qui pourrait exister entre les propos tenus par le ministre français et les visites successives de MM. Chareh et Powell au Liban. Ces sources se sont demandé si les dernières positions de la France concernant la présence syrienne au Liban « ne constituent pas une surenchère par rapport aux déclarations américaines, ou, tout au moins, un renforcement des positions de Colin Powell », qui devrait également évoquer ce sujet avec les autorités libanaises. D’autant plus, ajoutent-elles, que le diplomate français avait soigneusement omis d’aborder la question lors de son passage à Beyrouth, le mois dernier. Et ces sources diplomatiques de se demander si les temps de « l’évolution vers la réalisation d’une paix régionale juste et globale au Proche-Orient », évoqués par le président Chirac en octobre 2002 devant le Parlement libanais, ne sont pas venus. Le fait que « M. de Villepin se réfère à la légalité internationale, en l’occurrence la résolution 520, témoigne », selon un diplomate occidental cité par l’AFP, « d’une accélération du débat sur une paix globale au Proche-Orient ». « Cela augure aussi d’un grand marchandage où toutes les questions vont être sur la table, aussi bien l’occupation israélienne du Golan syrien que le soutien de Damas à des groupes palestiniens ou libanais considérés comme “terroristes” par Washington, et la présence syrienne au Liban », a estimé ce diplomate sous le couvert de l’anonymat. Toujours est-il que l’appel du chef de la diplomatie française survient vingt-quatre heures seulement avant l’arrivée de Farouk el-Chareh à Beyrouth et constitue une donne que le diplomate syrien pourra difficilement occulter aujourd’hui durant ses entretiens avec les responsables libanais. La visite de Chareh Le ministre syrien des Affaires étrangères est attendu à 14h30 à l’Aéroport international de Beyrouth (AIB) où il sera reçu par son homologue libanais Jean Obeid. Les deux hommes auront un entretien rapide au palais Bustros, à la suite duquel ils prendront le chemin de Baabda où Chareh doit rencontrer le président de la République, le général Émile Lahoud, en présence du Premier ministre Rafic Hariri, du président de la Chambre Nabih Berry et de M. Obeid. Durant cette réunion, le chef de la diplomatie syrienne transmettra au chef de l’État un message du président syrien Bachar el-Assad sur les derniers développements au niveau régional. De source diplomatique, on indique que l’entretien entre M. Chareh et les responsables libanais visera à coordonner les positions avant la tournée du secrétaire d’État Colin Powell, attendu vendredi à Damas, puis samedi à Beyrouth. L’entretien de Baabda devrait porter, en principe, sur cinq volets. Le premier de ces volets concerne l’Irak post-Saddam Hussein, la nécessité de former un gouvernement irakien regroupant les différentes fractions politiques, le retrait des « forces d’occupation » américano-britanniques et les relations à entretenir avec Bagdad dans le contexte actuel. Le second volet porte sur la participation libano-syrienne à la « feuille de route ». Le troisième volet concerne la question de la présence militaire syrienne au Liban, à la lumière de la volonté américaine de voir le retrait syrien s’effectuer conformément à l’accord de Taëf. Le quatrième point est en rapport des pressions de Washington en vue de la mise au pas du Hezbollah. Le cinquième et dernier volet traite des sanctions économiques que propose le Congrès américain contre la Syrie et le Liban à travers le « Syria Accountability and Lebanese Sovereignty Restoration Act », et qui correspondent, en ce qui concerne le Liban, à l’arrêt d’une aide de 25 millions de dollars. C’est-à-dire, en gros, tous les sujets que Colin Powell évoquera avec les dirigeants syriens et libanais durant sa tournée. Selon certaines sources diplomatiques, la rencontre entre le dirigeant syrien et les responsables libanais sera d’« une importance capitale parce qu’elle intervient à une période délicate ». L’occasion pour M. Chareh de « sonder les opinions des autorités de Beyrouth pour pouvoir répondre » à Colin Powell si celui-ci vient à évoquer la question libanaise à Damas. Équipe de travail US Par ailleurs, une équipe de travail américaine sous la direction de l’attachée diplomatique au bureau du secrétaire d’État américain, Yuri Kim, est arrivée hier soir à Beyrouth pour préparer la visite de Colin Powell, notamment au plan sécuritaire. Colin Powell est attendu samedi à 17h30 à l’AIB, où il sera reçu par M. Obeid. Sa visite se déroulera dans un climat de sécurité renforcée. Le passage du diplomate américain devrait durer entre deux heures et quatre heures, au cours desquelles il rencontrera le président Lahoud au palais de Baabda, en présence de MM. Hariri, Berry et Obeid. Il se pourrait également que le président Hariri réclame un entretien bilatéral avec M. Powell, lequel, faute de temps, se déroulerait dans un des bureaux de Baabda. Selon des sources diplomatiques, M. Powell devrait inviter le président Lahoud à des prises de position exceptionnelles, concernant notamment la participation à la « feuille de route » et le désarmement du Hezbollah, que Washington considère comme « une organisation terroriste ». Les propos tenus par l’ambassadeur des États-Unis, Vincent Battle, ces derniers jours concernant le retrait des armées étrangères du Liban et la lutte contre le terrorisme pourraient logiquement être repris par Colin Powell, ont conclu ces sources. Il convient de noter que M. Powell a adressé hier un télégramme de félicitations à M. Obeid pour sa nomination à la tête du ministère des Affaires étrangères, dans lequel il a souhaité une coordination américano-libanaise sur le double plan de la lutte contre le terrorisme et de la relance du processus de paix régionale. Michel HAJJI GEORGIOU
Du fait de la guerre en Irak et de la volonté de relance du processus de paix régionale, le Liban, entre autres, se retrouve, pour la première fois depuis des années, au centre des préoccupations internationales. Signe annonciateur de cet intérêt nouveau des capitales internationales, le ballet diplomatique qui se prépare sur la scène locale, et plus particulièrement la...