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La Ligue arabe, comme l’Onu, dans l’impasse

Le communiqué de la Ligue, publié au niveau des ministres des Affaires étrangères, a irrité l’Irak. Le texte se contente, en effet, de condamner l’agression US en demandant le retrait des troupes anglo-américaines. Bagdad estime que les Arabes auraient dû couper le pétrole, rompre les relations diplomatiques, vider les bases étrangères présentes sur leur sol, interdire aux Américains et aux Britanniques l’utilisation de leur espace aérien. À l’opposé, le Koweït non plus n’est pas content du communiqué des ministres, parce qu’il n’est pas mentionné comme pays agressé… par l’Irak. Une fois de plus en porte-à-faux par rapport à l’histoire, la Ligue arabe tente de se défausser sur l’Onu, en demandant une réunion urgente du Conseil de sécurité comme de l’assemblée générale, pour ordonner le retrait immédiat des forces d’invasion. Des diplomates arabes soulignent que la Ligue, telle qu’elle est structurée, n’est pas en mesure d’aller plus loin qu’elle ne l’a fait pour l’Irak. Autrement dit, qu’elle ne peut produire que de la littérature creuse. Elle se rabat dès lors sur les Nations unies. Dont la position n’est cependant pas moins délicate ou ambiguë. En effet, comme le rappellent ces sources, le Conseil de sécurité reste toujours divisé. Ou, plus exactement, il est désormais ignoré avec superbe par les USA et la Grande-Bretagne. Peu leur chaut, en effet, ce que le Conseil pourrait prendre comme résolutions. Ces deux puissances ne regardent plus que les opérations en Irak, où leurs troupes foncent sur Bagdad, pour l’assiéger. Si le Conseil devait se réunir, il serait mis devant un fait accompli de terrain. Une réalité de dures batailles qui justifierait par elle-même un veto anglo-américain à tout texte demandant l’arrêt de la guerre. Pire encore, soulignent ces diplomates arabes, le tandem USA-Royaume-Uni pourrait tout simplement bouder les séances du Conseil, ne pas participer au vote, ne pas en reconnaître la validité et refuser ensuite d’exécuter les résolutions adoptées. D’ailleurs, précision utile, seules les résolutions relevant du Chapitre Sept (sanctions) de la Charte sont contraignantes. Comme on le sait à travers un constant exemple israélien, les autres résolutions sont souvent ignorées par leurs destinataires. Quant au recours à l’assemblée générale, en cas de blocage du Conseil, il n’a aucune portée pratique. D’une part, le temps de réunir cette assemblée, la guerre serait probablement finie. D’autre part, les décisions de ce corps consultatif n’ont rien d’impératif. En fait, notent les diplomates arabes en poste à Beyrouth, l’Onu ne reprendra des couleurs que lorsqu’on en viendra à discuter de l’après-Saddam. À ce moment, les États-Unis et l’Angleterre, comme ils l’indiquent déjà, accepteront que le Conseil de sécurité discute de la reconstruction de l’Irak, financée en partie à travers le programme nourriture contre pétrole. Cependant, à ce stade postérieur, il devrait y avoir une reprise du bras de fer entre le couple anglo-saxon belliciste et le front France-Allemagne-Russie. Le conflit tournerait alors, comme le montrent notamment les déclarations d’intentions françaises, autour du système à mettre en place en Irak et d’une éventuelle immixtion unilatérale US à ce propos. Le rôle de l’Onu serait mis en balance. En d’autres termes, ajoutent les diplomates arabes, le camp de la paix devrait se mobiliser pour amortir les effets régionaux d’une guerre qu’il n’a pas pu empêcher. Ombres sur l’aide qu’attend le Liban Localement, côté effets, des appréhensions économiques sont perceptibles. Car, au nom de l’harmonie retrouvée, pour éviter les querelles entre eux, les dirigeants gèlent les dossiers ou projets qui fâchent, pour pressants qu’ils soient. Dès lors, le gouvernement ne fait plus qu’expédier les affaires courantes. On fait donc du surplace, ce qui alimente le marasme plutôt que la relance. Les cercles économiques craignent donc que, finalement, les retombées de la guerre en Irak ne soient lourdes de conséquences pour ce pays. Notamment en ce qui concerne les résultats tangibles de Paris II. À cause, principalement, de la tension entre donateurs occidentaux, du conflit exacerbé entre les anglo-saxons et la France qu’épaule l’Allemagne. Or le Liban a choisi le camp de la paix. Par des positions claires à l’Onu, ainsi que dans les sommets arabes ou islamiques. Jusqu’à présent, les USA ne lui en ont pas trop voulu, tant sa position se trouve justifiée et compréhensible. Mais, à la longue, la pression américaine peut se traduire par des exigences croissantes, en rafale. Washington a déjà demandé au Beyrouth, comme à toutes les autres capitales, de rompre ses liens avec le régime irakien, d’en expulser les diplomates. Injonction rejetée par le Liban, pays souverain. Pour accentuer la dose, les États-Unis pourraient se remettre à réclamer, avec plus d’insistance, la neutralisation du Hezbollah. Tout comme ils pourraient marteler le thème du retrait syrien, récemment évoqué par Colin Powell, qui a été jusqu’à parler d’occupation. Cela en riposte à la position adoptée par la Syrie au Conseil de sécurité. Retour au domaine économique, à la stabilité monétaire et à Paris II. Les USA pourraient enjoindre au Fonds monétaire international de désapprouver le plan d’assistance prévu pour le Liban. En publiant un rapport négatif dénonçant l’incapacité du Liban à tenir les engagements pris pour se gagner la confiance et l’aide financière internationales. Il serait fait état du retard dans les privatisations, cellulaire et électricité en tête, ainsi que des failles dans le programme de réduction du déficit budgétaire. Le Premier ministre voyage donc en mission de coordination avec les Européens, à un moment où la tension entre Washington et Paris risque de s’intensifier. Il espère obtenir un soutien suffisant pour que le pays s’en tire finalement sans préjudice, face aux retombées économiques ou politico-sécuritaires de la guerre en Irak. Le pouvoir, est-il besoin de le relever, se trouve fortement aidé par le climat d’union sacrée qui règne dans le pays. Mais le ciel régional est si sombre que c’est dans une expectative inquiète que les Libanais suivent le déroulement des événements. En se demandant quel va être l’état des relations syro-libanaises avec une Amérique qui risque de hausser le ton par la suite. En tout cas, une chose paraît certaine : le Liban préfère de loin sauvegarder sa stabilité que de courir après les aides financières. Car il n’y aurait plus de pain à manger si la sécurité devait s’effondrer. Ce qui aurait lieu, si d’aventure le Liban souscrivait aux injonctions US contre la volonté de la Syrie. Émile KHOURY
Le communiqué de la Ligue, publié au niveau des ministres des Affaires étrangères, a irrité l’Irak. Le texte se contente, en effet, de condamner l’agression US en demandant le retrait des troupes anglo-américaines. Bagdad estime que les Arabes auraient dû couper le pétrole, rompre les relations diplomatiques, vider les bases étrangères présentes sur leur sol, interdire...