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Débat - Conférence internationale à Paris sur le thème « Pro Armenia » Aram I expose le rôle géopolitique assumé à nouveau par l’Arménie dans le monde Prochain colloque au catholicossat d’Antélias sur le dialogue islamo-chrétien

Le rôle géopolitique qu’assume à nouveau l’Arménie sur la scène internationale, après 70 ans de domination soviétique, ainsi que la mission culturelle et humaine de l’Arménie dans le contexte présent ont été au centre du discours que le catholicos arménien de Cilicie, SS Aram I, a prononcé au cours d’une conférence internationale qui s’est tenue le week-end dernier à Paris sous le thème « Pro Armenia ». Le catholicos a évoqué sur ce plan six points de réflexion portant, notamment, sur la place de l’Arménie dans la mondialisation, les rapports entre l’Église et la nation arménienne, les droits de l’homme, la violence et le dialogue ainsi que le rôle de l’Arménie en tant que trait d’union entre l’Orient et l’Occident. Nous reproduisons ci-dessous de larges extraits de l’intervention d’Aram I. « C’est une grande joie pour moi de vous saluer dans l’esprit de fraternité et d’amour chrétiens. Vous êtes assemblés au Sénat, un des bastions de la haute politique française, afin de débattre ensemble des soucis et des perspectives concernant le présent et particulièrement le futur de l’Arménie. J’apprécie cette initiative de la Fédération euro-arménienne pour la justice et la démocratie. Je considère cet effort opportun et essentiel pour un pays qui, après soixante-dix ans de domination soviétique, est en train de récupérer sa place dans la communauté internationale et d’assumer à nouveau son rôle géopolitique et sa mission cuturelle et humaine parmi les nations et les civilisations du monde. Le thème de cette conférence internationale est « Pro Armenia », que je traduis : être avec et pour l’Arménie. Dans le cadre de ces quelques mots d’introduction, je voudrais identifier six domaines et partager avec vous quelques perspectives qui pourraient contribuer à vos réflexions et discussions. 1- Mondialisation et particularité : la présente conjoncture de l’histoire se caractérise par une mondialisation agressive. Nous sommes tous dominés par cette réalité omniprésente et omnipuissante. Les effets de la mondialisation quant au progrès de l’humanité sont indéniables. Mais, face à cette mondialisation, l’identité et l’intégrité des cultures, des nations, des civilisations et des communautés sont constamment menacées. Où se trouve l’Arménie, ce petit pays, dans cette avalanche de la mondialisation ? Comment l’Arménie, qui a survécu à une histoire si tourmentée, peut-elle garder sa particularité tout en s’ouvrant au processus de mondialisation ? Quelle doit être sa place et quel rôle spécifique peut-elle assumer au sein de la communauté internationale ? Je pense que la réponse à ces questions a déjà été donnée par l’historien arménien du Ve siècle Moïse de Khorène. Parlant de l’Arménie et du peuple arménien, il écrivait : “Bien que nous soyons un petit pays et une petite nation, on trouve chez nous de grandes valeurs culturelles et humaines”. L’Arménie ne possède pas de pétrole ou d’autres ressources naturelles. Mais elle a d’immenses ressources culturelles qui peuvent lui assurer une place importante au carrefour des nations et des civilisations. 2- Démocratie et religion : c’est là un domaine particulièrement sensible qui doit être présent à l’ordre du jour de nos débats. Pour l’Église, il existe une interdépendance, donc une complémentarité, entre démocratie et religion. Si ce que l’on appelle démocratie est basée sur les valeurs et les droits humains, si la démocratie encourage participation et communauté et si elle lutte pour la paix et la justice pour tous, alors l’Église soutient cette démocratie. En même temps, l’Église œuvre pour une démocratie sous-tendue et guidée par les valeurs morales ; une démocratie qui rejette toute forme de discrimination et de marginalisation ; une démocratie qui est pour les libertés religieuses à condition de ne pas encourager la religion à s’engager dans la petite politique ou à pratiquer le prosélytisme. Je crois que l’Arménie, le premier État chrétien du monde, a une expérience particulière quant aux relations entre nation et Église. Pendant des siècles, l’Église et les instances et institutions politiques ont maintenu des relations mutuellement enrichissantes dans leur engagement dans la vie de la nation. Mais l’État et l’Église doivent conserver chacun son identité, son intégrité et son indépendance... 3- Droits de l’homme et intérêts stratégiques : les droits de l’homme restent une priorité pour plusieurs pays et pour la société civile en général. Mais en réalité, ces droits ne s’appliquent pas dans de nombreux pays et dans de nombreux secteurs de nos sociétés. Même les pays signataires de la Déclaration des droits de l’homme ignorent les droits des autres nations ou communautés, négligeant même, sous une forme ou une autre, les droits de leurs propres citoyens. Très souvent, les grandes puissances parlent au nom des droits de l’homme mais agissent au nom de leurs propres droits et de leurs propres intérêts stratégiques. Il existe donc une grande différence et même contradiction entre théorie et pratique... 4- Violence et dialogue : le monde d’aujourd’hui est dominé par la violence qui a pénétré tous les aspects et secteurs de nos sociétés et ce, dans toutes les régions. Combattre la violence doit donc être une priorité absolue pour toutes les nations et toutes les religions. La force brutale peut évidemment arrêter la violence mais elle ne peut pas la déraciner. L’éducation et le dialogue sont, à mon avis, les moyens les plus sûrs pour empêcher cette violence. La prévention par des moyens efficaces doit être notre stratégie commune. Encore une fois, l’histoire du peuple arménien nous offre une expérience où la violence est combattue par l’esprit de rapprochement, l’éducation, le dialogue et la confiance mutuelle. Malgré toutes les vicissitudes, malgré les massacres, les persécutions et les déportations en masse, le peuple arménien n’a jamais été partisan de la violence sauf dans le cas de légitime autodéfense... 5- Entre Orient et Occident : c’est l’une des caractéristiques les plus significatives de l’Arménie et du peuple arménien. Située dans la région du Caucase, ayant établi pendant quelque quatre siècles un royaume en Cilicie sur les bords de la Méditerranée, dispersée de par le monde après le génocide de 1915, cette petite nation a effectivement toujours été un pont entre l’Orient et l’Occident. Non seulement la géographie et l’histoire de l’Arménie ont-elles imposé cette expérience et cette particularité, mais celles-ci sont aussi dues aux perspectives, aux valeurs et aux traditions, composantes vitales de l’identité arménienne. Avec cette vision globale, l’Arménie peut jouer aujourd’hui ce rôle de pont dans le cadre des relations géopolitiques et culturelles. Dans ce même contexte, les communautés arméniennes de la diaspora apportent une contribution importante et spécifique, particulièrement dans le monde arabe et musulman où elles sont activement et pleinement engagées dans la vie des sociétés. En effet, plus que jamais dans ce monde d’interdépendance, l’interaction entre Orient et Occident apparaît clairement dans nos perspectives et dans différents domaines de notre vie quotidienne. Cette expérience arménienne peut contribuer à un dialogue vivant non seulement entre l’Orient et l’Occident, mais aussi entre les religions chrétienne et musulmane. Dans ce cadre précis, nous projetons la tenue prochaine d’un colloque international sur ce thème dans notre catholicossat arménien de Cilicie à Antélias, au Liban. 6- Vers une nouvelle Europe : après la chute des murs idéologiques, l’Europe est en train de se réunifier et de se reconstituer. Dans le contexte de ce processus décisif pour l’avenir de cette région, l’Europe doit, à mon avis, prendre en considération les questions et les défis suivants : – Comment peut-on approfondir l’interdépendance et la complémentarité et en même temps préserver les particularité des États-nations ? – Comment peut-on participer activement à la mondialisation et en même temps éviter la monoculture qui menace les identités et la qualité des cultures de l’Europe ? L’Arménie est un État-nation riche de potentiel. Elle est un pays qui s’est constitué sur des valeurs culturelles, morales et spirituelles. Sa position dans la géopolitique de la région n’est pas négligeable. Elle mérite donc un rôle dans la reconstruction de la nouvelle Europe. Avec ses expériences locales, globales et multidimensionnelles vécues au cours de sa longue histoire aussi bien en Arménie, en Cilicie qu’en diaspora, la nation arménienne, une des plus anciennes au monde, est digne d’une place particulière dans la famille des nations. »
Le rôle géopolitique qu’assume à nouveau l’Arménie sur la scène internationale, après 70 ans de domination soviétique, ainsi que la mission culturelle et humaine de l’Arménie dans le contexte présent ont été au centre du discours que le catholicos arménien de Cilicie, SS Aram I, a prononcé au cours d’une conférence internationale qui s’est tenue le week-end...