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Crise irakienne - Vague d’approbation régionale sans précédent État de grâce islamique pour le Vatican et Bkerké

La crise irakienne est venue à point nommé, après le terrible débat du choc des cultures qui a suivi le 11 septembre, pour détendre les relations entre le christianisme et l’islam. Le monde musulman – et arabe en particulier – a vigoureusement applaudi la ferme attitude du Vatican, via l’Osservatore Romano, condamnant la guerre comme un crime contre l’humanité. Le pape lui-même, par ses déclarations répétées en faveur de la paix, l’audience qu’il a accordée à Tarek Aziz, sa nette réponse à Blair venu plaider l’appel aux armes, suscite une vague sans précédent d’approbation en Orient. Le patriarche Sfeir n’est pas en reste, lui qui, à plusieurs reprises, a dénoncé les belliqueuses intentions US, pour souligner la nécessité vitale d’une solution pacifique. Comme nous l’avons signalé ici même, le président Bachar el-Assad de Syrie ne manque pas d’exprimer son appréciation pour la position de Bkerké. En précisant, devant ses visiteurs, qu’il voue à Mgr Sfeir beaucoup de respect. On ne s’étonnera donc pas que, dans la foulée, l’Ouest local renchérit sur le thème de la reconnaissance, au double sens du terme. Bkerké est plus que jamais qualifié de recours national. Et ses contempteurs habituels mettent volontiers une sourdine, pour le moment, à leurs glapissements. Du coup, le redoutable climat de tension confessionnelle qui s’était instauré depuis août 2001 s’est dissipé au profit d’une détente articulée sur le modérantisme et la promotion de la coexistence. Ainsi, Berry, qui avait plutôt distendu ses relations avec l’Est ces derniers mois, a reçu jeudi à Aïn el-Tineh une délégation des ligues chrétiennes. Les entretiens ont porté sur divers problèmes ou litiges, dans un esprit de cordialité comme de franchise ouverte. Il a été en effet convenu que l’intérêt supérieur du pays commande aux Libanais de s’expliquer entre eux, de dialoguer en somme, pour s’entendre. Le président de la Chambre, qui reste par définition un observateur politique de premier plan, a remarqué devant ses visiteurs que la situation est actuellement calme sur la scène locale, qu’il a comparée à une piscine à l’eau étale. Dans une subtile référence indirecte à l’invitation à la valse lancée jadis par Rachid Karamé, entre deux rounds de guerre, Berry conseille aux Libanais de se livrer sans arrière-pensée à la natation côte à côte. Précisant qu’il faut profiter du répit (forcé) actuel afin de mettre en chantier des lois, des dispositions dont le pays a besoin. C’est-à-dire qu’à son avis, l’on ne devrait pas se cantonner dans une expectative passive en attendant de voir comment les choses vont tourner dans la région. Mais travailler, car il y a tant à faire sur le plan local. D’autant, relève Berry, que le gouvernement est défaillant, visiblement incapable d’assumer ses responsabilités. Il ajoute que les intempéries sont venues prouver, si besoin était, l’incurie des responsables de l’Exécutif face aux épreuves, aux dégâts, aux pertes, au désarroi des régions que la tempête et les inondations ont frappées de plein fouet. Pour le président de la Chambre, le gouvernement n’est plus qu’un corps mort (il utilise même le terme de cadavre) que l’on conserve simplement parce que les circonstances régionales actuelles ne permettent pas de s’en débarrasser. Il pense cependant qu’il est impossible de voir les Trente perdurer jusqu’à la fin du mandat du régime. Joignant sa voix aux éloges unanimes, Berry décerne un satisfecit marqué au Conseil des Églises du Moyen-Orient ainsi qu’à Bkerké pour leur position par rapport à la crise irakienne. Il affirme, en oubliant sans doute des proclamations antérieures relatives à la Palestine, que le manifeste du Conseil des Églises est une première dans l’esprit d’ouverture sur les causes arabes. Il félicite ensuite Mgr Sfeir pour avoir reporté la visite qu’il devait effectuer aux États-Unis le 7 mars. Il congratule également le Vatican pour avoir ordonné une journée de la paix le 5 mars en faveur de l’Irak et du Moyen-Orient. Il reste qu’à l’Ouest, on est un peu gêné : à Rome même, comme dans bien d’autres villes occidentales, des millions et des millions ont manifesté contre la guerre... et rien de tel dans les capitales arabes, à quelques timides exceptions près, comme en Jordanie ou en Libye. D’ailleurs, c’est l’Occident, la France, la Russie et l’Allemagne plus particulièrement, qui résiste le plus farouchement, le plus médiatiquement aussi, aux poussées de fièvre US. Il y a même des boucliers humains qui ont gagné l’Irak, venus d’Europe et d’Amérique, alors que les foules arabes n’ont pas suivi ce mouvement, pour symbolique qu’il soit. Pour en revenir à la scène locale, certains proposent que l’on mette la détente à profit pour discuter de question importantes comme la loi électorale, la révision de la Constitution, les statuts des partis ou la décentralisation administrative. Berry pour sa part s’est dit disposé à discuter de tout. C’est-à-dire à ouvrir le dialogue. Répondant indirectement à Omar Karamé, qui demande que l’on ramène le mandat du président de la Chambre de quatre à un an, Berry précise qu’il est prêt à débattre d’un panel complet et non d’un sujet pris séparément. Il a ensuite plaidé qu’il faut faire les sélections de fonctionnaires en base de la compétence et de l’expérience, sous surveillance des organismes de contrôle habilités. « C’est seulement dans ce cas, a-t-il eu le courage d’avouer, que je pourrais renoncer à réclamer ma part dans l’Administration. Autrement, je continuerais à l’exiger, comme le font les autres dirigeants. » Ses visiteurs chrétiens ont pour leur part souhaité que l’on encourage un climat de dialogue, en multipliant les rencontres, pour promouvoir l’entente à la faveur de la détente. Ils ont souligné que sur le dossier régional, sur l’Irak en particulier, les positions des loyalistes et des opposants se rejoignent pratiquement ces jours-ci. Ajoutant que la phase devrait permettre de contrer, au nom d’un modérantisme partagé, les extrémistes qui tentent d’attiser les haines ou les rancœurs confessionnelles. Comme cela s’était vu l’an dernier, à la suite de divers incidents. Des attaques virulentes avaient été alors lancées contre l’Église et contre Bkerké. Un politicien note que le présent vient montrer combien ces offensives étaient pernicieuses et erronées. Un autre vétéran conclut que le Liban ne peut vivre et survivre que par l’entente entre ses fils, de toutes religions. Pour rester, comme l’a dit le pape, plus qu’un pays, un message. Philippe ABI-AKL
La crise irakienne est venue à point nommé, après le terrible débat du choc des cultures qui a suivi le 11 septembre, pour détendre les relations entre le christianisme et l’islam. Le monde musulman – et arabe en particulier – a vigoureusement applaudi la ferme attitude du Vatican, via l’Osservatore Romano, condamnant la guerre comme un crime contre l’humanité. Le pape...