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CNSS - Le texte a été transféré à une commission ministérielle Le projet de loi sur les retraites comporte de nombreuses lacunes

Le projet de loi sur les retraites, examiné hier en Conseil des ministres et transféré à une commission ministérielle présidée par Issam Farès, vise à remplacer le système actuel « d’indemnités de fin de service » par un « système de retraites et de protection sociale ». Pour le consultant Fadi Esta, qui suit le dossier de la réforme depuis plusieurs mois, le texte comporte de nombreuses lacunes, notamment en ce qui concerne l’aspect financier et les garanties fournies aux salariés. Le projet de loi prévoit de remplacer la caisse d’indemnités de fin de service par une nouvelle Caisse qui récoltera les cotisations des salariés. Celles-ci représenteront 15 % du salaire dans la limite de dix fois le salaire minimum, soit trois millions de livres par mois. Les pensions seront versées aux bénéficiaires en fonction de critères liés à l’âge du retraité, au nombre d’années d’activités, ainsi qu’aux performances financières de la caisse. Pour Fadi Esta, le projet est incomplet, car, d’une part, il laisse beaucoup de questions en suspens et, d’autre part, il accorde une place disproportionnée au politique en attribuant au Conseil des ministres des prérogatives devant relever du conseil d’administration de la Caisse nationale de Sécurité sociale. « Cette politisation du système n’est pas souhaitable », estime-t-il. L’expert dénonce surtout l’absence de lisibilité financière du dispositif, faute de mécanisme expliquant le calcul des pensions. « Le moins que puisse attendre l’acteur principal, qui est l’employé, c’est de savoir ce à quoi il aura droit au moment de sa retraite. Cela suppose de publier tous les ans un bilan détaillé de la situation financière de la Caisse de retraites. » Le rapport périodique doit clarifier les comptes de la Caisse en donnant un état de la performance des placements et un modèle des pensions futures. Il est assez facile de voir quels avantages tire le patronat de ce projet de réforme, en revanche, les bénéfices des employés ne sont pas clairs, poursuit M. Esta. Le système actuel d’indemnités de fin de service repose sur des cotisations mensuelles non plafonnées représentant 8,5 % du salaire. L’indemnité de fin de service est versée par la CNSS à concurrence des cotisations encaissées, la différence étant assumée par l’employeur. En raison de la dévaluation de la monnaie survenue dans les années 1980 et au début des années 1990, cette différence représente un coût important pour les entreprises. Le projet de loi supprime cette obligation, tout en apportant un plafond aux cotisations de retraite, qui sont majoritairement à la charge de l’employeur. Et il n’impose aucune cotisation supplémentaire pour des retraites complémentaires, comme ce serait le cas dans un système « à plusieures étages », explique Fadi Esta. Un tel système, qui a la faveur de plusieurs spécialistes, mais n’a pas été retenu dans le projet de loi, repose sur une première tranche de cotisations garantissant une retraite minimum pour tous, une deuxième tranche de cotisations obligatoires assurant une pension complémentaire en fonction du niveau du salaire, et une troisième tranche facultative dont la gestion est confiée au secteur privé. En revanche, l’employé est dans le flou, estime Fadi Esta. Ses contributions sociales sont augmentées, car, dans les faits, « le plafond de dix fois le salaire minimum est beaucoup plus élevé que ce qui est pratiqué dans des pays comparables au nôtre, comme la Tunisie ou le Maroc », ce qui signifie concrètement qu’il englobe la grande majorité des salariés (ceux dont la rémunération est inférieure ou égale à trois millions de livres par mois). En contrepartie, le texte ne précise pas comment sera calculée la pension à laquelle il aura droit. « Un article indique que l’État se charge de lui assurer une pension minimum, sans préciser comment, et un autre dit que s’il n’est pas possible de lui assurer une pension, l’employé recevra ses cotisations augmentées de leur rendement, ce qui revient au système initial d’indemnités de fin de service. » En ce qui concerne la Caisse elle-même, Fadi Esta souligne que le projet de loi lui attribue des prérogatives qui ne relèvent pas de sa compétence. La Caisse de retraites doit normalement réunir les cotisations et les placer. « Ce n’est pas son rôle d’assurer une pension viagère, c’est le métier d’une compagnie d’assurances qui sait comment, selon des calculs actuariels, gérer le risque lié à ce type de rentes. » En France par exemple, la caisse qui valorise les cotisations est indépendante de l’organisme chargé d’assurer les pensions. Quant à la période de transition, le consultant s’interroge sur la capacité de la CNSS à mettre en œuvre et surtout à contrôler le transfert des dossiers pour passer du système d’indemnités de fin de service au système de retraites. En résumé, la réforme consiste à passer à un système de capitalisation individuel, ce qui était déjà prévu dans la loi de 1969, mais n’a jamais été appliqué. Mais plutôt que d’instaurer un régime de retraites « à plusieurs étages », le projet propose un système simplifié à un étage dont le fonctionnement est encore mal défini. Sibylle RIZK
Le projet de loi sur les retraites, examiné hier en Conseil des ministres et transféré à une commission ministérielle présidée par Issam Farès, vise à remplacer le système actuel « d’indemnités de fin de service » par un « système de retraites et de protection sociale ». Pour le consultant Fadi Esta, qui suit le dossier de la réforme depuis plusieurs mois, le texte...