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THÉÂTRE - « I Had a Dream », au Monnot, ce soir et demain Le chant crispé des déchirures d’un trio féminin (photo)

Créée à Paris en mai dernier I Had a Dream, de la compagnie Les Amigrés, entame sa première tournée à Beyrouth, au théâtre Monnot. Normal, Carole Ammoun, une des trois comédiennes, est libanaise. Qui plus est, elle est à l’origine même de la pièce de Vincent Byrde Le Sage, écrivain et metteur en scène. Malgré une solide formation professionnelle, Carole a du mal à dénicher des rôles en France parce qu’elle ne correspond pas au « type féminin dominant. À savoir : blond, grand et blanc ». C’est ce qu’explique le metteur en scène. Un jour, elle est venue le trouver, avec une amie, comédienne noire, pour lui demander de leur écrire un texte. Vincent Byrde Le Sage, étant lui-même « breton, de mère blanche et de père noir », comprend l’impact du regard d’autrui sur la différence. Il a donc décidé d’axer son écriture sur les a priori auxquels chacun se trouve finalement confronté, qu’il soit noir, blond ou brun. Pour cela, il n’a pas été chercher très loin, et s’est inspiré du vécu des deux jeunes femmes. Séance de jaugeages L’histoire est simple. Trois filles arrivent pour un casting. Une « black », une beur et une blonde. L’ambiance est bizarre, personne pour les accueillir, juste une horloge au tic-tac exaspérant et des gongs déstabilisants. Emma (Mata Gabin) est noire. Tempérament vif, à fleur de peau. Odile (Carole Ammoun) est libanaise, petite, brune, de type un peu indéfini. Elle s’étonne de concourir dans la même « catégorie » qu’Emma. Ce qui va bien évidemment attiser la rancœur de celle-ci et provoquer ses foudres. Au moment où les deux filles finissent de s’écharper, apparaît Isabelle (Caroline Bokanowski), grande, blonde, yeux bleus... Les deux vont spontanément se liguer contre cette « pétasse blondasse ». On est toujours l’autre de quelqu’un ! Le nœud de la pièce est là. Ce poids accablant du regard d’autrui, le circuit fermé des stéréotypes, les différences qui se transforment en préjugés. Alors qu’elles pourraient être source d’entente, d’enrichissement, d’ouverture. Deuxième partie. L’homme déboule sur scène. À la fois présent et absent, mâle et docile, objet de fantasmes et de délires, il va exacerber les clivages du trio, dévoiler encore plus leur inégalité. Dans leur approche amoureuse d’abord : l’une va tenter de l’attraper, l’autre va jouer de sa fragilité et la troisième ne peut même pas s’en approcher. Dans l’injustice d’être femme dans un monde d’hommes, ensuite. Elles vont finalement se retrouver, s’unir, dans cette douleur d’être femme, cette mélancolie inhérente à leur besoin d’amour. Et s’allier de nouveau pour rejeter cet autre ultime, dont elles rêvaient mais qui les déçoit. Forcément. Il reste que cet « autre » souffre lui aussi… Voilà pour la trame de cette pièce, qui se voudrait comme « une descente dans les couches de l’humain, indique le metteur en scène. ça commence par la couleur de la peau, pour finir dans le cœur et l’âme… » Une « trajectoire » intéressante certes, mais en dents de scie. Plutôt mal exploitée. I Had a Dream aurait été une bonne pièce, n’étaient certaines incohérences scéniques et des inégalités dans le texte, tantôt en longues tirades poétiques, tantôt en langage cru. La performance des acteurs est honnête. Mais on en sort avec un sentiment diffus de ratage quelque part. Ce « dream »-là laisse une impression d’indéfinissable malaise, comme on en ressent au sortir d’un songe gris. Zéna ZALZAL
Créée à Paris en mai dernier I Had a Dream, de la compagnie Les Amigrés, entame sa première tournée à Beyrouth, au théâtre Monnot. Normal, Carole Ammoun, une des trois comédiennes, est libanaise. Qui plus est, elle est à l’origine même de la pièce de Vincent Byrde Le Sage, écrivain et metteur en scène. Malgré une solide formation professionnelle, Carole a du mal à...