Rechercher
Rechercher

Actualités

La question essentielle du code électoral reste en suspens

La déclaration ministérielle comprend une lacune de taille. Elle ne réserve en effet aucune mention au code électoral. Sur lequel se fonde pourtant toute la vie politique, et publique, du pays. Sur ce front, le gouvernement nouveau, comme on dit le Beaujolais nouveau, ne s’engage même pas dans des généralités. Ce qui suscite bien des interrogations quand on sait que Berry, pour sa part, a promis un nouveau texte avant la fin de l’année en cours. Une procédure accélérée que devraient permettre les travaux de la commission de refonte mise en place par Samir el-Jisr en sa qualité de ministre de la Justice, dans le précédent cabinet. De son côté, le ministre de l’Intérieur Élias Murr avait également formé un groupe pour réceptionner les idées, les suggestions, des partis ou des particuliers. Ce comité, qui devait déposer ses conclusions en février dernier, a reporté sine die son rapport. Sous prétexte que les projets continuaient d’affluer. Il semble, en réalité, que l’on préfère d’abord mettre au jour la décentralisation administrative. Car le redécoupage des districts devrait conditionner celui des circonscriptions, clef de voûte de toute construction électorale dans ce pays composite. Le gouvernement, prévoyant sans doute des difficultés sinon des blocages, a donc préféré ne pas s’engager à initier une nouvelle loi électorale. Il ne fait que vaguement allusion à ce volet, en classant la représentation démocratique authentique aux côtés d’autres constantes qu’il énumère, comme la souveraineté, l’indépendance et les libertés. Le document dit de l’entente nationale appelle avec insistance à une saine représentation parlementaire, dans son chapitre intitulé « Principes généraux et réformes ». Le prologue de la Constitution souligne, de son côté, que « le peuple est la source des pouvoirs. Détenteur de la souveraineté, il l’exerce par le truchement des institutions constitutionnelles ». La Loi fondamentale ajoute de suite que « tout pouvoir qui enfreint le pacte de coexistence se trouve dénué de légitimité ». Le nouveau gouvernement, qui est probablement le dernier du présent régime, va-t-il élaborer cette loi électorale équitable, équilibrée que les Libanais attendent, parallèlement à la décentralisation administrative ? La plupart des professionnels pensent que le gouvernement, soucieux de préserver avant tout l’unité des rangs internes, préfère éviter de mettre le dossier sur le tapis. Pour ne pas provoquer des polémiques, des controverses, un débat houleux qui affecterait la solidarité nationale. Il semble en effet certain que la question éminemment sensible du découpage des circonscriptions doit faire l’objet d’un dialogue préalable élargi. Dans le calme et sans joutes médiatiques, si l’on veut éviter des chocs multilatéraux néfastes. L’une des idées avancées dans ce contexte est de confier le traitement du problème aux commissions parlementaires, en conviant à leurs travaux l’ensemble des forces actives du pays, les partis, les formations politiques, les communautés, les régions, les pôles de la société civile. Une autre suggestion propose de former une commission de contacts mixte ministérielle et parlementaire, qui produirait une solution de synthèse admissible par tous, au prix de concessions mutuelles. Le but étant de doter le pays d’un texte moderne et durable. Pour lui assurer une saine représentativité générale, en garantissant les droits des candidats comme des électeurs contre tout abus ou toute fraude. Sur le plan pratique, les professionnels cités indiquent que le gouvernement actuel dispose jusqu’à octobre prochain pour bouger. S’il ne le fait pas, cela pourrait signifier qu’il y aurait encore, sous le présent régime, un autre gouvernement, de transition, pour gérer l’élection présidentielle dans un an et demi. Puis le premier cabinet du nouveau régime s’attellerait à la loi électorale. Perspective qui semble la plus probable. Car chaque présidentiable préfère, bien évidemment, que le code électoral soit traité après son éventuel avènement, pour qu’il puisse régler la partition à sa convenance. Cela étant, le découpage des circonscriptions, pour primordial qu’il soit, n’est pas tout dans une élection. Il existe en effet bien des moyens pour détourner ou dénaturer la volonté populaire. Il y a les pressions ou immixtions pendant la campagne électorale, les manipulations des bulletins durant le décompte, les substitutions de procès-verbaux, etc. Il existe de nombreux ouvrages qui détaillent les mille et une manières de truquer des élections sans avoir l’air d’y toucher, ainsi que les façons de les combattre. On peut citer à ce propos le livre de Tony Atallah qui série les mécanismes de distorsion électorale. Il évoque en premier la discrimination dans le découpage des circonscriptions ; le non-usage exclusif de la carte électorale, remplacée par l’extrait d’état civil ; les erreurs dans les listes d’électeurs qui permettent, par exemple, à des dames nouvellement mariées de voter à deux reprises ; les désignations de préposés favorables aux candidats du pouvoir ; la composition des listes avec parachutage ; le retard dans la promulgation de la loi électorale, pour prendre de court les opposants et nuire à l’égalité des chances ; l’argent ; la non-utilisation de l’isoloir ; les présences non autorisées dans le bureau de vote ; les fantaisies dans le décompte ou dans le transport des urnes, etc. Émile KHOURY
La déclaration ministérielle comprend une lacune de taille. Elle ne réserve en effet aucune mention au code électoral. Sur lequel se fonde pourtant toute la vie politique, et publique, du pays. Sur ce front, le gouvernement nouveau, comme on dit le Beaujolais nouveau, ne s’engage même pas dans des généralités. Ce qui suscite bien des interrogations quand on sait que Berry,...