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L’idéologie renaît de ses cendres

Dans les années quatre-vingt-dix, Francis Fukuyama avait fait sensation en proclamant la fin de l’Histoire. Parce que les idéologies, à l’en croire, avaient fait leur temps. C’était enterrer un peu trop vite ces vieilles dames. Qui ont la vie d’autant plus dure qu’elles sortent souvent masquées. Sous les oripeaux de telle ou telle secte. En tout cas, l’idéologie ressuscite aujourd’hui au grand jour et au plus haut niveau. Car au-delà de la crise irakienne, de ses innombrables implications d’intérêts immédiats, ou à court terme, c’est la future gouvernance du monde que l’on met en jeu. Le nouveau débat d’idées, et on sait depuis Voltaire que les idées gouvernent le monde, tourne autour du terme complexe de polarisation du pouvoir. Pouvoir d’agir, unique pouvoir d’être. Les messages, les positions, sont clairs. Les Américains clament qu’ils n’ont besoin de la permission de personne pour imposer au monde l’ordre que le Conseil de sécurité n’est pas capable d’assumer. Chirac et les autres, mais surtout Chirac, répondent qu’il faut aller vers une gestion concertée, onusienne, collégiale, de la planète. Les observateurs pointillistes soulignent, un peu trop volontiers, le caractère tactique, occasionnel, de ces assertions. Pour eux, le moteur c’est d’une part le pétrole, d’autre part la gestation d’un contre-pouvoir ou d’un proconsul associé, l’Europe. Bien évidemment, cela n’est pas faux. Mais quand un discours politique est sous-tendu par une ligne de force, une idéologie, qui déborde de loin les cibles tangibles de l’actuel, ses effets portent sur des dizaines d’années. Des centaines de remous à venir, et de krachs financiers, si le curseur de la balance n’arrive pas à se déplacer tout de suite dans un sens ou dans l’autre. Autrement dit, le bras de fer en cours est en tout cas décisif. Une double alternative : soit l’unipolarisation, avec des accommodements forcés, en tout cas certains, car les USA ne sont pas un État totalitaire ; soit une refondation des Nations unies, pour initier un gouvernement mondial ; soit enfin le pourrissement toxique, aux conséquences aussi incalculables que néfastes. Que les propos des uns ou des autres aient dépassé leur pensée, c’est probable. Et tout à fait regrettable. Car on transforme ainsi, sans l’avoir voulu, en choc sidéral, létal, d’idées ce qui aurait pu n’être qu’un conflit d’intérêts. Jean ISSA
Dans les années quatre-vingt-dix, Francis Fukuyama avait fait sensation en proclamant la fin de l’Histoire. Parce que les idéologies, à l’en croire, avaient fait leur temps. C’était enterrer un peu trop vite ces vieilles dames. Qui ont la vie d’autant plus dure qu’elles sortent souvent masquées. Sous les oripeaux de telle ou telle secte. En tout cas, l’idéologie...