Pour l’égalité des sexes

Par Koïchiro MATSUURA, directeur général de l’UNESCO « L’égalité des genres et les objectifs de développement du millénaire » est le thème par lequel l’ensemble du système des Nations unies a choisi de célébrer la Journée internationale de la femme en 2003. Réduire l’extrême pauvreté et la faim, assurer l’éducation primaire pour tous, promouvoir l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes, réduire la mortalité infantile, améliorer la santé maternelle, combattre le VIH/sida, la paludisme et d’autres maladies, assurer un environnement durable et mettre en place un partenariat durable pour le développement : ce sont là les huit objectifs de développement que les 189 membres de l’Onu se sont engagés à réaliser d’ici à 2015. Est-il nécessaire de rappeler combien l’égalité des genres est un préalable indispensable à la réalisation de ces objectifs ? Oui, aussi longtemps qu’il sera nécessaire de célébrer la journée du 8 mars, consacrée à affirmer que les femmes sont des êtres humains à part entière et que leur contribution est essentielle au progrès de l’humanité. Je suis particulièrement heureux qu’il me soit donné cette année de lancer ce message d’Afrique. L’Afrique qui souffre, peut-être plus que tout autre continent, d’un sous-développement récurrent et dont les femmes sont les victimes premières tout autant que les actrices incontournables pour un développement durable. Assurer l’éducation primaire pour tous ? Aujourd’hui, deux tiers des 861 millions de personnes dans le monde, soit 20 % des adultes, qui ne savent ni lire ni écrire sont des femmes. De même que deux tiers des 113 millions d’enfants qui n’ont pas accès à l’éducation sont des filles. Et 37 % de ces enfants vivent en Afrique subsaharienne. Réduire la mortalité infantile ? Améliorer la santé maternelle ? Combattre le VIH/sida, le paludisme et d’autres maladies ? Rappelons que l’alphabétisation des femmes constitue l’un des facteurs déterminants pour la diminution des taux de mortalité infantile et l’amélioration des conditions d’hygiène et de santé. De même, le combat contre le VIH/sida se livre essentiellement sur le front de l’éducation préventive. Et près de 80 % des personnes atteintes par le virus du VIH/sida vivent en Afrique. Assurer un environnement durable ? N’est-ce pas bien souvent entre les mains des femmes, pourvoyeuses principales, dans bien des parties du monde, des ressources alimentaires, que réside la réponse à nombre de problèmes environnementaux, qu’il s’agisse de déforestation ou de désertification, d’agriculture durable ou de gestion des ressources en eau ? Et n’est-ce pas bien souvent parce qu’elles ont la charge de l’approvisionnement en eau que les jeunes filles, en Afrique, sont détournées des chemins de l’école ? La Décennie des Nations unies pour l’alphabétisation (2003-2012), dont l’Unesco assurera la coordination au niveau international, est donc une décennie tout entière tournée vers les objectifs de développement du millénaire, eux-mêmes essentiellement destinés aux femmes. Les deux premières années de la décennie, et ce n’est pas un hasard, seront d’ailleurs placées sous le thème « Le genre et l’alphabétisation ». Ainsi, le troisième objectif de développement du millénaire, qui est de « promouvoir l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes », prend toute sa signification. L’éducation est, là encore, un facteur clé de participation des femmes à la société en tant que citoyennes. Les femmes, toutes les femmes, doivent avoir la possibilité d’exercer pleinement leurs droits fondamentaux, dont l’accès à l’éducation est parmi les principaux et de participer de manière équitable à la vie politique, économique, sociale et culturelle. Changer les attitudes, les valeurs et les comportements qui perpétuent l’inégalité, aussi bien envers les femmes que les hommes, voilà le grand défi, et de longue haleine, que devra relever le XXIe siècle. L’Unesco est prête à y mettre toutes ses forces et en appelle à tous ses partenaires pour se joindre à ce combat constructeur d’avenir.